Dans la série des classiques du metal, il ne faut pas passer à côté de ce The Eye franchement savoureux. Si vous pensez que King Diamond n'est qu'un lutin outrageusement maquillé, à la voix aigüe et au metal grand-guignolesque (ce qu'il est en partie), une belle surprise vous attend. Le King est avant tout un excellent musicien qui sait bien s'entourer.
Les ambiances théâtrales à tendance horrifique, pour lesquelles Mr. Diamond est réputé, ne prennent ici jamais le pas sur une musique particulièrement inspirée, enlevée et diablement efficace. Contrairement à quelques-uns de ses autres albums un peu plus inégaux (surtout dans la partie post-1990 de sa carrière), notre Danois diabolique n'a, ici, pas oublié de composer de vraies chansons. Et quelles chansons ! Ecoutez Eye of the Witch, The Trial, 1642 Imprisonment ou le magnifique instrumental Insanity (entre autres, je pourrais quasiment toutes les citer) pour vous en convaincre. Si l'ensemble demeure heavy, rythmé et parsemé d'ambiances sombres, il est vrai que mélodiquement, ce cinquième album de King Diamond passe un cap et se révèle particulièrement accrocheur. Les claviers sont également plus mis en avant que sur les opus précédents du groupe... mais n'allez pas croire pour autant que la composition a évolué vers quelque chose de trop gentillet (même s'il est vrai que The Eye bénéficie d'une production assez léchée, qu'il est moins ardu à appréhender que d'autres œuvres du King et que ses compos épousent un format assez court et direct, parfois moins tortueux que par le passé).
En dehors du roi diamant lui-même qui reste la star du show, ce sont les guitares qui brillent véritablement sur The Eye. Les amateurs de l'instrument en question apprécieront particulièrement le duo Andy LaRocque/Pete Blakk, au sommet de son art, qui leur en fera voir de toutes les couleurs. Les riffs aussi puissants qu'accrocheurs se succèdent avec bonheur et les soli sont de toute beauté. C'est d'ailleurs malheureusement la dernière prestation de Blakk au sein de King Diamond et, malgré quelques très bons albums sortis depuis, on peut dire que jamais une telle alchimie entre LaRocque et un autre guitariste n'a été retrouvée sur un album du King depuis. Cela me fait penser que la même année sont sortis (au moins) deux autres grands disques dotés de formidables paires de guitaristes : Painkiller de Judas Priest et Rust In Peace de Megadeth. Oui, je pense qu'on peut pousser la comparaison jusque-là...
Bien entendu, le reste du groupe se défend, avec notamment à la batterie un certain Snowy Shaw (Mercyful Fate, Notre Dame, Therion) qui a la lourde tâche de remplacer Mikkey Dee parti jouer pour Don Dokken (avant de rejoindre un certain Motörhead un peu plus tard). Quant au King lui-même, il s'amuse à varier son chant et ses voix autant que possible, il est vrai que l'exercice est assez spécial et peut rebuter (de par une théâtralité exacerbée) mais j'aime beaucoup.
Ce disque possède une atmosphère remarquable, assez grandiose, avec son histoire (inspirée d'événements réels) se déroulant pendant l'inquisition française entre le XVe et le XVIIe siècle. La production est classieuse (malgré un son de batterie un peu trop clinique / synthétique dont je ne suis pas fan) et les mélodies particulièrement entêtantes. C'est un bel album de metal dont émane une certaine magie (noire, bien sûr). Il s'agit, en tout cas, d'un des plus beaux et accessibles efforts de King Diamond. La suite de la décennie 90 réservera encore quelques bonnes productions à se mettre sous la dent mais aussi une inspiration plus inégale et, globalement, des albums moins marquants... peut-être en partie parce que le King sera bien occupé par le retour du groupe culte qui l'avait fait connaître au début des années 80 : Mercyful Fate.
Tracklist de The Eye :
01. Eye Of The Witch 02. The Trial (Chambre Ardente) 03. Burn 04. Two Little Girls 05. Into The Convent 06. Father Picard 07. Behind These Walls 08. The Meetings 09. Insanity 10. 1642 Imprisonment 11. The Curse
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