Psychonaut - Unfold the God Man, ou la naissance d'une étoile...
Si vous aviez à me demander dans quelle catégorie je pourrais classer cet album, je répondrais sans hésiter la catégorie surprise. Psychonaut est formé en 2013 par trois Belges : Thomas Michiels à la basse, Peter Le Page à la batterie et Stefan de Graef à la guitare, le chant étant assuré conjointement par le bassiste et le guitariste. Le trio jusque-là resté dans l'ombre, n'est pourtant pas tout nouveau sur le marché des sonorités ; mais son poids sur l'industrie du disque ou du numérique s'est avéré jusqu'ici plutôt faible, avec seulement deux petits EP produits en 2014 et 2016. Mais c'est 2020 qui va changer la donne grâce à ce premier LP, intitulé Unfold The God Man, qui a visiblement été conçu avec toute la minutie et la fougue que peuvent permettre l'anonymat. Mais comment passer de l'ombre à la lumière me demanderiez-vous ? A cela je vous répondrais : Pelagic Records. Car leur approche à la fois philosophique et recherchée, tant sur le plan musical que conceptuel leur à valu les faveurs de ce label grandissant, fondé par Robin Staps, membre principal de The Ocean. Le reste parle de lui-même, mais vous pardonnerez mon incapacité à ne pas y rajouter mon grain de sel.
Unfold The God Man est donc le fruit de trois années de travail acharné, incluant neuf pistes, pour pas moins de une heure et dix minutes d'introspection. All I Saw as a Huge Monkey qui, en tant qu'unique instrumental de l'album introduit l'oeuvre de façon osée, surprend tout de suite par sa capacité à enjamber les lignes de code du Sludge pour en faire quelque chose de nouveau, d'inexploré. La mélodie et la culture du riff s'y mélangent de façon alambiquée dans un rythme à la fois soutenu et capricieux, sans jamais manquer de nous surprendre, encore et encore. Dans The Story of Your Enslavement, la piste suivante, c'est un Sludge plus délicat et moins Progressif qui nous est proposé, avec des effluves lourdes, puissantes et un refrain d'une beauté sublime. De quoi révéler finement, en l'espace de deux pistes, le potentiel d'un album qui n'en finira plus de nous captiver. Halls of Amenti et Kabuddah enfoncent quant à elles un clou dans la tête des fans de The Ocean avec des sonorités proches de leur mythique album Anthopocentric. Nous y retrouvons en effet cette même énergie qui mêle l'envoûtement à l'agressivité ; ce pouvoir de réveiller en nous quelque chose d'interdit et de plaisant à la fois. Mais à ce jeu-là, c'est le pur produit, ou devrais-je dire la pure empreinte, de Psychonaut qui remporte la mise, à savoir : The Fall of Consciousness. Sa longue introduction dirige ses auditeurs tambour battant dans une marche ininterrompue de surenchères maitrisées de bout en bout. La guitare, tantôt mélodique et suraiguë, tantôt Heavy et dévastatrice, forme une parfaite alliance avec une batterie et une basse tant immersives que résonnantes. Le chant, à l'instar de l'excellente Story of Your Enslavement, apporte un cachet exceptionnel avant que le doigté de la basse de Thomas Michiels, peu avant les six minutes, amorce un climax crystallisé par la plus belle envolée du guitariste Stefan de Graef. Et si ces trois Belges n'ont jusque-là montré aucune difficulté à jouer avec nos émotions, c'est sur Sananda qu'ils le feront le mieux. La piste est longue (près de dix minutes), étirée et leur touche Post qui se faisait déjà ressentir ça et là éclate au grand jour dans une piste aérée, touchante, unique. Celestial Dictator, de son coté, peaufine le nuancier d'ambiances de l'album avec une approche tribale et une créativité digne des premiers albums de Mastodon ; tandis que Nexus, un peu plus effacée que ces homologues, continue de faire le travail sans apporter nécessairement un plus à l'ensemble de l'album. La dernière piste, Nothing is Consciousless, qui surplombe l'ensemble du haut de ces quinze minutes, regorge elle aussi de détails et de bonnes idées en tout genre. Mais sa durée et son manque d'accessibilité joueront peut être en sa défaveur face à l'efficacité incontestable des pistes figurant sur la première moitié de l'album.
Alors que dire de cet album surgit de nulle part, que personne n'avait vu venir ? Que retenir de ce voyage à sens unique ? Et que faire, si ce n'est le recommencer, encore et encore, jusqu'à en percer tous les mystères. Rappelons-le, Unfold the God Man est un premier album. Un de ceux qui n'ont pas la prétention de brasser les foules mais de toucher leurs adeptes en leur apportant ces détails minutieux qu'ils recherchent ou cherchent à ressentir. Que leur prochaine réalisation soit une réussite ou un échec, peu importe, Unfold the God Man aura marqué les esprits à travers un album varié, innovant, touchant et distingué. Rien que ça !
Tracklist de Unfold the God Man :
01. All I Saw as a Huge Monkey 02. The Story of Your Enslavement 03. Kabuddah 04. The Fall of Consciousness 05. Sananda 06. Celestial Dictator 07. Halls of Amenti 08. Nexus 09. Nothing is Consciousless
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