“What is real? How do you define real? If you're talking about what you can feel, what you can smell,
what you can taste and see, then real is simply electrical signals interpreted by your brain. (…) Welcome to the real world.”

C’est avec ce sample bien connu des amateurs de Matrix, que débute l’EP d’Eyeless When Shadows Seduce. Ce petit bijou de cinq titres fait preuve d’une rare énergie mais également d’une certaine forme d’ouverture d’esprit. Explication…

Pour vous poser le décor de base, le groupe oscille entre un hardcore loin d’être linéaire et passe de temps en temps la frontière vers des contrées plus Death, et touche même au Hip Hop. L’ensemble est brutal, rugueux, mais globalement le groupe maîtrise son propos. Mais ce qui fait la force de cet EP, c’est sa diversité ; bon ok, on ne va pas rendre visite à Oasis non plus, mais au niveau des guitaristes, les riffs sont assez peu répétés. Ici, on fait bouger les riffs, on le fait gentiment évoluer pour ne jamais le rendre redondant. Le tout accompagné de ponts déstabilisants, avec une mention spéciale au bassiste qui, par-ci, par-là, nous place un slap en rupture avec le reste et fait respirer les titres.

Les autres musiciens sont loin d’être à la ramasse niveau technique et feeling. Le batteur est celui qui tient la baraque, sa prestation est énorme, il envoie une pulse assassine tout le long. Ses roulements sur les tomes sont remarquables et sa facilité d’exécution est vraiment impressionnante et son jeu varié. Mais celui qui démonte la baraque, c’est le chanteur qui passe allègrement d’un chant hardcore à des growls death qui pourraient faire rougir des chanteurs spécialistes du genre. La production, vraiment énorme pour une autoproduction en 2002, rend hommage à chaque membre et met l’ensemble en valeur.

Et pour conclure cette bien belle galette, Missing Sky, un de ces morceaux entre potes, qui ne sont pas toujours des réussites ; mais là, c’est la fête à la maison. Entre les rappeurs français du Cercle Makabre, leurs voix gutturales collent bien à l’ambiance générale et la musique proposée par le groupe se veut un peu plus groovy pour leur permettre de poser aisément leur flow. Comme pour la place faite à Reuno de Lofofora qui vient poser dans un registre plus violent que ce qu’il pouvait faire à ce moment avec Le Fond Et La Forme.

Le spectre que propose ici Eyeless aura été le plus large de sa carrière. Ensuite, ils auront tendance à standardiser leur musique qui, malgré une certaine efficacité, me fera tout de même regretter le temps béni de cet EP.

Tracklist de When Shadows Seduce :

01. King Of Serpents
02. Skinless Pride
03. Force Fed
04. My Own Fate
05. Missing Sky