Artiste/Groupe:

Toundra

CD:

Hex

Date de sortie:

Janvier 2022

Label:

Inside Out Music

Style:

Rock Progressif

Chroniqueur:

dominique

Note:

15/20

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Nous avions laissé les Espagnols de Toundra en 2020, au début de cette période tourmentée, avec la bande son du film Das Cabinet des Dr. Caligari. Un cadre qui les avait si non contraint, tout au moins forcé à mettre de la mesure dans leur post rock progressif. Leur huitième album, Hex, sortira au tout début janvier et leur permet de nous démontrer qu’ils n’ont rien perdu de leur mordant ni de la puissance musicale que l’on a pu observer dans les albums précédents. Hex est lui aussi 100% instrumental, hyper musical et très agréable à l’écoute. Produit pour une sortie en vinyle, le disque comprend clairement deux faces ; une face avec un titre, El Odio, de presque vingt-deux minutes, divisées en trois parties indistinctes. Et une face B, qui comprend quatre titres plus courts, mais qui gardent la même couleur, les mêmes ambiances et surtout la signature musicale du groupe.

Cette signature musical, Toundra semble y tenir, car, sans être un auditeur hyper régulier de leurs albums, je me suis immédiatement senti dans un environnement connu à l’écoute de Hex. On voit que les natifs de Madrid sont dans une certaine zone de confort, et qu’ils maîtrisent leur sujet. Toutefois comme toute zone de confort, celle-ci a la petite faiblesse de ne pas vraiment surprendre l’auditeur. Tout est propre, bien en place et connu ; rien ne semble pouvoir dérégler une machine qui va du coup manquer un peu d’originalité ; mais c’est un reproche plus existentiel qu’une réelle critique, car, au fond, on prend du plaisir tout au long des quarante-cinq minutes de l’album. La face B tout d’abord ; quatre titres assez traditionnels. Ruinas, un titre de format « industriel » qui colle bien avec la (belle) pochette et qui rentre dans les carcans classiques du groupe. C’est propre avec la batterie arythmique d’Álex Pérez qui laisse beaucoup de place aux riffs de guitare de David López et Esteban Girón. Le titre prend du coup des allures plus metal et moins contemplatives. La Larga Marcha m’a fait penser à l’album précédent que j’avais déjà chroniquer sur votre site préféré. Plus calme, avec plusieurs lignes musicales distinctes et superposées, la cinématique du titre le rend propre à stimuler l’imagination de l’auditeur. Les loops musicales sont intéressantes et leur répétitivité ne lasse pas. Le rythme descend encore avec l’intro de Watt. Mais ce n’est qu’une impression, car le morceau est finalement plus guerrier que la mise en bouche ne le laisse croire. Plus prog aussi, avec l’utilisation, en plus d’une rythmique hachée, de synthés et de saxophones. Intéressant pour le travail à la basse d’Alberto Tocados, que pour les variations mélodiques proposées par les guitares tout au long des presque huit minutes. Un bon titre prog. Finalement, le bien nommé FIN, calme et mélodique ; proche du son proposé par des groupes comme The Chant ou The Pineapple Thief, ce titre plus contemplatif clôt l’album en douceur.

Parlons maintenant du plat de résistance, ou plutôt de l’entrée roborative qu’est El Odio, la haine en français. Musicalement c’est du Toundra, pas de doute ; les trois parties s’enchainent naturellement pour ne faire qu’un seul tout. Aussi audios que visuelles, les vingt-deux minutes du titre vous emmènent dans un voyage au cœur des sentiments du groupe envers notre monde actuel. Et comme le souligne le titre du morceau, ceux-ci ne sont pas au beau fixe. Dans un récent interview, Esteban Girón exprime clairement l’incompréhension du groupe envers les sentiments homophobes, la ségrégation sociale, et plus précisément la peur primaire qu’engendre le fait d’être différent ; mais aussi son opposition à un consumérisme excessif et à notre capacité d’adulte de tout détruire et de donner à la prochaine génération un monde dans un piteux état. El Odio traite de ceci, et tente d’exprimer ces sentiments musicalement. Ce qui n’est pas évident quand les mots, les paroles dans ce cas, manquent. Je dois bien avouer que, sans le support vidéo, je ne suis pas certain que j’aurais eu la capacité de lire tous ces messages dans la musique de Toundra. Je la trouve pour ma part trop lisse et musicale, ou simplement peut-être trop « belle », pour transmettre des messages aussi négatifs. Les envolées rythmiques régulières font certes augmenter la tension, sans pour autant exprimer, selon mes critères, la noirceur du message. On n’est assez loin de la force des albums de The Reticent.

Bref, musicalement propre et agréable, Hex pèche un peu par là ou Toundra est spécialement fort ; sa capacité à faire de belles mélodies. Il n’en reste que vous passerez un bon moment avec cet album, même sans avoir la capacité d’en lire les messages les plus secrets.

Tracklist de Hex :

01. El Odio. Parte I
02. El Odio. Parte II
03. El Odio. Parte III
04. Ruinas
05. La Larga Marcha
06. Watt
07. FIN

 

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