Groupe:

Gojira + Zeal & Ardor + Alien Weaponry + Employed To Serve

Date:

10 Juillet 2022

Lieu:

Albi

Chroniqueur:

ced12

Peu connue pour sa scène Metal, la ville d’Albi nous accueille dans un environnement des plus sympathiques. Le festival Pause Guitare, deux décennies au compteur, habitué des affiches familiales et très accessibles, se paie sa première journée Metal. L’organisateur, à force de fréquenter le Hellfest dans le cadre d’échanges entre organisateurs, rêvait de se faire une journée dédiée au Metal. C’est chose faite en 2022 avec la venue d’une affiche haut de gamme. Pour bien comprendre le décalage, ce sont Clara Luciani, Julien Doré outre M qui assurent le leadership de cette édition. Je ne résiste pas à citer un rappeur (dont j'ai oublié le nom) qui devait jouer mais qui a annulé pour cause de grève d’avion à l’aéroport de Lisbonne. On se demande bien ce qu’il faisait là-bas alors qu’il devait jouer le soir sur Albi. Vraiment pas professionnel, ersatz d’un ancien modèle « star » étrange quand on voit l’ultra-professionnalisation en tous points des festivals. Désormais très bien rôdée, l’organisation est à ce titre absolument remarquable. Parkings bien indiqués, bénévoles bienveillants, site très fonctionnel et chaleureux (avec au loin la massive cathédrale récemment élue plus belle de France ce qui, vu la « concurrence », n’est pas une petite performance !). Je retrouve l’ambiance festival, ce système cashless parfaitement au point, cette première zone en retrait dédiée à la restauration (assez locale). Le grand parterre qu’on atteint après un petit talus impressionne. Large, massif, avec tribune au fond et loges sur les côtés, la grande scène est splendide. Paramétré pour pouvoir accueillir jusqu’à 17 000 personnes, le parterre paraît un peu disproportionné pour l’affiche du jour ; mais si cela n’a naturellement pas convenu à l’organisateur, quel plaisir pour nous autres. Un site où on peut circuler aisément, sans se faire bousculer, des accès aux bars hyper fluides, des toilettes accessibles, ça fait un bien fou !! Les concerts ne commençant qu’à 18h30, je profite du show aussi magnifique qu’inutile de Pinot sur le Tour de France où une certaine idée du romantisme n’est pas morte, merci à lui pour ces numéros en montagne.

Employed To Serve

 On retrouve l’affiche que proposera Gojira début 2023 sur sa tournée (qui pour mémoire fut repoussée début 2022) avec les post-hardcoreux d’Employed To Serve. J’avais gardé un bon souvenir de leur show à la Boule Noire. Bien moins intimiste, leur prestation en festival est tout aussi percutante. Il fait bien chaud sur le site (34° annoncés encore sous les coups de 18h) mais le public répond présent et la demi-heure passe très bien. Bien aidé par un guitariste très présent scéniquement, la chanteuse Justine Jones dégage de très bonnes vibes, occupe bien sa scène. Les Anglais ont du mérite car eux aussi prennent la chaleur en pleine face. Ça cogne dur à tous points de vue mais ça riffe bien, c’est entraînant. Je recroise quelques têtes aperçues au dernier concert de Terror à Toulouse. La transition est donc bien assurée, Employed To Serve a fait le job et le public, réceptif, le leur a bien rendu. Un démarrage sur de très bonnes bases.

Alien Weaponry

Eux, je le adore. Découvert en festival en 2018, j’y avais vu un groupe à très gros potentiel. Leur second disque, malgré un son parfois imprécis, m’avait conquis. Je les retrouve donc avec plaisir en live. Pour tout dire, ils sont la raison première de ma venue sur les rives du Tarn. Et je ne vais pas être déçu. Je les avais trouvés très bons en club. En festival, c’est encore un cran au-dessus. L’arrivée du batteur sur fonds de haka fait toujours son effet, d’autant plus que nous sommes ici sur une terre de rugby, c’est donc parfaitement adapté. Le son de la guitare est bluffant de clarté et de puissance, ça tape dur derrière. Le nouveau bassiste a une sacrée présence avec un beau tatouage maori sur le visage (où on espère quand même pour lui que c’est un faux !). La demi-heure passe à une vitesse folle, le public est déchaîné, circle-pit et pogos s’enchaînent dans une joie communicative. Les riffs des Néo-Zélandais sont monstrueux d’efficacité (Holding My Breath démente !!), les têtes bougent, c’est impérial.

La durée du concert (trente minutes) sera mon seul grief de cette journée, par ailleurs excellente. J’en aurais repris le double à l’aise tant le groupe a assuré. Et je suis certain que la fosse entière partagera mon ressenti. Non vraiment, l’organisateur aurait pu leur donner un peu plus de temps quitte à avancer le début des shows. Le concert aura été excellent, la scène très bien arpentée, le guitariste et le bassiste n’hésitant pas à bien occuper l’espace avec deux passages remarquées devant la fosse. Alien Weaponry est pour moi le meilleur groupe de la jeune génération, a minima mon préféré en tout état de cause. Génial !

Zeal & Ardor

Autre ambiance avec les Suisses de Zeal & Ardor et leur metal barré entre passages black metal, ambiances negro-spiritual (registre à l’origine du gospel). Il m’a fallu un bon quart d’heure pour bien rentrer dans leur show où les trois chanteurs apportent des vocaux intéressants sur fond de quelques riffs bien tranchants. L’atmosphère dans la fosse va m’aider à appréhender la bête car l’ambiance y est fantastique. Plusieurs fois, Manuel Gagneux remerciera le public avec un sourire bluffé devant un auditoire déchaîné. « Vous êtes incroyable p…. !!» reviendra quelquefois et le sourire des musiciens sur scène semblait sincère. Avec une musique agressive n’appelant pas forcément à des mouvements de foule mais plutôt une écoute plus attentive, les Suisses sont bluffés par un public au diapason dans une fosse où ça réagit à merveille aux riffs mastodontes que le groupe déroule. Une prestation d’une heure absolument bluffante, un public aux anges (noirs, bien sûr !), tout le monde est chauffé à blanc pour la venue des maîtres de cérémonie.

Gojira

Joe Duplantier s’en est fait état dans la presse locale, ils ont reçu une offre du festival Pause Guitare qu’ils ne pouvaient refuser, un cachet à six chiffres étant sous-entendu. Gojira a changé de catégorie ce qui me surprend (positivement), moi qui les suis plutôt de loin n’en étant pas le plus grand fan. Gojira boxe aujourd’hui dans la catégorie poids lourds et se montre parfaitement à la hauteur de ce statut. Jeu de scène très abouti avec écrans géants, confettis, montée sur scène sur fonds de décompte après une attente prolongée pour bien profiter de la nuit albigeoise pour mieux mettre en valeur ses lights, Gojira fait tout très bien. Le début du show est monstrueux, Born For One Thing fait grosse impression avec ce refrain bien malsain. L’enchaînement Space TimeBackbone renvoie aux brutales heures des débuts ce qui ne manquera pas de ravir les fans de la première heure du combo. Backbone est pour moi un des plus gros rouleaux-compresseurs du Metal avec ce passage central juste dingue où Mario Duplantier impressionne. Je me demande comment il arrive à « passer » ce passage franchement exigeant. L’heureux papa Christian Andreu est bien présent et Jean-Michel Labadie est toujours aussi impliqué sur scène. Le shows des Landais, hyper en place, est impressionnant de puissance même si je trouve le son parfois imprécis (remarque déjà entendue les concernant au Hellfest). Le groupe brasse bien sa discographie avec un bon best-of même s’il en manquera certainement à certains. The Chant permet un beau moment de communion avec le public qui peut ainsi participer. Les Landais tiennent ici leur Memory Remains, ce moment qui marquera les shows du groupe. Gojira a désormais gagné son rond de serviette auprès d’un public plus rock. Cela en exaspérera plus d’un mais c’est tout de même une sacrée performance. Le très bon Fortitude, qui m’accompagnera quelques jours après ce show, est bien représenté avec sept pistes. Gros show avec un Gojira en mode patron.

Au final, cette première journée Metal proposée par le festival Pause Guitare m’a totalement emballé avec des groupes au top et impliqués, un public déchaîné et heureux, une ambiance bienveillante et conviviale. Le problème, parce qu’il en faut bien un, c’est que l’affluence trop juste n’a semble-t-il pas permis aux organisateurs de rentrer dans leur frais. Il semblerait donc que cette journée Metal, confortable pour les festivaliers, ne soit pas amenée à être reconduite dans les années futures. Dommage car le public metal, désormais bien rôdé, me semble parfaitement adapté à ce type de format. L’ambition de faire venir sur une seule journée un public metal sur un site était trop élevée. Non vraiment dommage car il y a tout ici pour que ça se passe bien. Au moins, les metalleux locaux se seront régalés et qui sait, peut-être un jour cet excellent festival y reviendra. Superbe journée, merci aux groupes, au public et à l’organisation.

P.S. La même affiche, moins Zeal & Ardor, sera à Bercy (enfin l'Accord Hotel Arena !) en Février 2023. A ne pas manquer …

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