En ce mois de février 2022, Arjen Lucassen fait un
beau cadeau à ses fans en leur offrant enfin le troisième volet de la saga Star One. Un premier album paru en 2002, un second en 2010 (un excellent live entre les deux)... et depuis, rien. Jusqu’à
aujourd’hui. Douze ans d’attente donc. Et au menu, quelques changements. En effet, si le
concept reste le même (des chansons hard/metal prog plus directes que celles d’Ayreon, toutes basées sur les films de science fiction
appréciés par Lucassen) Star One propose des
nouveautés, enfin surtout une évolution de son line-up. En effet, les deux premiers
épisodes reposaient sur quatre vocalistes (Russell Allen, Damian
Wilson, Floor Jansen et Dan Swanö) qui se donnaient la
réplique tout au long des pistes proposées (parfois en duo, trio, etc.). On retrouve tout
ce beau monde ici mais cette fois, la liste a été allongée de façon
conséquente et chaque intervenant ne chante que sur un morceau et seul (bien
qu’accompagné de choristes, les excellentes Marcela Bovio et Irene
Jansen), à une ou deux exceptions près. Arjen reste
évidemment le chef d’orchestre de cette épopée (consacrée aux films
traitant du temps) et le monsieur a composé, produit, joué de la guitare, de la basse, des
claviers et a même poussé la chansonnette sur l’une des pistes du CD bonus. A la
batterie, on retrouve le fidèle Ed Warby.
Maintenant que l’on sait tout cela, un constat assez évident
s’impose : la frontière entre Ayreon et Star One est de
plus en plus floue. Il y a la douzaine de vocalistes mobilisés bien sûr... mais aussi
l’artwork signé par Jef Bertels dont le style et les couleurs renvoient
immédiatement à Ayreon. Musicalement, on va également pouvoir
constater que cet épisode s’aventure plus volontiers sur des territoires hard ou prog,
laissant un peu de côté l’aspect très sombre et particulièrement heavy
de Victims Of The Modern Age, le deuxième effort de
Star One. Pourtant, le démarrage de ce nouvel opus ne bouscule pas nos habitudes
: intro aux claviers, on retrouve cette patte rétro-futuriste chère à
Lucassen, ce mélange de heavy speedé à mi-chemin entre influences
seventies et metal plus heavy, porté par une production moderne. Le son est superbe, comme
toujours. Fate Of Man (consacré au film Terminator) démarre donc les
hostilités avec panache. En plus, c’est Brittney Slayes (Unleash The Archers) qui chante et Michael
Romeo (Symphony X) vient poser un solo virtuose dont il a
le secret. Traditionnellement chez Star One, après un morceau d’ouverture
bien enlevé, on a le droit à un titre bien plus lourd et mid-tempo. La tradition est
respectée avec 28 Days qui voit intervenir un habitué puisqu’il
s’agit de Russell Allen (l’ambiance de ce morceau me fait penser à
l’album Victims Of The Modern Age). On n’est donc pas dépaysé. Par
contre, en troisième place, Prescient est une compo plus aventureuse, prog et
mélodique, très changeante, sur laquelle interagissent Micheal Mills
(Toehider) et Ross Jennings (Haken). Le titre est plus complexe et offre de belles harmonies
vocales entre les deux chanteurs. On retrouve bien une ambiance et un style de composition
Lucassen mais pas forcément hyper Star One classique dans
l’esprit.
Je vais essayer de vous éviter une description piste par piste trop
détaillée et fastidieuse. La suite fait jongler les styles, ambiances et invités.
Le gros point fort, comme souvent avec les disques du père Lucassen, c’est
le casting ! Il y a les "anciens" déjà cités (Allen,
Wilson, Jansen, Swanö), bien sûr, mais les
nouveaux venus font sacrément plaisir ! Jeff Scott Soto et Ron "Bumblefoot" Thal contribuent à Back From The Past, sorte
de heavy rock endiablé et entêtant. Joe Lynn Turner participe à
The Year Of ’41, un morceau aux influences rock plus vintage et enjoué,
Swanö est invité sur un Today Is Yesterday un peu plus foufou aux
accents presque Townsendiens... mais il y a aussi une piste
majestueuse et épique, la fameuse Lost Children Of The Universe de presque dix minutes,
avec son impressionnante chorale, la voix et la prestance de Roy Khan (ex-Kamelot, Conception) et un solo du grand Steve Vai.
N’en jetez plus, on est sur du blockbuster hollywoodien là ! Tout cela est rythmé,
varié, fun et mélodique à souhait, clairement plus "tubesque" (terme à
manier avec des pincettes) que Victims Of The Modern Age. En cela on se rapproche donc plus du
premier album (sans toutefois l’égaler, ce n’est que mon avis). Pour information, le
CD bonus de l’édition limitée contient exactement les mêmes morceaux mais avec
des chanteurs différents. C’est, par exemple, Tony Martin (ex-Black Sabbath) qui remplace Roy Khan sur Lost
Children Of The Universe. Sympa !
Il y a plusieurs façons de réagir à ce Revel In
Time. Certains apprécieront que Star One se renouvelle un peu et convie
plus de monde à la fête, d’autres se diront que, du coup, le projet perd un peu de
son identité. Quelques auditeurs regretteront peut-être que ce disque ne soit finalement
pas si surprenant dans la mesure où, depuis plusieurs décennies, on a eu le temps de faire
le tour du style Lucassen et que tout cela n’est pas bien neuf. Certains iront
même peut-être jusqu’à dire que le concept mériterait d’être
plus travaillé d’un point de vue musical (on sait à quel film une chanson se
réfère quand on se penche sur les paroles mais ce n’est pas la musique ou les
arrangements eux-mêmes qui nous font deviner de quoi il s’agit... il n’y a, par
exemple, rien dans Fate Of Man qui sonne spécialement plus
Terminator qu’un autre titre de l’album). Tous ces points de vue peuvent
s’entendre... Après, reste l’essentiel : Revel In Time est un disque
soigné, très bien écrit et produit, gorgé de mélodies et ambiances
prenantes et servi par une assemblée de musiciens et vocalistes quatre étoiles.
C’est du Lucassen. Pas foncièrement novateur... mais bien maitrisé
et fun !
Tracklist de Revel In Time :
01. Fate Of Man (avec Brittney Slayes et
Michael Romeo) 02. 28 Days (Till The End Of Time) (avec
Russell Allen et Timo Somers) 03. Prescient (avec
Ross Jennings et Micheal Mills) 04. Back From The Past
(avec Jeff Scott Soto et Ron "Bumblefoot" Thal) 05. Revel In
Time (avec Brandon Yeagley et Adrian Vandenberg) 06.
The Year Of ’41 (avec Joe Lynn Turner, Joel Hoekstra et
Jens Johansson) 07. Bridge Of Life (avec Damian
Wilson) 08. Today Is Yesterday (avec Dan
Swanö, Marcel Singor et Lisa Bella
Donna) 09. A Hand On The Clock (avec Floor Jansen et
Joost van den Broek) 10. Beyond The Edge Of It All (avec John
Jaycee Cuijpers) 11. Lost Children Of The Universe (avec Roy
Khan et Steve Vai)