Revoilà enfin ce groupe de hardcore mélodique que j’apprécie tant. Leur concert m’avait profondément impressionné et ce punk hardcore très émotionnel dégage quelque chose de très puissant, très profond. Très californien aussi tant Touché Amoré incarne une certaine vision de Los Angeles notamment dans certains visuels avec un aspect pop-culture assez ancré dans l’image que je me fais de cette ville. Sans en avoir l’air, le dernier album Lament date de 2020 et la réédition de Is Survived By a certes permis de reparler du groupe mais on attendait du nouveau matériel. Nous y sommes.

Touché Amoré c’est encore et toujours ce punk en apparence très léger sur le plan instrumental avec un vrai recours aux mélodies. Et puis il y a cette voix éraillée suintant une souffrance, un cri. Et ainsi, par les vocalises de Jeremy Bolm, on se rend compte que les mélodies des guitares de Clayton Stevens et Nick Steinhardt expriment une mélancolie, un ciel voilé. Le contraste entre cette dimension très ensoleillée et cette écorchure donne un cachet incroyable à la musique du groupe, une réelle profondeur, presque quelque chose d’existentiel. Le titre Hal Ashby permettra, je l’espère, de mieux exprimer mon point de vue. 

Pour le dire autrement, Touché Amoré peut faire penser à un Green Day mais avec une plus grande densité, une épaisseur. Une autre Californie en somme, plus âpre, moins superficielle. Le groupe a aussi un réel sens du refrain et parvient à une formule très personnelle et toujours aussi attachante. On sent malgré tout une volonté d’aller parfois vers une dimension qu’on qualifiera de plus mainstream ce qui n’est pas un reproche ici. Juste, quelques titres poursuivent la voie tracée par le morceau Reminders sur le précédent disque. La section rythmique assure le job et le binôme Tyler Kirby (basse) - Elliot Babin (batterie) continue de bien assurer. Le riff d’ouverture de Nobody’s emporte directement dans l’univers Touché Amoré. Un esprit alternatif règne ici et toujours cette profondeur. Mais le groupe sait toujours appuyer sur l’accélérateur comme le démontre la très punchy Disasters, enlevée comme il faut. On y retrouve l’implacable dynamisme rythmique d’Elliot Babin dont le visage fait toujours penser à Juan Branco. Encore sur ce titre, arrivé aux 2 minutes, une petite mélodie douce-amère de guitare nous prend aux tripes pour un final en état de grâce. J’y reviens, les mélodies de guitares font merveille ici et tirent vraiment leur épingle du jeu sur ce nouvel album. 

Je dois pourtant confesser que le groupe peut moins me toucher comme sur la ballade Force Of Habit où il ne se passe pas grand-chose pour ne pas dire rien. Le vocaliste semble s’y confier mais on passe un peu à côté. Heureusement Mezzanine et Altitude remettent la marche avant avec encore des guitares incisives et inspirées sur la seconde nommée. Sans s’en rendre compte, nous voici déjà parvenus au dernier tiers de ce disque et pas le temps de se poser que This Routine est déjà reparti. Finalist est bien percutante avec encore un refrain bien catchy. J’aime bien le titre final Goodbye For Now parfait pour clôturer un album (en plus d’être une bonne chanson, ce qui reste l’essentiel).  

Dans son style toujours aussi marqué, Touché Amoré nous envoie un très bon disque, très cohérent hormis cette ballade manquée à mon sens. Le groupe reviendra sur nos routes en janvier et février prochain (Biarritz, Lyon et Paris au programme, les veinards ! ) même si le groupe risque de ne pas aimer la météo hivernale comparativement à l’éternel soleil californien. Un groupe de hardcore un peu décalé ne misant pas tout sur la violence et l’agressivité mais sur une mélodicité et une émotivité très marquante permise par un chanteur à fleur de peau dont la capacité à transmettre ses émotions est franchement épatante et en fait un des frontman les plus marquants (et attachants) d’un genre qui n’en manque pas. Et comme la musique produite suit très bien, on tient définitivement là un excellent groupe. Un hardcore / punk post-wave haut de gamme.