Interview Benjamin Belot
Salut Benjamin, merci d'accorder cet entretien au webzine auxportesdumetal.com. Pour commencer, peux-tu nous présenter les membres du groupe ?Salut Philippe, merci de nous accorder cette interview, notre line up actuel est vraiment solide, nous avons le plaisir de compter dans nos rang Tibo (Opal Insight, guitare), Maxime (basse), Gilles (The Old Dead Tree, Varsovie, guitare), Phil (batterie) et moi-même (Penumbra, chant). Quelles sont les origines du groupe, de son nom ?J’ai fondé Lux Incerta en 2000 sur les cendres de mon précédent groupe Synoptia. Nous nous étions séparés à l’époque alors que le groupe commençait à faire parler de lui, je m’étais investi totalement dans ce projet, j’étais donc très frustré qu’il s’arrête et je ressentais le besoin de m’exprimer autrement. J’étais seul, et en même temps libre de pouvoir choisir exactement le style que j’aimais. J’ai donc passé une annonce pour trouver les autres membres du groupe et j’ai très rapidement rencontré Gilles. Nous avons tout de suite matché sur notre vision de la musique en général et de l’univers que nous voulions explorer. Quant au nom du groupe, Lux Incerta, il s’agit d’une expression latine signifiant “Lumière Crépusculaire” ou “Lumière déclinante”. C’est un nom que j’avais trouvé pour un morceau instrumental de Synoptia et je trouvais qu’il représentait parfaitement le concept que je voulais porter. Il s’agit de ce moment de lutte et de dualité entre le jour et la nuit, l’ombre et la lumière, la vie et la mort. Cela symbolise aussi tout simplement la vie pour moi, cette lutte perpétuelle et cette alternance de moments sombres et lumineux. Peux-tu nous entretenir du parcours de Lux Incerta depuis ses débuts ?Au moment de la séparation de Synoptia, j’avais déjà deux morceaux pour poser les fondations de Lux Incerta. Josselin, le batteur de Synoptia, avait décidé de me suivre, et avec Gilles nous avons assez rapidement recruté Nicolas, le second guitariste. En quelques mois le line up était complet (j’étais pour ma part à la basse et au chant). Nous avions même, à l’époque, recruté un ami violoniste, Charles, pour les concerts. Sans trop rentrer dans les détails, nous avons composé, fait plusieurs lives, et sorti notre premier EP en 2003 (enregistré par Jean-Jacques Moréac de Misanthrope). Nous avons connu quelques changements de line up sans jamais ralentir notre activité jusqu’à 2007, lorsque nous avons eu le bonheur de faire la première partie de My Dying Bride à la Loco. Nous avons également réédité notre EP qui était épuisé, en y ajoutant un titre instrumental. A cette époque, Gilles et moi avons eu nos premiers enfants, et nos activités musicales parallèles (The Old Dead Tree, Penumbra) et professionnelles nous ont conduits à mettre Lux Incerta en hibernation d’un commun accord. En 2010, nous avons en même temps ressenti le besoin de reprendre le projet et de composer un album. C’est ainsi que “A decade of Dusk” a vu le jour en 2012. Peu de temps après, Gilles a déménagé vers Nantes. Nous sommes restés en contact en nous promettant de reprendre lorsque le moment serait venu. En 2017, suite à sa rencontre avec Phil, Gilles m’a proposé de remonter un line up sur Nantes et d’attaquer l’écriture d’un nouvel album, ce que nous avons fait. Nous avons aussi décidé de remasteriser et sortir en physique “A decade of Dusk” (2018). Le recrutement de David (basse, remplacé par Maxime en 2021) et Nasro (guitare, remplacé par Tibo en 2021 également) nous ont permis de reprendre les concerts, avec de belles dates comme au Nantes Metal fest, au Backstage by the Mill entre autres… nous avons enfin eu l’honneur de participer à l’album Tribute à Cathedral et enregistrant notre version de “Serpent Eve”. La pandémie ayant débarqué en 2020, nous avons composé à distance notre album “Dark Odyssey”, et l’avons enregistré courant 2021 avec Fabien Devaux, pour un release en avril 2022. Nous préparons actuellement de nombreux concerts un peu partout en France pour défendre notre album sur scène ! Quelles influences jalonnent ce parcours ? De quels groupes vous sentez-vous proches ?Clairement, mon univers d’origine est le Doom Metal principalement, avec des groupes comme Paradise Lost, My Dying Bride, Katatonia, Anthema ou encore Type O Negative. Gilles a amené une couleur progressive, plus moderne et plus profonde à notre musique. Cela étant, nos goûts musicaux sont assez éclectiques, j’écoute par exemple aussi du djent instrumental (Clouds, For Giants par exemple), du death Metal ou du baroque… Phil, quant à lui, est un grand fan de Black Metal. Nous nous définissons comme un groupe de Doom Death Progressif. Je découvre la formation avec « Dark Odyssey » sur lequel j’ai beaucoup accroché, avec sa diversité stylistique (notamment Doom, Death, Prog), sa puissance, ses aspects mélancoliques. Les compositions, parfois longues, développent nombre d’ambiances passionnantes, l’apport du piano et du violoncelle est un très intéressant plus… je présume que vous êtes totalement satisfaits de l’album au sein du groupe ?Merci beaucoup pour ces compliments qui nous touchent vraiment. C’est assez rare de dire cela, mais je pense que le résultat de “Dark Odyssey” est exactement celui que nous voulions obtenir. C’est un travail qui s’étale sur plusieurs années, donc forcément une œuvre changeante, mouvante jusqu’à ce qu’elle soit figée lors de son enregistrement. Nous sommes satisfaits de tout : la pochette (réalisée par Marianne Blanchard), les chansons qui ont toutes leur propre personnalité tout en s’inscrivant dans le même univers, le son (Fabien Devaux) et tous les retours extrêmement positifs que nous avons pu avoir. C’est un réel bonheur pour nous. Le chant est en français et en anglais. Etais-ce une évidence à la base de combiner ces deux langues au sein de l’album ?Pour moi, cela a toujours été une évidence. D’ailleurs, si Gilles et Phil ne me freinaient pas, la moitié du chant serait en français ! Je suis un amoureux de notre langue, de la littérature française, de la richesse de sa poésie. J’aime beaucoup les textes de groupes comme Forbidden Site ou Varsovie, la langue française est la plus riche du monde je pense, donc il me paraissait indispensable de l’utiliser. La seule limite, c’est que, mal utilisée, tu peux rapidement tomber dans le grotesque, alors que l’anglais sonnera toujours bien. Écrire des paroles en français, pour du Metal, c'est un exercice de style périlleux mais je trouve cela passionnant ! Peux-tu nous entretenir du processus de composition de « Dark Odyssey » ?Le processus a été très particulier puisqu’à cause de la pandémie, nous ne nous sommes presque pas vus pendant plus d’un an. Gilles et moi avons composé la base de tous les morceaux, et nous nous sommes envoyés des dizaines de versions différentes de chaque morceau en les travaillant, les modifiant… Phil et Gilles ont utilisé cette matière première pour arriver à ces versions définitives, et en parallèle je composais les lignes de chant, puis les paroles. Tout ce travail est absolument colossal même s’il ne se voit pas. Ce sont aussi des discussions passionnées sur la structure de morceaux, les parties à enlever, modifier, rajouter, où mettre du chant, où rester en instrumental… tu l’imagines, les débats ont été enflammés ! Un album de ce type se doit d'avoir un son puissant et un mixage harmonieux. Eh bien c’est mission accomplie ! Comment s'est déroulé l'enregistrement de « Dark Odyssey » ?Nous avons enregistré les pré-productions dans le studio de Phil, pour avoir une version définitive de chaque morceau, en 2020. Dès lors, nous avions une vision claire du résultat final de “Dark Odyssey”. Nous avons ensuite enregistré l’album courant 2021, avec Fabien Devaux, en nous mettant d’accord avec lui sur ce que nous voulions : un album avec un son moderne, puissant, mais aussi fidèle à notre style, et avec une vraie batterie (je pense que cela s’entend). Le mixage s’est fait fin 2021. Peux-tu nous parler de l'artwork de « Dark Odyssey » ?Oui, avec plaisir. Cet artwork a été réalisé par Marianne Blanchard, une artiste Bisontine, que Gilles a rencontré en 2020. Elle pratique la technique du papier à gratter en utilisant un scalpel pour travailler le papier et dessiner (et graver) son œuvre. Nous lui avons expliqué le concept de l’album, en lui donnant la direction artistique générale, mais en lui laissant la liberté de l’interpréter avec son style. Le résultat est au-delà de nos attentes, nous en sommes très satisfaits. Comment se déroule la collaboration avec Klonosphère ?Vraiment bien. Notre partenariat est fructueux, nous sommes satisfaits du travail qu’ils ont accompli pour “Dark Odyssey”, s’accompagner de professionnels de qualité pour la promotion d’un album de Metal est à mon sens indispensable aujourd’hui. Je présume qu’il y a eu un impact de la pandémie sur le groupe et l’album ?Oui, comme je te l’ai expliqué, cela a mis en suspens les répétitions et les concerts, mais nous avons trouvé notre façon de travailler à distance. Et cette étrange période a eu un aspect inattendu sur le travail de composition : la solitude, l’éloignement, nous ont paradoxalement inspirés pour composer “Dark Odyssey”. Quelle est l'actualité de Lux Incerta, présente et à venir ?Actuellement, nous continuons la promotion de “Dark Odyssey”, au travers d’interviews comme celle-ci, de démarchage, et de répétitions pour préparer nos futurs concerts. Nous jouons le 8 octobre à Lyon, au Rituale Lugdunum Fest II, avec Silt et Lyncelia, les 25 et 26 Novembre à Nantes et Brest avec Monolithe et The Old Dead Tree, le 10 décembre à Paris avec Mourning Dawn et Lying Figures, et nous prévoyons plusieurs dates en mars 2023 notamment. La composition de nouveaux titres est également en projet. A quoi peut-on s'attendre lorsqu'on va découvrir Lux Incerta sur scène ?À une plongée dans un univers de contrastes, entre ombre et lumière, calme et tempête, espoir et désespoir. Nous travaillons d’arrache-pied pour être les meilleurs possibles sur scène, et les retours que nous avons eu de nos derniers lives sont très satisfaisants. Nous proposons une véritable expérience sensorielle, un voyage spirituel. Quel regard portes-tu sur la scène Metal française actuelle ?Je ne suis pas un spécialiste de la scène Metal française actuelle mais je sais que de très bons groupes émergent. J’aime beaucoup Regarde les Hommes Tomber, leur univers est proche du mien. Nous avons joué avec Hangman’s Chair au NMF, leur doom urbain me parle aussi. J’aime l’onirisme d’Alcest, ou encore l’univers sombre de Céleste. La scène Metal française est vraiment très riche. Quels albums écoutes-tu en ce moment et lesquels conseillerais-tu ?Le dernier album à m'avoir vraiment marqué est “Beyond a godless veil” de Draconian, je le trouve excellent de bout en bout. Ces derniers jours, j’ai écouté un album de baroque, des compositions de Marin Marais orchestrées par Jordi Savall, et le dernier Shape of Despair “Return to the Void”. Je te remercie pour cette interview et te laisse le mot de la fin !Merci à toi de m’avoir donné l’occasion de partager l’univers de Lux Incerta avec tous les lecteurs d’”Aux Portes du Metal”, et merci pour le soutien que ton webzine apporte au Metal en général. J’espère que tu pourras venir nous voir sur scène lors de l’un de nos prochains concerts, tu ne le regretteras pas ! A très bientôt !
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