Groupe:

Président association Festival 666

Date:

13 Aout 2023

Interviewer:

JeanMichHell

Interview Victor Pépin

Quelles sont tes premières impressions à chaud ? Nous sommes dimanche, ça fait deux jours et demi que ça tourne à plein régime. Les bénévoles, les artistes, toute ton équipe. Quelles sont tes premiers ressentis à chaud ?

A chaud, j'ai l'impression que tout va bien. Si on prend beaucoup de recul, nos artistes sont très très, très contents de l'accueil. On a même des groupes qui ne sont pas que des petits groupes, mais carrément des têtes d'affiche qui nous ont dit qu'ils n'avaient jamais aussi bien mangé et été aussi bien accueillis depuis quelques tournées. Ce sont des compliments qui font très plaisir à entendre. C'est bon pour la confiance aussi. On reste super bien évidemment. Du point de vue accueil artistes tout, tout va, tout va super bien. Les festivaliers, je les sens hyper motivés aussi, hyper souriants. Je ne sais pas ce que vous en pensez, mais moi j'ai trouvé qu'ils étaient vraiment content d'être là. Ça m'a un peu rappelé 2021 où les gens étaient tous fous à la sortie du Covid en 2021.

Il y a un vrai truc positif qui se dégage de cet endroit. Et ça, c'est dû forcément à l'accueil. Quand tu es reçu, dès l'entrée, c'est chaleureux, tu rentres à l'intérieur, tu vois les gens qui ont le sourire, qui ont envie. Cela fait vraiment partie des choses qui transpirent à travers de ce festival là. Et ce n'est pas pareil partout. Il existe une véritable bienveillance, qu'est ce qui fait que c'est un mot comme celui-ci qui ressort ?

Victor : Mais là, je trouve le public très très bien, vraiment à fond dans le projet et ça fait chaud au cœur. Les bénévoles sont aussi toujours très impliqués.

JMH : Il suffit de prendre le témoignage de Dog Eat Dog pendant son concert, les artistes comme les festivaliers se sentent bien ici. Il y a une petite ambiance cosy où on s'y plaît et on a envie d'y rester.

Vous avez pris soin du public, vous avez pris soin des invités, vous avez pris soin de tout le monde, je t'ai vu tourner sur le site avec ce que j'ai imaginé être le conseil municipal ou des membres des élus

Victor : Nous avons reçu les élus pour leur faire voir ce qu'est l'ambiance de ce festival, et ce pourquoi nous les sollicitons. Je prend également le temps d'aller voir des personnes qui peuvent être esseulées. C'est un état d'esprit qui nous anime.

Vous avez collectivement pris soin des festivaliers mais qui a pris soin de toi ? (rires)

C'est une famille qui m'entoure dans les bénévoles, des amis d'enfance (...) du coup quand les autres ont un coup de moins bien, on se soutient, on se fait un câlin et ça repart ! On s'occupe tous des uns et des autres, même si aujourd'hui nous avons un bénévole qui s'est coupé le doigt et qui a dû quitter le site, mais globalement nous sommes solidaires.

Vous avez construit une équipe à votre image, j'imagine que c'est là encore la réflexion collégiale ?

Victor: Comme j'aime à le dire en plaisantant, un peu la mafia, dans le sens où on rentre pas dans l'asso juste parce qu'on nous a fait un petit mail. On prend toujours, toujours, toujours soin de prendre contact avec le festivalier, on regarde comment est le feeling. Le bénévole qui nous rejoint est amené à avoir de plus en plus de responsabilités chaque année, dès lors qu'il a un petit peu d'ancienneté. Chez nous, on a un bénévole qui était tout nouveau en 2021 en crash barrière et aujourd'hui c'est notre responsable sécurité.

JC : Joël ! Un grand avec des tatouages, très costaud. On a discuté. (NDLR : Il faut dire que l'ami JC, en tant que photographe, passe du temps à proximité des gaillards de la sécurité) Il se promène avec son dossier bleu un peu partout je pense.

Victor : Ouais voilà, ce monsieur était tout nouveau dans l'asso en 2021 pour récupérer les slammeurs devant les concerts. Et voilà, il a continué à revenir aux réunions. On discute, on discute. On se rend compte que c'est un mec très sérieux et on lui a filé tout le dossier sécurité cette année. Donc encore une fois, c'est un peu la mafia dans le sens où on ne laisse pas rentrer n'importe qui. C'est un monsieur qui sait être rassurant, donc c'est parfait. C'est ce que nous attendons d'une personne comme lui, qu'il nous mette en sécurité.

On ne fait pas d'appel au bénévolat en public. Vous savez où tout le monde peut s'inscrire parce qu'on peut tomber comme partout sur des personnes avec un mauvais état d'esprit. Donc voilà, on fait ça entre nous.  On est à la base de tout, donc on connait nos équipes, on connaît les qualités et les défauts de chacun, on sait quand quelqu'un est au point de craquer. Donc voilà, on se connaît tous très bien et résultat on ne s'engueule jamais. Il n'y a jamais d'engueulades entre bénévoles, il n'y a pas de grève. On a tous une bonne raison pour que le festival se passe bien, parce que c'est à tous notre projet. (NDLR : Victor se rend compte de l'expression employée et provoque un éclat de rire généralisé)

Cela signifie que l'intégralité des personnes qui font la sécurité au crash barrière, ce sont des bénévoles ?

Oui c'est bien cela. Comme un peu partout, la sécurité de jour au bivouac ce sont nos bénévoles. On se rend compte qu'on est bien à le faire nous-même. On a des bénévoles qui aiment ça, alors tant mieux pour eux. Tant mieux pour nous, hein ?

JC : C'est ça qui est également très important. C'est ce côté bienveillant qui transparaît aussi au niveau de la sécurité. Ce qui fait que je pense que même un mec qui va être un peu pénible la face à ce genre d'attitude, il ne va pas en rajouter.

Victor : Mais c'est vrai que beaucoup de gens : "Ton public est très bienveillant, très très calme". Alors forcément, ça se fout sur la gueule dans les pogos, mais c'est très serein, pas nerveux quoi.

JC : Pour l'avoir vécu, avoir des services d'ordre très musclés, je dirais que c'est le terme utilisé des services d'ordre très musclé, cela fait que l'ambiance peut se ternir un peu.

Victor : C'est intéressant.

Et du coup, les professionnels que tu as, ce sont exclusivement ceux qui sont à l'entrée.

Victor : Nous respectons les obligations. Le seul endroit où nous n'avons pas le droit d'avoir des bénévoles, c'est à l'entrée du site, et même moi d'ailleurs, ça ne me rassurait pas de savoir que je mets un bénévole pour fouiller, ça ne me rassure pas. Il suffit que la personne soit peut être trop tendre ou trop strict, juste parce qu'il a envie de jouer au dur. Je préfère savoir que j'ai une équipe qualifiée.

Alors toi qui a fait l'affiche aujourd'hui des prestations, tu as vu ? Est ce qu'il y en a qui t'ont marqué plus que d'autres ? Est ce qu'il y en a que peut-être tu regrettes ? Peut-être pas jusque là, mais tu attendais peut-être autre chose quoi.

Sur la journée du vendredi, j'avais pris un petit temps pour aller voir Drop Dead Chaos côté façade et c'était la première fois que je les voyais en live et j'étais super content et je suis allé les voir après le concert et j'ai carrément lâché le mot : "Vous êtes trop stylé !" comme comme si j'étais un petit gamin. Et en fait, j'avais trouvé le show très bien. Mais moi j'ai vraiment adoré le show, les petits solos de guitare, ça me faisait bien plaisir. J'étais très content, très heureux devant leur concert. Et puis le samedi, incontestablement, Rise Of The North Star. D'ailleurs les copains de Drop Dead Chaos m'ont dit que c'était l'un des meilleurs concerts qu'ils avaient jamais vu de leur vie, c'était carré. Et pour Lionheart, je suis sorti tout fier de leur concert parce que j'étais content qu'il y ait encore beaucoup de monde devant la scène.

Et tu les avais tous vu en live, pour monter ton affiche ?

Non c'est compliqué surtout lorsque l'on parle de groupes internationaux. Bien évidemment, j'ai regardé des vidéos sur internet, donc je sais un peu à quoi m'attendre. La prestation live de Smash Hit Combo, c'était la première fois, c'est une véritable machine de combat, dantesque. Ils nous ont foutu un sacré bordel. Donc moi je suis content parce que c'est mon festival et j'ai des bonnes surprises moi même. (rires) Et là oui, effectivement il y a eu de très belles surprises !

Overdrivers, c'est aussi une très bonne surprise. C'est pareil, je les avais jamais vu, Je ne savais pas à quoi m'attendre sur leur entrée de scène parce que leurs intros, je la trouvais un peu longue deux morceaux d'AC/DC... Je me dis qu'est ce que ça va donner ? En fait, d'un coup, ils arrivent en courant et nous mettent dans l'ambiance direct. Un véritable show et du coup je suis resté pendant toute la durée.

Et aujourd'hui ?

Victor : Aujourd'hui, j'ai vu zéro concert.

Tu n'as vu personne ? Et t'attends qui particulièrement ?

Victor : Eeuuuuh, attends, je connais même plus ma prog.  Alestorm, ça fait longtemps que je les avais dans un coin de ma tête quand j'ai créé le festival. Donc effectivement, j'ai envie de les voir de mes propres yeux sur scène pour voir ce que ça donne enfin 0 Cercoux ! J'attends Landmvrks aussi, je les attends et c'est vraiment spectaculaire. Eux par contre, je les ai déjà vus une fois au Hellfest.

En début de journée sur la Warzone, j'y étais aussi.     

Victor : J'ai pris une sacrée claque ! Un groupe dont je suis très content de les avoir mis sur nos sens et Blackstorm, le groupe des gamins qui ont joué sur scène. Je suis un peu touché par leur démarche parce que c'est un groupe où les musiciens ont entre treize et dix-neuf ans, donc ça me rappelle un peu moi. J'ai créé mon festival à quinze ans, donc je me suis dit voilà, ça m'a fait penser un peu ça. Je trouvais que nos histoires étaient un peu concordantes, je me suis dit on va les mettre sur scène !

Quand tu parlais tout à l'heure des retours que tu avais des groupes, qui te disent que ça va. Ces groupes là vont parler de ce festival. Je sais que tu avais été eu un premier contact avec Phil Campbell qui s'était fait de manière spontané. Est ce que le fait d'avoir cette cette reconnaissance va mécaniquement faire grandir ton réseau ? Tu penses avoir des possibilités plus larges, voire même des sollicitations plus insistantes de groupe pour l'édition 2024 ?

Le premier exemple qu'on a eu, c'était lorsqu'on a accueilli Chris Slade en 2019, ancien batteur d'AC/DC, deux mois après le show, nous sommes au mois d'octobre 2019, je prépare l'édition 2020 qui allait être annulée. Je reçois un message sur Instagram de Phil Campbell qui demande à être programmé chez nous. Alors moi, je ne peux pas refuser une telle offre, j'accepte direct. Donc effectivement, ça veut dire que le mot tourne d'une part. Est ce que ça va m'ouvrir à de nouveaux horizons, de nouveaux bookers ou que sais je...?

Cette année, c'est un véritable test. C'est la première fois que nous avons des groupes internationaux sur scène et tout le monde le sait. Quand un festival veut grossir, je ne le cache pas, j'ai envie de faire grossir le festival. Tout le monde le sait. Quand un festival veut grossir, il faut mettre de l'international. Oui, là c'est notre toute première et on a déjà 20 % de groupes internationaux à l'affiche. Et si ça se passe mal, je sais très bien que l'année prochaine je serai de retour avec des plus hexagonaux. Les groupes internationaux, ils sont très exigeants. On ne plaisante pas avec eux. Cette année, j'ai vraiment dû me battre pour avoir des groupes sur mon affiche plutôt qu'à Alcatraz ou encore le Brutal Assault. Donc cette année, il fallait vraiment se battre pour convaincre l'agent de mettre son groupe à Cercoux plutôt qu'ailleurs.

C'est une première pour moi, cette forme de négociation, c'est un peu de la surenchère, quelque chose que je n'ai pas trop aimé, mais c'était très enrichissant. Donc je suis prêt pour l'année prochaine et a priori, là encore, super content de l'affiche à venir.

Tu penses que ça tient plus au lieu où en fait c'est la reconnaissance à l'international du festival qui joue ?  

Victor : Il y a plusieurs critères. Encore une fois, c'était la première fois que j'allais avoir un international chez moi, donc l'agent international ne me connaît pas. Donc moi, faut que je le convainque qu'il emmène son groupe ici, donc c'est pas toujours évident. En plus, il suffit de savoir que j'ai vingt et un an, et alors à la négociation ça refroidit encore plus le mec. Donc il faut trouver des arguments. C'est de la négociation, c'est sûr. Personnellement, j'ai trouvé ça très enrichissant, un peu difficile, mais voilà ça fait partie du jeu.

Quelle affluence pour cette année ?

Je n'ai pas le chiffre exact. Vendredi nous étions environ mille deux cents, on était autant que Mass Hysteria 2021, donc samedi environ mille quatre cents et aujourd'hui, comme c'est la journée la plus prometteuse, certains m'annoncent qu'on sera mille huit cents. Si c'est bien cela, aujourd'hui je les veux bien, mais pour l'instant je crois qu'on est plutôt à mille cinq cents, avec une capacité maximale à deux milles.

Tu parles de faire grandir le festival pour l'instant, c'est d'atteindre cette capacité là ?

Victor : Ben oui, en fait il ne faut pas aller trop vite. Si on commence à tabler sur une édition d'un coup, ça y est, on se lance. On va faire cinq mille personnes l'année prochaine . Il ne faut pas non plus commencer à voir trop gros, viser trop haut et se casser la gueule... Est ce qu'on peut faire ? Je le crois. Je pense qu'on peut mettre trois mille à trois mille cinq cents personnes en bas. En l'état actuel des choses, on ne peut pas mettre autant de personnes. Là on a déjà deux parkings pour différencier les pass trois jours et les pass un jour pour gagner de la place sur le pass trois jours. Donc pour l'instant, il y a une problématique où on commence à toucher les limites de sécurité en termes de capacité logistique. Pourtant l'espace concert on est ok, il y a de la place. Donc en fait ce sont des discussions avec la mairie, on essaye de trouver des solutions.

La mairie, et Mme le Maire, sont des véritables soutiens pour l'association, c'est un privilège, ce n'est pas le cas partout.

On est très reconnaissants, devant tous les efforts que met la commune pour nous accueillir. Je pense que c'est assez rare d'avoir une commune qui donne son école primaire, son école maternelle, sa cuisine pour un festival de Metal qui plus est, est organisé par des gamins. Elle nous aide vraiment beaucoup. Nous, ça tombe bien, on n'est vraiment pas désireux de partir de Cercoux. Donc tant qu'on peut trouver des solutions pour accueillir du monde à Cercoux, on fonce !

Un mot de conclusion ?

Merci encore pour les questions parce qu'encore une fois, je les ai trouvées très intéressantes et c'est toujours un plaisir de discuter avec vous. Je ne sais pas si c'est le genre de mot de conclusion qu'on donne à la fin d'une interview, mais bon.    

Peu importe. Mais en tout cas, je le prends de manière sincère. Je sais que ça l'est et ça fait plaisir.  

Victor : Et j'aime beaucoup votre interview donc ça me fait toujours plaisir d'y répondre.   

Merci. Je vais te renvoyer la balle parce que pour faire encore quelques interviews à droite à gauche, tu transpires l'image de ton festival. C'est-à dire qu'on sent que tu étais quelqu'un qui a envie de simplement partager le plaisir de la musique, tout ceci dans les meilleures conditions possibles pour tout le monde. Et quand je dis bien pour tout le monde, c'est pour tout le monde, la presse y compris. Ce n'est pas exclusivement le bien être des festivaliers. C'est très agréable parce qu'on voit qu'il y a de l'âme, il y a du cœur et ça ce n'est pas partout. Donc félicitations à toi et à ta super équipe.

Victor : Merci à toi. Il faut que chacun puisse se sentir bien à Cercoux, y compris vous c'est l'essentiel.

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