Et de douze ! Oui, certains disent "treize" mais, personnellement, je ne compte pas First Strike Still Deadly comme un "vrai" album du groupe (vu qu'il ne proposait que des réenregistrements de vieux classiques). Les vétérans californiens de la fameuse Bay Area sont de retour et, encore une fois, ils ont bien respecté la cadence adoptée depuis The Formation Of Damnation (paru en 2008), à savoir un nouvel album studio tous les quatre ans. On ne change pas une équipe qui gagne, paraît-il... le line-up n'a donc pas bougé depuis la dernière fois (si je ne dis pas de bétise, exactement la même formation deux fois de suite - sur un album studio - ça n'était pas arrivé depuis le début des 90s). Et l'on retrouve aussi Juan Urteagua au poste de producteur ainsi que le fameux Andy Sneap au mixage.

Ce n'est un secret pour personne, j'aime Testament. Je suis donc évidemment content de les retrouver. Cependant, depuis 2008, je trouve que le combo aligne les bons albums mais je ne prends pas d'énormes claques comme celles qu'une poignée de vieux classiques (les deux premiers opus) ou albums des années 90 moins populaires (Low et The Gathering pour ne pas les citer) ont pu m'administrer. Et cette fois-ci alors ? C'est encore du beau travail... sans que mon cœur ne chavire totalement non plus. Qu'y a-t-il au menu sur ce Titans Of Creation ? Globalement à peu près tout ce dont Testament est capable. On a le sentiment que le groupe a voulu faire plaisir à tous ses fans en allant piocher dans quasiment tous les styles qu'il a pu aborder depuis ses débuts. Cela donne tout de même quelque chose d'assez homogène car même si Testament a su légèrement évoluer et enrichir son thrash de quelques éléments différents au fil du temps (parfois plus heavy et mélodiques, d'autres fois nettement plus agressifs et proches du death metal par exemple), il n'a pas vraiment proposé (ou très rarement et pas depuis longtemps en tout cas) des albums qui se situent, stylistiquement parlant, à des années lumières les uns des autres. Ainsi Titans Of Creation est globalement dans la lignée des trois disques sortis avant lui, avec quelques petites variantes. 

Niveau son, pas de grosse évolution. On retrouve la même prod que sur Brotherhood Of The Snake, moderne (qui ne plaira donc pas forcément à tout le monde) et écrasante, avec de belles guitares tranchantes, une batterie massive (mais dont on entend bien tous les éléments, notamment les cymbales) et une basse encore plus présente dans le mix. Ca n'a pas le charme et le dynamisme de certaines productions à l'ancienne mais le rendu est très puissant pour ne pas dire énorme.

Les points forts de Titans Of Creations ? Il montre un groupe très énergique. Malgré le poids des ans, le thrash de Testament ne perd pas de sa fougue. On reconnaît sa patte et le chant de Chuck Billy est toujours convaincant. La puissance est donc encore au rendez-vous. Niveau écriture, le groupe se montre également en forme et sait toujours livrer des compos efficaces. En plus, contrairement à pas mal d'albums qui s'essoufflent et mettent leurs meilleurs titres au début pour finir sur des pistes moins marquantes (c'était un peu le cas de Dark Roots Of Earth), Titans a tendance à progresser en cours de route et garde, d'après moi, ses missiles les plus percutants pour la fin. Ca commence avec du thrash très classique à la rythmique galopante (Children Of The Next Level, efficace mais sans folie... et qui manque d'un refrain fort), continue avec un WWIII plus concis et incisif et se poursuit avec davantage de mélodie sur Dream Deceiver, l'un des titres les plus marquants de ce nouvel effort (et qui aurait fait un super single). Ensuite, Night Of The Witch amène plus de noirceur dans le propos (on entend Peterson balancer quelques vocalises black) puis City Of Angels calme (relativement) le jeu avec un tempo plus posé, un style heavy et quelques lignes de chant planantes. On remarquera d'ailleurs que Billy module bien sur cet album. Il montre tout ce qu'il sait faire (heavy, thrash, death... il y en aura pour tout le monde). Bien sûr, les fans de Skolnick se régaleront une nouvelle fois avec des solos bien tricotés. Puisqu'on parle guitare, les leads proposés sur Ishtars Gate sortent un peu de ce que Testament a l'habitude de proposer, c'est sympa (tout comme l'ambiance orientale créée pour l'occasion). Enfin, après Symptoms que je trouve un peu trop répétitive, c'est le festival du thrash qui tache : False Prophet écrase tout sur son passage et le quintet propose deux des meilleures compos de ce cru 2020 sur la fin avec l'excellente Code Of Hammurabi (la basse de DiGiorgio est magnifiée) et l'imparable Curse Of Osiris, sans doute la piste la plus vindicative ici, avec du speed, du blast et du Peterson qui nous refait un peu de chant black metal par endroits. Ca tabasse ! 

Cependant, Testament a peut-être eu les yeux plus gros que le ventre cette fois-ci. Les albums précédents tournaient plus autour de quarante-cinq (ou cinquante) minutes max. Là, avec douze pistes (dont trois dépassent six minutes) pour presque une heure de musique, on sent bien quelques petites longueurs. Et quelle drôle d'idée d'avoir conclu avec Catacombs, un court instrumental épique (avec claviers et chœurs) de deux minutes qui surprend tant il n'a pas grand-chose à voir avec ce qui a précédé ! Ce n'est vraiment pas grave, plus anecdotique qu'autre chose, mais ferme le rideau avec un petit effet "cheveu sur la soupe" bizarre (alors que le rageur Curse Of Osiris était - à mon avis - une conclusion impeccable). Au final, Titans Of Creation est un disque solide, comme tous les albums sortis depuis le retour de Skolnick. Mais justement, il lui manque encore ce petit plus (la touche de folie ou de magie...) qui lui permettrait d'être qualifié d'excellent. Du beau boulot quand même... qui inscrit Testament comme l'un des groupes les plus constants du genre. Car même si je pinaille un peu et peine donc à totalement m'extasier sur ses récentes livraisons (dont celle-ci), je reconnais que le combo enchaîne les productions de qualité (avec à chaque fois quelques bonnes petites bombes à se mettre sous la dent) et fait ainsi tout de même meilleure figure que pas mal de ses compatriotes. Si vous avez aimé ce que les Californiens ont produit ces douze dernières années et ne vous attendez pas à un disque extraordinaire qui bouleverse les codes, cet opus saura certainement encore une fois vous convaincre. Dommage tout de même que le groupe peine à sortir de sa zone de confort et aligne des albums, certes, bien fichus mais sans grande audace. 

Tracklist de Titans Of Creation :

01. Children Of The Next Level
02. WWIII
03. Dream Deceiver
04. Night Of The Witch
05. City Of Angels
06. Ishtars Gate
07. Symptoms
08. False Prophet
09. The Healers
10. Code Of Hammurabi
11. Curse Of Osiris
12. Catacombs