Soilwork n’est pas un groupe qui a tendance
à trop se reposer sur ses lauriers. Non, Björn Strid et ses acolytes ont
encore des choses à dire et ce douzième opus intitulé Övergivenheten
(copieux, avec ses quatorze pistes et sa durée de soixante-cinq minutes) en est la parfaite
démonstration. Je ne vais pas tout spoiler dès les premières lignes mais vais
peut-être quand même faire gagner du temps à certains : si vous n’avez pas
accroché aux récents Verkligheten et A Whisp Of The Atlantic (qui m’ont
particulièrement convaincu), il ne sera peut-être pas évident pour vous
d’être charmé par ce nouvel effort tant il s’inscrit clairement dans leur
lignée. Si, en revanche, comme moi, vous avez été sensible à
l’évolution du groupe sur ses derniers efforts, vous risquez de vous régaler
!
Si l’on est tenté de comparer ce nouvel album à
Verkligheten, ce n’est pas pour rien. Le titre en suédois déjà. Un
artwork assez original et surprenant aussi. Le fait qu’il démarre sur une intro nous
invitant au voyage également… Le début de la chanson titre, avec ses guitares
sèches, son banjo et ses chœurs, nous transporte dans une sorte de western cosmique avant
que l’électricité ne s’invite sur une piste rapide et épique dans la
plus pure tradition soilworkienne. Le refrain est énorme, Strid
n’a rien perdu de son sens de la mélodie, bien au contraire. Ca commence bien ! Et
Övergivenheten va, comme ses prédécesseurs, jouer sur la notion de
contraste. Dès le deuxième titre, Nous Sommes La Guerre, avec sa voix
féminine en intro, son synthé bien 80s, son chant clair enjôleur, on sent bien que
le groupe n’a pas l’intention de se cantonner à un seul style musical. Certains
diront que Soilwork est influencé par l’autre groupe
de Strid et du guitariste David Andersson : The Night Flight Orchestra. Peut-être, mais
avec une touche plus sombre, inquiétante et progressive alors (la partie de batterie, notamment,
n’a rien à voir avec du NFO... on dira la même chose des solos de
guitares). Je n’ai pas adoré ce morceau à la première écoute mais
depuis quelques jours, mon avis a évolué et son refrain hypnotique ne sort plus de ma
tête.
Pour la suite, ce sera une alternance de morceaux décoiffants
(Electric Again, Is It In Your Darkness et ses blasts ahurissants, Vultures,
This Godless Universe…), et de pistes plus mélodiques qui n’ont
d’ailleurs parfois plus rien à voir avec le death mélodique (Valleys Of
Gloam, le charmant instrumental piano / guitare mélancolique Morgongåva /
Stormfågel, l’entêtant Death, I Hear You Calling…). Le chant
est à l’avenant, Björn se plaît à explorer pleinement sa
palette… il ne se refuse rien et sa performance, quel que soit le style abordé, est
globalement bluffante. On ne le découvre pas aujourd’hui mais Övergivenheten
est l’occasion de se remémorer à quel point il est devenu l’un des meilleurs
vocalistes de metal actuel. On l’entend même tenter de nouvelles choses ici, comme ce chant
clair particulièrement aigu sur certains refrains (This Godless Universe, morceau
hallucinant soit dit en passant, ultra véloce avec un riffing extrême soutenu par un violon
inattendu). Ce qui est fort avec Soilwork, c’est cette façon
d’allier technique (le niveau est exceptionnel, la batterie, par exemple, toujours tenue par
Bastian Thusgaard, nous en met plein les oreilles, écoutez l’intro de
Dreams Of Nowhere, vous m’en direz des nouvelles), froideur et mélodies plus
chaleureuses… avec des ambiances travaillées et un feeling indéniable (notamment au
niveau des guitares). En plus, le groupe ne se prive pas de coller un passage de violon par-ci, un peu
de piano par-là, quelques mots en français aussi… Bref,
Övergivenheten, comme ses récents prédécesseurs, va où il veut
et n’hésite pas à sortir des sentiers battus, transmet des émotions
variées tout en gardant une jolie cohérence. En revanche, Verkligheten et A
Whisp Of The Atlantic étaient plus concis et donc plus "faciles" à assimiler.
Personnellement, je n’en tiendrai pas rigueur au groupe tant sa musique est foisonnante et
enthousiasmante.
En résumé, voilà un album riche et varié,
tantôt rageur et sombre, parfois mélancolique, doux ou léger voire lumineux...
encore un peu plus mélodique que précédemment et avec beaucoup d’excellents
titres (certains pourraient même être qualifiés de tubes) à son actif. Une
belle continuité de l’œuvre de Soilwork, groupe qui ne cesse
d’évoluer et proposer des albums travaillés et intéressants. S’il y a
eu un moment où j’ai pu douter de l’excellence et - par conséquent - du
devenir de ces Suédois, il est clair (depuis un bon moment déjà) que cette
période "creuse" n’est vraiment plus qu’un lointain souvenir tant ils sont
aujourd’hui à classer en très bonne place parmi les combos les plus brillants du
style (plus difficile à cerner, je vous l’accorde) dans lequel ils évoluent.
Tracklist de
Övergivenheten :
01. Övergivenheten 02. Nous Sommes La
Guerre 03. Electric Again 04. Valleys Of Gloam 05. Is It In
Your Darkness 06. Vultures 07. Morgongåva /
Stormfågel 08. Death, I Hear You Calling 09. This Godless
Universe 10. Dreams Of Nowhere 11. The Everlasting Flame 12.
Golgata 13. Harvest Spine 14. On The Wings Of A Goddess Through Flaming
Sheets Of Rain