En 2016, Fragments Of Creation, le premier album des Grecs de Sunburst fut une bonne petite découverte. Du power prog de qualité, puissant et technique, servis par des musiciens impressionnants (Gus Drax, notamment, n’est clairement pas un guitariste manchot) et un chanteur, Vasilis Georgiou, rappelant très fortement un certain Roy Khan (Conception, Kamelot). Une suite était donc souhaitable, attendue même... mais il lui aura fallu huit ans (!) pour enfin voir le jour (on pourrait faire preuve d’une légère indulgence en se rappelant que le vocaliste et le guitariste officient également dans Black Fate qui a sorti son dernier opus en 2020). Mieux vaut tard que jamais en tout cas...

Sunburst se présente donc aujourd’hui avec un line-up inchangé (comptez donc le bassiste Nick Grey et le batteur Kostas Milonas en plus du duo cité plus haut) et une formule qui a un peu évolué. Les premières secondes de Manifesto mettent tout de suite en avant le changement opéré. Alors que Fragments Of Creation démarrait avec Out Of This World, un titre rentre-dedans, rapide, à mi-chemin entre Nevermore et Symphony X, The Flood propose cette fois-ci une introduction plus calme, mélodique et progressive et, quand le titre démarre réellement, un souffle plus symphonique (avec orchestrations à l’appui) et épique est décelable. La rythmique reste robuste, la technique ne s’est pas fait la malle non plus... mais le propos se veut plus dramatique et grandiose. D’ailleurs, le dossier de presse présente Sunburst comme un groupe de "Cinematic Progressive Metal", ce qui n’était pas le cas en 2016. J’en vois déjà certains parmi vous qui s’apprêtent à quitter la salle, attendez un instant, les Grecs n’ont pas abandonné le côté heavy de leur musique. D’ailleurs, en deuxième position, comme pour rassurer le fan de la première heure, ils balancent Hollow Lies, un titre dont l’intro rapide et percutante, avec riff hargneux et batterie excitée, fait clairement secouer la tête. Très bon morceau ! Et Samaritan, en troisième position, ne vient pas gâcher la sauce. C’est une compo enlevée, bien groovy, entraînante dont le riff principal et l’allure générale me font penser à ce qu’on peut entendre chez les Italiens de DGM. 

Retour à un tempo plus posé (mid) avec Perpetual Descent. L’atmosphère reste très travaillée et parlera aux amateurs de power prog européen (comme Conception ou Seventh Wonder) avec une certaine mélancolie couplée à d’accrocheuses mélodies. Instrumentalement, malgré l’étiquette progressive, cela reste très facile d’accès, pas trop complexe (mais remarquablement joué... les riffs et solos de Drax sont un régal pour les oreilles, et, pour ne rien gâcher, le son de l’album est impeccable). A mon sens, il manque à la deuxième moitié de l’album des titres un peu plus énervés (comme Hollow Lies). Cependant, les compos présentées sont loin d’être mauvaises... mais elles ont - à mon sens - un peu de difficulté à bien se démarquer les unes des autres. Le niveau reste tout de même plus qu’honorable. Il est même franchement haut sur la fin du disque avec la chanson titre ou la très belle conclusion Nocturne qui renoue avec les orchestrations et la nature épique de la première piste. Je pense que tout amateur des groupes cités plus haut dans cette chronique (et quelques autres comme Borealis ou Triosphere) devraient jeter une oreille attentive à Sunburst, ils y trouveront de quoi satisfaire leur appétit.

Manifesto est donc le digne successeur de Fragments Of Creation et confirme tout le bien que j’avais pensé de Sunburst à sa découverte. Certes, il est moins remuant que son prédécesseur et il m’a fallu plus d’écoutes pour bien rentrer dedans (Fragments m’avait semblé plus immédiat, plus catchy, avec quelques refrains plus marquants d’entrée de jeu)... mais le jeu en vaut la chandelle car, au final, c’est un bel album (soigné, classe, virtuose...) qui nous est présenté. On n’ira pas jusqu’à dire que c’est du jamais entendu... la partition n’est pas nécessairement novatrice (et puis, il y a aussi ce chant qui est un atout, car chanter comme Roy Khan n’est pas la pire chose qui puisse arriver quand on est vocaliste... mais qui, logiquement, contribue aussi au léger manque de personnalité de l’entreprise) mais elle est sacrément bien exécutée par des musiciens qui forcent l’admiration (et qui, en plus, ont eu la bonne idée de ne pas décalquer leur premier opus). L’essai est confirmé, Sunburst est un groupe à suivre et j’ai hâte de le croiser sur la route. Espérons qu’il ne faille pas attendre huit ans pour la suite de ses aventures...

Tracklist de Manifesto :

01. The Flood
02. Hollow Lies
03. Samaritan
04. Perpetual Descent
05. Inimicus Intus
06. From The Cradle To The Grave
07. Manifesto
08. Nocturne