Joel Hoekstra (guitariste américain chez Whitesnake et Trans-Siberian Orchestra) revient
avec un deuxième album sorti sous le patronyme Joel Hoekstra’s 13. Et franchement, pourquoi
pas. Le premier essai, Dying To Live, sans bouleverser le paysage musical de ce
siècle, était plutôt une bonne surprise... surtout pour une sortie Frontiers, label
qui multiplie les projets et "super groupes" - pas tous intéressants, loin de là - comme
Nicolas Cage multiplie les films que vous ne regardez plus (oui, c’est gratuit).
Le menu est à peu près le même que la dernière fois : onze pistes qui
traversent des territoires hard rock tradi avec quelques touches heavy ici ou là. On retrouve
d’ailleurs les mêmes musiciens : une section rythmique qui ne fait pas semblant
assurée par Vinny Appice (batterie) et Tony Franklin (basse),
un claviériste agile (Derek Sherinian), et deux vocalistes de
compétition, Russell Allen et Jeff Scott Soto. Par contre,
petit changement : alors que les deux chanteurs se partageaient équitablement les pistes sur
Dying To Live, c’est Russell qui se retrouve sur tous les morceaux,
Jeff n’étant là que pour assurer quelques chœurs. Dommage.
Des contraintes d’emploi du temps, j’imagine...
On ne va pas tourner autour du pot, Running Games est globalement dans la lignée de son
prédécesseur et possède les mêmes qualités d’écriture,
d’interprétation et de production. Alors oui, vous ne ressortirez pas de
l’expérience sens dessus dessous. Pour le grand bouleversement, l’exceptionnel, la
découverte de quelque chose de singulier, veuillez vous adresser ailleurs. On sait exactement
où l’on met les pieds, il n’y a pas de grosses surprises à se mettre sous les
dents... mais, du coup, pas de mauvaises surprises non plus. L’efficacité dans la
composition et le talent des convives rassemblés pour l’occasion font que le moment
passé en leur compagnie est très agréable.
L’aventure débute avec du hard rock puissant aux influences heavy metal marquées.
En effet, difficile de ne pas penser à Dio (et notamment au morceau Don’t Talk To
Strangers) à l’écoute du riff et du couplet de Finish Line. Faut-il
préciser (peut-être pour ceux qui ne connaitraient pas encore le monsieur) que
Russell Allen est un des meilleurs vocalistes du genre et que, par conséquent,
son interprétation y est pour beaucoup quand il s’agit d’évoquer
l’efficacité du morceau ? On le dit une fois maintenant et on retient que ce commentaire
restera valable pour les dix autres pistes de l’album. Comme ça, c’est fait. Sur les
chansons suivantes, le ton se fait un peu plus léger même si le dynamisme demeure. Ainsi,
I’m Gonna Lose It et Hard To Say Goodbye proposent du bon hard mélodique
aux refrains aguicheurs bien troussés. Et, l’air de rien, Hoekstra, sans
s’accaparer la couverture, nous rappelle qu’il n’a pas été engagé
chez Whitesnake par hasard, ses petits solos sont d’une fluidité
remarquable, bien écrits avec ce qu’il faut de technique pour séduire ceux que
ça intéresse sans sombrer dans la démonstration stérile non plus (un soin
important est accordé à la mélodie de façon
générale).
How Do You ralentit davantage le tempo et privilégie
l’émotion en flirtant (avec succès) avec l’exercice de la ballade, tout en
conservant une certaine puissance. Les mélodies sont prenantes et Allen est
impérial (mince, j’avais promis que je ne me répéterais pas). Sur Heart
Attack et Fantasy, on reste en terre hard rock mid-tempo mais volubile. C’est bien
fait mais toujours très classique et, petit à petit, je sens que je me passionne un peu
moins pour le disque... Heureusement, le refrain imparable de la plus FM Lonely Days, le
caractère sombre et changeant de Cried Enough For You ainsi que le retour d’un
propos plus musclé avec la heavy Take What’s Mine me font rester jusqu’au
bout. Et puis, il y a la chanson titre qui clôt cet album en proposant quelque chose de
différent : c’est une plage douce, acoustique, avec percussions, violons et chœurs
féminins. Sympa et apaisante.
Un petit détail qui fait la différence est à noter, en
rapport avec certaines sorties du label Frontiers dont je parlais en introduction (auxquelles ont peut
parfois reprocher de trop se ressembler) : tout est écrit et produit par
Hoekstra lui-même. Il ne s’agit pas d’une commande du big boss qui
aurait mandaté ses sbires habituels pour l’occasion (Mularone, Del
Vecchio, Karlsson...). C’est un peu ce qui permet à ce
Running Games, malgré son indéniable classicisme, de sortir du lot.
Personnellement, j’aimais bien la variété dont bénéficiait le premier
opus (pas totalement absente de cette suite, cela dit) renforcée par la présence de deux
chanteurs différents. Là, objectivement, c’est toujours du travail de qualité
mais je suis un (tout petit) peu moins conquis... ce qui ne m’empêchera aucunement de
conseiller aux amoureux de bon hard rock classique de jeter une oreille attentive à cette
galette.
Tracklist de Running Games :
01. Finish Line 02. I’m Gonna Lose
It 03. Hard To Say Goodbye 04. How Do You 05. Heart
Attack 06. Fantasy 07. Lonely Days 08. Reach The
Sky 09. Cried Enough For You 10. Take What’s Mine 11.
Running Games