En 1997, entre Metallica et son public, l’incompréhension est à son paroxysme. Tant vénéré avec son Black Album que critiqué pour la doublette Load – Reload, Metallica semble coincé entre des fans historiques purs et durs regrettant le thrash des années 80 et un nouvel auditoire plus ouvert à un heavy rock plus accessible dirons-nous. Le groupe refusait alors tout compromis. C’est qu’on parle de James Hetfield là, le mec que Bob Rock surnommait Mr Non lors des sessions du Black Album. Lars, aussi gouailleur que bon businessman, eut la très bonne idée de proposer au groupe de s’enfermer en studio et de revenir à ce bon vieil exercice des reprises qui leur avait déjà bien réussi. Metallica en avait toujours été friand et les fans se rappellent que c’est par un EP de reprises que Metallica avait introduit Jason Newsted après le tragique décès de Cliff Burton. D’autres reprises furent proposées en face B de divers singles et les objets valaient chers chez les collectionneurs / revendeurs.
Retournant en studio, toujours sous la houlette d’un Bob Rock devenu indispensable, sur une durée de onze journées, les Mets choisirent de proposer une nouvelle rafale de reprises et la sélection retenue suintait la tentative de synthèse entre les influences des débuts (Misfits, Discharge, Mercyful Fate) et les plus récentes (Nick Cave notamment). Je n’oublie pas de citer l’inévitable Black Sabbathet encore et toujours Diamond Head. Difficile pour les fans de se plaindre surtout vu la qualité des versions proposées ici entre les dévastatrices reprises de Discharge en ouverture et clôture de la galette, le medley très abouti et cohérent de Mercyful Fate ou encore une intelligente combinaison de titres du sabbath noir intégrant A National Acrobat à un Sabbra Cadabra réussi. Très fédératrice, la reprise de Thin Lizzy passe superbement bien dégageant un chouette feeling. La reprise Turn The Page, assez typique d’un rock US, renvoie aux aspects country déjà entrevus dans Load, preuve que les Mets ne regrettent rien. Même principe avec la reprise de Nick Cave. Il n’en demeure pas moins que ces onze titres le font vraiment bien, et la reprise de Lynyrd Skynyrd, enregistrée en studio de radio avec leurs potes (dont le génial Jerry Cantrell) est un régal. En rendant de tels hommages (et offrant au passage de belles royalties) à leurs groupes référence de jeunesse, les Mets ont mixé respect, générosité et très clairement rappelé qu’ils savaient y faire, et pas qu’un peu, en reprises tout en y apposant la touche Metallica.
Malin, le Lars a remis le logo historique, fait intégrer les différentes reprises proposées par le passé, dont le fameux EP alors introuvable, pour proposer l’exhaustivité des covers enregistrés alors par le groupe et là, c’est l’orgie. Oui, pour moi, le patron artistique du groupe était, est et restera Lars, force motrice de la formation. Entre des versions thrash des débuts à l’honneur des Misfits et Diamond Head, des reprises plus inattendues mais réussies (Queen), le Metallica old school est mis à l’honneur et les fans de cette époque sont ici plus que servis. Les quatre reprises de Motörhead jouées lors du cinquantième anniversaire de Lemmy sont au top et l’hommage rendu au parrain de la scène n’avait pas manqué de plaire à ce dernier.
Proposé alors que le groupe subissait la tempête, cette collection de reprises avait permis de calmer le jeu, de rappeler à un public décontenancé que les Mets savaient encore envoyer la sauce et de synthétiser adroitement les deux périodes du groupe entre thrash des années 80 et heavy des 90’s. Metallica ne reviendra que bien plus tard au jeu des reprises sur l’édition bonus de Hardwired... ce qui est une bonne chose tant l’exercice leur va bien. Avec le recul, ce Garage Inc. sera d’ailleurs la dernière sortie studio avant la crise existentielle qui touchera le groupe lors de la période « St Anger ». La suite est connue. Néanmoins, il me semblait important de rappeler que le Metallica de la deuxième moitié des années 90, en dépit d’un contexte de démythification et de nombreux malentendus (entretenus par des musiciens pas toujours évidents à cerner et franchement déconnectés du réel), avait fait de très bonnes choses, que ces types savent y faire. Quel p…. de groupe quand même, que les errances n’ont rendu que plus humain, aspect qui leur avait sans doute un peu manqué auparavant.
Tracklist de Garage Inc. :
CD1 01. Free Speech For The Dumb (Discharge) 02. It’s Electric (Diamond Head) 03. Sabbra Cadabra (Black Sabbath) 04. Turn The Page (Bob Seger) 05. Die, Die My Darling (Misfits) 06. Loverman (Nick Cave) 07. Mercyful Fate(Mercyful Fate) 08. Astronomy (Blue Oyster Cult) 09. Whiskey In the Jar (Thin Lizzy) 10. Tuesday’s Gone (Lynyrd Skynyrd) 11. The More I See (Discharge)
CD2
01. Helpless (Diamond Head) 02. The Small Hours (Holocaust) 03. The Wait (Killing Joke) 04. Crash Course In Brain Surgery (Budgie) 05. Last Caress / Green Hell (Misfits) 06. Am I Evil ? (Diamond Head) 07. Blitzkrieg (Blitzkrieg) 08. Breadfan (Budgie) 09. The Prince (Diamond Head) 10. Stone Cold Crazy (Queen) 11. So What (Anti-Nowhere League) 12. Killing Time (Sweet Savage)
Motörheadache :
13. Overkill (Motörhead) 14. Damage Case (Motörhead) 15. Stone Dead Forever (Motörhead) 16. Too Late Too Late (Motörhead)