C H R O N I Q U E

Découverte francophone aujourd’hui avec le dernier album de XCIII intitulé Like A Fiend In A Cloud. Si le groupe a pour l’instant une renommée assez restreinte, les Niçois méritent néanmoins une attention toute particulière.

Inspiré par le poème de Baudelaire joliment titré « A une passante », mais aussi rempli de références implicites à des œuvres du XIXème siècle issues des mouvements dits du « romantisme noir », selon la formule consacrée du critique d’art Mario Praz,  XCIII (ou plus simplement quatre-vingt-treize) sait jouer de ses multiples atouts artistiques et esthétiques qui s’accomplissent dans un Metal à la fois tortueux et mélancolique.

Musicalement parlant, leurs références sont assez hétérogènes : d’un Metal Shoegaze à la Alcest (période Les Voyages De L’Âme) à du Black parfois plus tradi, en passant par de l’atmosphérique et du classique pour aller parfois vers du progressif. XCIII complique son style tout en le rendant assez homogène. Point de bizarreries métalliques incompatibles, juste un Metal touchant, spleenesque, qui vous emporte dans des mélodies agréables et souvent très personnelles.

L’introduction, sous forme de piano au phrasé classique mais néanmoins ponctué par des éléments modernes, annonce un album d’une grande qualité artistique. Ce que confirme d’ailleurs très bien la piste suivante, Bal Macabre, qui fait penser aux vieilles gravures médiévales : la mort dansant ironiquement sur un corps enterré à la hâte, avec, au loin, le son d’une cloche annonçant la peste à venir... La mélopée est envoûtante, la voix très bien posée et le piano toujours bien présent en fond, comme une araignée tissant tranquillement sa toile. Le tout est accompagné par une voix criarde, rappelant la noirceur du lieu, la tristesse de l’événement et la fin d’une vie.

Les chansons sont propices à des tableaux mentaux dont les images s’emmêlent dans une intericonicité qui paraît presque infinie, intericonicité qui serait aussi bien personnelle, artistique qu'historique. Le lien avec Alcest se fait ensuite percevoir sur quelques pistes comme Perpetual Place ou Autumns Call. Mais il serait réducteur de se limiter à de telles correspondances. XCIII montre, au fil de l’album une assez grande diversité et maturité musicale pour s’éloigner du grand parrain Neige.

On pourra sans doute leur reprocher une production un peu faible, on sent en effet parfois des accrocs de-ci de-là (dans Bal Macabre – Epilogue par exemple), mais le tout reste quand même assez homogène. Et la dernière piste vient conclure majestueusement l’album. Eponymement intitulée  Like A Fiend In A Cloud, qu'on pourrait traduire simplement par « comme le diable dans les nuées » ou « comme la peste dans l’ombre », si l’on voulait rester dans le même topos littéraire annoncé plus haut.

Un premier album qui impose bien sa patte, dans un style personnel et touchant, beau et maléfique à la fois, comme le Baudelaire dont ils semblent s’inspirer. On espère un second album dans la lignée de celui-ci, encore plus sombre, mieux produit, mais toujours aussi poignant. Merci !

PS : Mention spéciale au chant en français.

Tracklist de Like A Fiend In A Cloud :

01. Rêverie Nocturne
02. Bal Macabre
03. Perpetual Place
04. Autumns Call
05. Hibernal Sadness
06. Bal Macabre - Epilogue
07. Feathers
08. Like A Fiend In A Cloud

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