Soirée pluvieuse sur Toulouse la fin du mois d’Avril confirmant bien l’adage sur ce mois tampon entre fin d’hiver et douceur printanière. C’est vers 20 heures que je me rends au Rex pour encore un gros plateau death bien énervé. Après Suffocation en janvier puis Decapitated en mars, les fans de death toulousains sont sacrément bien servis en 2024. Est-ce cette offre excessive ou l’exigence de l’offre musicale qui explique une affluence certes très correcte mais seulement garni d'un gros demi-Rex ce soir. Pour ma part, je préfère voir le verre à moitié plein et me réjouir qu’un tel plateau assez exigent trouve un vrai public. D’initiés qui plus est !

Vulvodynia 

Lorsque rentre dans les lieux, c’est Vulvodynia qui est sur scène, avec un peu d’avance sur un running-order communiqué un peu tardivement une fois n’est pas coutume. De fait, j’ai raté Melancolia dont j’avais pourtant apprécié le disque de blackened deathcore. Partie remise pour les australiens espérons même si je dois le confesser, quatre groupes pour une soirée de death extrême, c’est trop pour moi. Je dois être un peu fragile allez savoir… 

Retour à Vulvodynia qui nous vient d’Afrique du sud et d’entrée me surprend un peu avec l’absence d’un chanteur (contrairement aux clichés visibles sur le web) et qui se fait « dépanner » sur un dernier titre plutôt brutal. L’ensemble est sacrément énervé, les deux guitaristes (armés d’instruments sans tête) abattent un gros boulot, délivrent des riffs fracassants. Ça pogotte bien dans un pit intéressé. Le groupe tend vers un slamming brutal death (étiquette officielle concernant le combo) ça me semble une bonne description. Heureusement pour ce style, c’est bien interprété ce qui permet de bien suivre et comprendre ce qui se passe. Un des musiciens arbore un bel ensemble tendance pyjama safari, c’est assez original, bien death dans l’image que je m’en fais où le look paraît parfois désinvolte et décalé. C’est en tout cas visuellement original. Pour le reste, Vulvodynia impose son style sans pitié. 

Le recours au « chanteur d’appoint » amène des vocaux à coup de piq-squeal. Définitivement pas ma tasse de thé ce type de chant mais quelle efficacité. Tant pis pour le manque d'originalité dans un deathcore devenu quelque peu caricatural. Impressionnant de force de frappe, Vulvodynia a fait le job et même si on continue d’en vouloir aux sud-africains pour les misères qu’ils nous font subir en rugby (bien aidé en cela par des arbitres qu’on qualifiera de peu inspirés), on ne pourra que recommander ce groupe aux fans de death extrême amateurs de brutalité.

Fallujah 

Très clairement, c’est le groupe qui m’a motivé à venir ce soir. En effet, le death technique des californiens est assez riche et je les avais trouvés intéressants sur album. Le groupe essaie de dépasser un registre death technique pour proposer une vraie dimension progressive avec des passages plus éthérés, plus aériens. Cela donne un rendu général où la brutalité et l’ambiant ne font que se nourrir l’un l’autre. Le show passe à une vitesse folle tant tous les titres se tiennent bien. Il y a plus de monde sur scène, deux guitaristes dont un épatant dans la maîtrise des mélodies, un bassiste et au milieu un batteur assez bluffant techniquement. Au chant, Kyle Schaefer impressionne de par son charisme mais aussi la puissance de sa voix death. Et sur les passages plus éthérés, il assure vraiment comme un chef. 

La setlist est plus orientée sur des pistes d’abord plutôt incisives et solides avant que des pistes plus récentes, où l’aspect progressif est plus marqué, ne prennent le relais. On voit bien l’évolution du groupe toujours plus ambitieux dans son death. Le concert passe très vite, la qualité est impériale, musicalement c’est un vrai bonheur et le public réagit très bien. J’ai parfois songé au récent passage live des très estimés Gorod avec un death travaillé, techniquement irréprochable, inventif, créatif et inspiré. Nous sommes ici dans un death propre, maîtrisé. Et là encore, très bonne sonorisation qui met bien en valeur le combo.

Epatant de musicalité, hyper créatif et cohérent, Fallujah a délivré un show remarquable, "agréable" à suivre, bien coriace mais inspiré et varié. Un sacré groupe que Fallujah, parfois un peu pompeux dans sa communication mais d’une grande valeur artistique. Bon courage aux maîtres de cérémonie pour passer après une telle tornade.

Setlist :

Ingested

Groupe à l’ouvrage depuis bientôt deux décennies, Ingested incarnait typiquement une formation qui servait de premières parties prestigieuses et qualitatives. Idem en festival où le groupe fait des prouesses mais sur des créneaux plutôt de début d’après-midi. Pourtant, la qualité est à l’œuvre mais le groupe évolue sur un registre assez brutal que je n’irai pas jusqu’à qualifier de « niche » mais à l'auditoire plus réduit. A force de travail, de disques de qualité, Ingested accède enfin au rang de tête d’affiche et joue le jeu. Les musiciens se donnent les moyens de leurs ambitions et c'est à saluer. Scène un minimum travaillée (bon deux panneaux sur les côtés en soi ce n'est pas grand chose mais nous sommes dans le death extrême, les moyens sont par définition plus réduits), entrée sur scène chorégraphiée avec une intro qui fait monter la sauce puis l’arrivée de musiciens qu’on sent impliqués. Sincèrement, Ingested fait le job. Le son est bon, l’interprétation impeccable, le groupe a désormais un excellent savoir-faire et fait très bien le taff. 

Le pit en a encore sous le pied même si l’accumulation de gros sons commence à user les corps et le groupe est très bien reçu. Ingested fait désormais partie des pointures du genre et c’est mérité. On sent que ça bosse dur et bien. Au final, une soirée certes un peu trop coriace pour moi mais réussi avec un Fallujah particulièrement inspiré, groupe de death parmi les intéressants qui soit.

Setlist :