Groupe:

Dream Theater + Devin Townsend

Date:

03 Mai 2022

Lieu:

Toulouse

Chroniqueur:

ced12

Les temps sont plutôt sympas dans la Ville Rose, le Stade toulousain retrouve des couleurs (rouge et noir bien sûr), le football (où ça joue en violet) retrouve l’élite après deux années de purgatoire et Dream Theater revient pour la première fois depuis 1998. Il y a vingt-quatre ans, l'événement avait eu lieu au Bikini, l’historique salle « soufflée » trois années plus tard dans une explosion qui marqua l’ancienne capitale des Wisigoths (salle reconstruite depuis sur les bords du Canal du Midi à Ramonville). Autre événement, c’est la première venue de Devin Townsend, autre légende de la musique metal. Les lecteurs l’auront compris, c’est soirée gala au Zénith. Cela faisait un bail que le théâtre de rêve n’avait pas amené de première partie pour privilégier des shows complets et dantesques mettant en valeur des albums mythiques de la formation (Images & Words en 2017 puis Scenes From A Memory début 2020). Les Américains reviennent sur un format presque « classique » (terme à nuancer, ce groupe magnifiant tout ce qu’il fait) et avec Devin Townsend en première partie, le groupe nous gâte. Pour information, sur les dates britanniques et irlandaises, c’était TesseracT qui officiait pour un niveau de qualité comparable.
 

DEVIN TOWNSEND

Revoilà notre Canadien tant aimé au parcours stratosphérique. Sa présence est un sacré cadeau pour le public toulousain qui se régale. Avec une setlist assez variée et brassant plutôt bien l’hallucinante discographie du garçon. Je n’ai pas compté le nombre de disques sortis par les deux groupes ce soir mais je pense qu’on pourrait passer la nuit à les écouter qu’on n’en aurait pas terminé. Neuf titres forcément, c’est trop peu mais le Canadien offre une belle vision de son incroyable parcours. Le show ? Génial, comme toujours avec ce frontman très professionnel, communicatif, expressif à souhait... bref, en un mot comme en cent, toujours aussi incroyable. La météo printanière en a laissé plus d’un profiter d’une bonne bière au soleil et la salle sonne un peu creux lorsque le show commence. Point d’inquiétude, cela se remplit très vite alors que la géniale Failure lance les hostilités avec d'emblée un premier solo aérien de très haute volée. Dès le début, et comme à son habitude, Devin crée une bonne connexion avec l’auditoire, nous rappelle à juste titre que nous sommes vivants et qu’il faut en profiter. Balayant habilement sa discographie, le Canadien est en mode « simple ». Accompagné de trois musiciens aussi discrets qu’efficaces, nous sommes loin des shows avec chemises à fleur et cocktails proposés avant la crise sanitaire. Les albums Ocean Machine (Regulator), Terria (Deep Peace) sont mis à l’honneur mais la vraie grosse baffe reste ce Aftermath dévastateur. Strapping Young Lad reste une formation culte et quelle tornade que ce titre ! Mention spéciale au batteur qui cogne dur et bien. Comme souvent, Devin Townsend (ab)use de samples, cela fonctionne plutôt bien ici. March Of The Poozers, écrasante à souhait, puis More! viennent conclure un show d’une heure passé à une vitesse folle. Moins cabotin qu’en tête d’affiche mais toujours expressif, le divin Devin arbore son plus beau sourire et on sort de là heureux. Le garçon n’en oublie pas de saluer les musiciens et le crew de Dream Theater les qualifiant de « wonderful people ». Un show génial et efficace dans sa setlist, ce qui me ravit... le Canadien partant parfois trop dans ses délires à mon goût. Dans ce format, où il ne prend que peu de risques dans ses choix artistiques, il est irrésistible. Il est d’ores-et-déjà attendu en 2023 pour des shows personnels. Je ne le manquerai pas.  

Setlist de Devin Townsend :

01. Failure (Devin Townsend Project)
02. Kingdom
03. By Your Command
04. Aftermath (Strapping Young Lad)
05. Regulator
06. Deadhead (The Devin Townsend Band)
07. Deep Peace
08. March Of The Poozers
09. More! (Devin Townsend Project)

 

DREAM THEATER

Après cette ébouriffante première partie, place aux maîtres de cérémonie. Les Américains ayant « réduit » leur durée de show, j’étais intéressé de voir ce qu’ils allaient nous proposer comme setlist. Aucune inquiétude vu les références des garçons mais une réelle curiosité. Mettant comme il se doit en valeur leur dernier – et très bon – disque, DT pioche encore où il faut dans sa discographie pour continuer de valoriser leur si beau parcours. Et je ne vais pas être déçu, bien au contraire. Démarrant par The Alien d’une redoutable efficacité, John Petrucci a beau dégainer un premier solo de dingue, c’est John Myung qui impressionne avec une ligne de basse délirante. Le niveau technique est maintenu avec 6:00 issu de Awake, joli cadeau fait aux fans et seule excursion de la soirée dans le répertoire des années 90 de DT. Cette période fut bien couverte sur les dernières tournées alors cela se justifie sans problème. James LaBrie est aussi en très bonne forme et les compositions proposées lui vont très bien. Je l’ai trouvé très bon sur ce show, à l’aise. Le groupe privilégie des titres plus émotionnels avec de très jolis refrains. Awaken The Master, Invisible Monster du dernier album font très bien le job même si je trouve les refrains un poil moins impactants. La comparaison se fait ressentir avec Bridges In The Sky donc les lignes vocales sont une pure merveille.

Là encore, le temps défile à une allure folle, James LaBrie a tout juste le temps d’exprimer quelques mots de remerciement que le triptyque final vient nous cueillir. On touche au sublime avec The Ministry Of Lost Souls, première pièce de quinze minutes proposant des lignes de guitares surpuissantes émotionnellement avec un Petrucci magistral. Le morceau-titre du dernier album fonctionne aussi très bien avec encore un bien joli passage au bout de dix minutes, tout en émotion avant des parties instrumentales toujours aussi folles. Le chef-d’œuvre de ce show arrive pourtant sur le rappel avec The Count Of Tuscany, à mon sens l'un des deux meilleurs titres du groupe (avec la floydienne Octavarium autre masterclass des New-Yorkais qu’on attendra légitimement sur la prochaine tournée !). Génialement construite avec ce gimmick vocal très accrocheur bien repris par la foule avant LE solo atmosphérique de John Petrucci, moment de grâce hors du temps (impérialement exécuté). La partie ballade achève une assistance déjà conquise avant un final plus punchy passant presque pour terne vu la magie proposée plus tôt dans le titre.

Jordan Rudess reste toujours aussi brillant et visuel par son jeu. Son entente avec Petrucci enthousiasme toujours autant et leur relation peut rappeler les riches heures David Gilmour - Richard Wright. A la batterie, Mike Mangini assure à merveille, arbore un grand sourire. Son engagement physique impressionne, il suffisait de le voir s’étirer en arrière scène alors que Petrucci et Rudess illuminaient la scène du Zénith. 

Après avoir privilégié des concerts anniversaire de leurs disques mythiques remettant l’église au milieu du village après un cycle The Astonishing plus contesté, Dream Theater est revenu à un format archi-classique alternant nouveaux titres (qui passent vraiment bien) et morceaux plus anciens intelligemment choisis. J’insiste, cette setlist, remarquablement équilibrée, fonctionne à merveille. Même en faisant les choses "normalement", Dream Theater reste à des niveaux d’excellence stratosphériques. L’aspect émotionnel du combo est encore plus mis en avant (la tournée Scenes From A Memory a peut-être joué en ce sens). J'adore cet aspect chez eux, quand ils délaissent quelque peu l'ultra-technicité (point sur lequel ils n'ont plus rien à prouver à personne si ce n'est à eux-mêmes) pour aller naviguer sur les terres envoûtantes du Floyd, John Petrucci étant particulièrement à l'aise dans ce registre. Formation fascinante d'autant que si j'ai toujours suivi ce groupe depuis l'adolescence, je dois confesser qu'il m'avait parfois manqué ce petit quelque chose pour totalement basculer dans leur si riche univers. C'est à présent chose faite. Il n'y a pas que du négatif dans le fait de "vieillir". Deux groupes hors-normes pour une très belle soirée portée par des musiciens d'exception !  

Setlist de Dream Theater :

01. The Alien
02. 6:00
03. Awaken The Master
04. Endless Sacrifice
05. Bridges In The Sky
06. Invisible Monster
07. About To Crash
08. The Ministry Of Lost Souls
09. A View From The Top Of The World

Rappel :
10. The Count Of Tuscany

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