Afin d’éviter la fuite de mon cerveau, j’essaie autant que possible de rencontrer de la culture, je ne le fais pas toujours exprès, à l’occasion elle arrive tout simplement à moi. Mais j’aime bien aller trainer mes guêtres dans des endroits qui permettent de s’alimenter les uns les autres d’autres cultures, et ainsi j’ai moins peur de mon voisin inconnu. Au cours d’un de mes périples j’ai eu le plaisir de rencontrer Dimitri, un franco-russe qui n’avait rien d’un flan mais tout du metalleux bien informé. Après quelques verres de vodka finissant en off, mon russe s’était nettement amélioré et nous avons commencé à parler musique : « Hey Dude, tu ne connais pas Vorvaň qui sort son premier album Once Love Was Lost ? Je t’assure qu’ils vont plus te réchauffer les oreilles qu’une demi-douzaine de Russes blancs ! » L’animal m’avait mis la Prusse à l’oreille…
Et bien mes amis, pas d’introduction, pas de crème autour du chou, ce Once Love Was Lost est tout simplement ce que j’ai entendu de plus excitant en cette année 2016 ! Déjà les quatre membres que sont Eli Mavrychev à la guitare et au chant, Eugene Cherevkov à la guitare, Igor Butz au poste de bassiste et Zakk Hemma à la batterie et chœurs ont choisi M. Kurt Ballou de Converge au mixage. Je peux vous assurer que ce choix est loin d’être innocent. Dès les premières secondes, le son est connu et lorgne vers les productions du gang de Boston.
Les compositions sont quant à elles de très hautes volées. C’est simple, je ne me suis jamais ennuyé à l’écoute de cette galette. C’est vivant parce qu’imprévisible, incontrôlable et surtout ça transpire le truc qui vient des tripes. Pas de plan prédéfini, pas de morceau identique sur toutes les plages de l’album mais des influences avalées, digérées, et surtout retranscrites en prenant soin de ne rentrer dans aucune case. C’est ce que l'on nous propose tout au long des dix titres de ce chef-d’œuvre.
Vorvaň est qualifié de Metal, Punk, Hardcore, il est vrai que l’on retrouve tous ces mouvements dans la manière d’écrire du groupe, toutefois des morceaux sont plus marqué que d’autres. Par exemple les titres Of Menace And Favour et Turned Away sont des morceaux punks à la limite du Oï teinté de hardcore. Il s’en dégage une énorme énergie franche, directe, d’autant que le groupe aime bien poser quelques accélérations fulgurantes histoire de ne pas laisser l’auditeur se reposer.
Certains titres comme Sirens ou Last To Witness auraient pu être des compostions de Converge et l’on comprend mieux comment le groupe choisit ses collaborateurs. Ils ont d’ailleurs eu le plaisir d’ouvrir pour eux sur deux dates à Moscou et à Saint Petersburg il y a quelques jours. Mais pour en revenir aux deux titres précédemment cités, la référence est claire avec un aspect chaotique dans leur construction et le rajout d’une seconde voix sur Sirens qui n’est pas sans rappeler la tessiture de Jacob Bannon. Les riffs sont d’une rapidité hallucinante et le batteur, tout comme Ben Koller, rajoute énormément à l’ensemble. Mais finie la comparaison, car ce Vorvan ce n’est pas que ça.
Le groupe est quoi qu’il arrive, à l’aise dans plein de styles différents. The Black Kaleidoscope qui flirte avec le Death, les titres Third Case Scenario ou Breothan sont plus dans une veine Metalcore. C’est toujours puissant, inspiré et donne littéralement envie de se briser la nuque à force d’headbanger. Et puis on retrouve par-ci par-là, saupoudrés tout au long de l’album, des riffs qui louchent vers le black metal accompagné de blast d’une rare intensité pour du hardcore bien entendu.
Et la dernière facette du groupe, plus inattendue celle-ci, est le morceau épique qui monte en puissance. Celestine ou The End (Hemicrania) approchent de la dizaine de minutes et peuvent faire penser à Neurosis sous une certaine forme. Là aussi, le batteur amène encore plus de lourdeur grâce à un tempo plus lent ou une manière très rock’n roll de maltraiter son instrument. Le chanteur s’arrache les cordes vocales et le tout nous transporte dans des instants de folie à la limite de la rupture émotionnelle.
Je ne vais pas vous rebattre les oreilles, enfin les yeux en l’occurrence, pendant des heures sur les multiples qualités de cette galette, continuer la surenchère de qualificatif ne servirait pas à grand-chose. C’est un véritable coup de cœur, et pour moi le meilleur album de l’année jusqu’ici. Et pis c’est tout !
Tracklist de Once Love Was Lost:
01. Of Menace And Favour 02. Sirens 03. Third Case Scenario 04. Last To Witness 05. Celestine 06. Breothan 07. Turned Away 08. The Black Kaleidoscope 09. When Serpent Strikes First 10. The End (Hemicrania)
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