En ce 14 novembre, malgré l’ambiance glaciale, nous avons décidé avec l’ami JC, qui illustre mon propos avec ces superbes photos, de nous réchauffer au pays des coups de pied au cul à la sauce Lofofora. Il y a maintenant une petite semaine que leur nouveau méfait Vanités a pris place dans les bacs. Un album frontal, direct, que vous pouvez retrouver en chronique ici, et le concert qui va suivre sera à l’image de cet album, sauvage.
La soirée débute à 21h00 pétante avec Colision, groupe bordelais qui investit la scène de la Rock School Barbey pour une petite demi-heure. Fort d’un EP sorti en mars dernier, le quatuor se présente devant une salle peu réceptive et quasiment vide au moment de jouer le premier accord. Mais cela ne va pas durer et pour des raisons assez évidentes, qui font qu’il est toujours agréable de découvrir un groupe qui passe l’épreuve du live.
Le quatuor propose une musique hybride, une base clairement rock à tendance math par instant. Des compositions qui peuvent être très ambiancées et assez tranquilles par moment, et qui par instant s’emballent pour nous passer par la moulinette en « Core ». Il se qualifie de Grungegaze, un sous-genre qui navigue entre le grunge et le rock alternatif, qui emprunte au style Shoegaze son côté plus aérien. Le groupe se compose de Simon à la guitare et chant, de Jean Charles à la basse, Romain derrière la batterie et de Milo également à la guitare et chœurs.
Le groupe monte sur scène assez timidement pour prendre place. On les sent bien un peu stressés au moment de monter sur scène, mais cette sensation disparaît dès le premier coup de médiator. Un simple accord, lourd, présent, répété, comme un échauffement corporel et le groupe démarre ce mélange, assez original, entre douce mélodie et moment plus énervé pouvant aller jusqu’au blast. Le groupe fera parler sa musique sans artifice, ni fioriture, le groupe est totalement investi dans sa démarche artistique.
Mais Colision, c’est avant tout une terre de paradoxes et de contrastes. Je me demandais pourquoi Milo tenait sa guitare comme celui de Dillinger Escape Plan, mais après l’avoir entendu hurler à pleins poumons, et la manière dont il joue certains riffs, il y a déjà plus de sens. Pourtant, sa manière de jouer contraste elle aussi avec celle proposée par Simon, principal chanteur, qui possède une voix plus proche de Bryan Molko que de Jacob Bannon. Ils sont assez complémentaires, pour aborder les deux côtés de leur musique, même si à titre personnel je pense qu’un chant plus hurlé donnerait une autre dimension à leur musique. Mais bon, qu’est-ce que vous voulez, je suis né bourrin, je le resterai.
Le duo rythmique est lui aussi intéressant. L’énergie développée par Jean Charles est remarquable, il a du mal à tenir en place dès que le tempo s’emballe. Quant à Romain, il a une frappe qui s’adapte aux effets voulus par les compositions, mais aime également placer des petits détails dans son jeu qui rajoute à la rythmique initiale.
Globalement Colision aura proposé une belle prestation live, diverse et variée dans ses compositions et dans son intensité. La salle se sera remplie au fur et à mesure de la prestation, un bon signe s’il en est.
Setlist de Colision :
Move Out Sick Slave (inédit) Found It Knees Healing Is Not linear Psycho Backyards
Mais ce soir le public, toujours très éclectique dans leur concert, est là pour Lofofora. Les darons du metal français, ont aujourd’hui trente ans et arrive tout fier pour nous présenter leur nouveau méfait, Vanités. Vous trouverez d’ailleurs la chronique de ce nouvel album ici. J’ai eu le plaisir de croiser quelques instants Reuno, et lui ai demandé s’il était content de cet album. Il m’a simplement répondu que c’était le retour du public qui le rendait heureux, simplement de savoir que l’album plaît lui suffit.
La salle s’est bien remplie lorsque résonne en guise d'introduction O Venezia Venaga, Venusia de Nino Rota. Vincent enchaîne avec le début, tout en percussion, de Le Fond Et La Forme, un choix tout à fait adapté pour entamer un set, un titre entre groove et puissance qui pose les bases de l’heure et demi qui nous attend. Sans temps mort, Lofo enchaîne avec un extrait de Vanités, Elixir, qui aura un peu de mal à chauffer le public, vu que l’album est sorti le samedi précédent. Mais ce n’est pas un souci, Reuno utilise sa verve habituelle, empli d’humour et d’un brin de provocation pour faire réagir le public. Et cela fonctionne très bien puisque sur Bonne Guerre, ça fait déjà mal dans le pogo, et ne faiblira pas durant tout le set.
L’avantage lorsque l’on a trente ans de carrière et une douzaine d’albums, c’est que l’on peut se permettre de tabler sur un panel de titres assez large et surtout de savoir lesquels fonctionnent bien auprès du public. Et même si les Lofo sont assez intelligents pour changer leur setlist régulièrement, quel plaisir d’entendre des titres comme Autopilote, Les Gens, ou encore Carapace. Mais mon petit plaisir de vieil amateur de Lofofora, c’est l’exhumation d’Arraché, et celle-là il y avait bien longtemps que je ne l’avais pas entendue en live.
Autre avantage quand on a trente ans de carrière, c’est que lorsque Daniel alias Doudou, guitariste en chef, fait un saut dans le temps en débutant l’introduction de Contre Les Murs alors qu’il est prévu de jouer Cannibales, (je vous laisse observer le saut dans le temps via la setlist) on est assez à l’aise pour effectuer une belle pirouette et repartir de plus belle. C’est bien entendu l’hilarité générale sur scène, et Reuno ne se fait évidemment par prier pour s’engouffrer dans la brèche et se mue en Jacques Martin (ben oui, j’insiste mais trente ans de carrière), pour savoir si Doudou est bien accompagné par ses parents ce soir afin d’évacuer le stress et pouvoir continuer le set.
Mais malgré leur expérience, il n’y a pas de lassitude chez Lofofora, contrairement à d’autres groupes. Les gars ont encore une énergie intacte, une volonté de bien faire et de le faire savoir. Et même si Daniel, et Phil sont toujours très concentrés sur leurs instruments, c’est Reuno qui prend le relais et assure le show. Il est remonté comme une pendule, saute, joue du regard, harangue en continu le public et se frappe même le torse avec les poings sur les titres les plus rentre-dedans.
Ce seront huit titres qui seront extraits de Vanités, preuve de l’importance de ce nouvel opus aux yeux du groupe. Et pour ceux qui le connaissent déjà, vous devez savoir que ce n’est clairement pas un des albums les plus calmes que le groupe ait proposé. J’ai même rarement senti une telle puissance émaner d’un de leurs concerts au moment où arrive le titre Le Venin, qui arrache quand même sévèrement en live.
Le rappel (de principe, puisque le groupe l’annonce et reste sur scène) sera à l’image de ce besoin de lâcher les chevaux, la version revisitée de L’œuf, une version bicéphale est très originale, avec une seconde partie totalement écrasante. Et lorsque le groupe enchaîne Justice Pour Tous, X-It, et Buvez Du Cul, on ne m’enlèvera pas de l’idée que le groupe a réveillé le punk qui sommeille en lui. Et ce ne sera pas l’excellent La Surface qui prépare le retour au calme et conclut ce set qui me fera changer d’avis.
Une belle soirée en compagnie de Lofofora, le public remercie chaleureusement le quatuor. Et même si Reuno se carapate assez vite de la scène, les trois collègues musiciens resteront longtemps à serrer des paluches, tout en affichant un large sourire. Et histoire d’enfoncer le clou, Phil nous rappelle, en mimant une crête avec sa main au-dessus de sa tête, que les Lofos sont et resteront des punks dans l’esprit.
Setlist de Lofofora :
Le Fond Et La Forme Elixir Bonne Guerre Arraché Les Gens Les Fauves Pyromane Cannibales Les Seigneurs Le Futur Carapace Dur Comme Fer Weedo Autopilote Contre Les Murs Le Venin Le Refus
Rappel : L’œuf Justice Pour Tous X-it Buvez Du Cul La Surface
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