C H R O N I Q U E

En 1990, après une série de forts bons albums hard rock qui ont largement lancés sa carrière solo, Gary Moore entame un virage violent vers le blues et surprend son monde. Certes, on le savait fan de blues, mais il sort avec Still Got The Blues un pur album de blues. Pari risqué, mais pari finalement gagnant puisque cet album sera le plus gros succès commercial de Gary. La pochette montre un enfant travaillant ses gammes sur son lit, sous le poster de Jimmy Hendrix qui veille au grain, des vinyles jonchent le sol. On imagine tout à fait le petit Gary, lui qui a commencé la guitare à huit ans, bossant sur les grands classiques blues de l'époque. Le contenu confirme l'impression de la pochette, puisque tous les morceaux sont des blues des plus classiques. Les fans de l'époque ont dû être assez troublés de cette orientation de carrière. L'avenir prouvera que Gary saura alterner les albums blues et les albums hard rock, pour finalement en faire le style Gary Moore.

L'album commence avec un génial Moving On, où la slide de Gary fait des merveilles. On note aussi un excellent piano blues. A noter qu'un certain nombre de pointures de l'époque apparaissent sur l'album. Par exemple Don Airey et Nicky Hopkins aux claviers, les guitaristes Albert Collins, George Harrison et Albert King, ou encore Bob Daisley à la basse. On continue dans le pur blues avec la reprise de AC Williams, Oh Pretty Woman, superbe, par la qualité des soli de guitare de Gary, mais aussi son chant, ainsi que la section cuivre qui l'accompagne. Ce n'est pas fini, car vient ensuite la reprise de Walking By Myself, de Jimmy Rogers. Là encore, le Gary se transcende, voix, guitare, le top. S'ajoute au mix un excellent harmonica, qui fait de cette reprise une pure réussite. Vient ensuite le morceau culte, qui restera dans la mémoire collective comme étant l'une des pièces maîtresses de la carrière de Gary Moore. C'est la ballade Still Got The Blue (For You). La voix se fait langoureuse, elle rappelle celle de Phil Lynott, on se dit que Thin Lizzy aurait pu sortir ce morceau. Le solo de Gary est reconnaissable en seulement trois notes, ce qui est marrant puisqu'il perdra un procès pour plagiat à cause de ce morceau, accusé de l'avoir emprunté à un groupe Allemand inconnu du nom de Jud's Gallery. Toujours est-il que le Gary sait faire parler sa LesPaul, et de belle manière, il le prouve sur ce classique.
On repart dans le blues avec Texas Strut, un des morceaux les plus réussis à mon gout. Très imprégné de Stevie Ray Vaughan ou de vieux ZZ Top, ce morceau sert encore de défouloir au guitariste inspiré qu'est Gary Moore, il y enchaîne plusieurs soli, tous aussi géniaux les uns que les autres. Si vous aimez les cuivres et le piano blues, Too Tired, la courte reprise qui suit, va vous plaire. L'archétype même du blues avec section cuivre. La voix de Gary et sa guitare semblent avoir été conçus pour le blues de ce style. Il enchaîne avec King Of The Blues, un morceau sur la vie d'une de ses idoles, Albert King, guitariste de blues Américain. A noter qu'Albert King accompagne Gary sur Oh Pretty Woman, déjà cité, l'élève et le maître sont réunis sur cet album. As The Year Go Passing By est le top du top, c'est une ballade blues, une complainte des plaines du Mississipi, où la guitare de Gary Moore s'abandonne totalement, laissant par moment la place à un fabuleux piano blues, le tout savamment soutenu par une section rythmique, musclée d'orgue Hammond et de saxo. Une pure merveille, et mon morceau préféré. A noter que l'auteur du morceau est Deadric Malone, mais qu'il y a discussion sur cette origine, comme souvent avec les grands classiques de blues, mais que la version la plus connue sera enregistrée par Albert King (tiens, tiens) en 1967. Le morceau suivant aurait pu être aussi une reprise de blues, mais c'est un morceau original de Gary Moore, excellent, typiquement blues, plutôt mid tempo, et bien chanté. Etonnant le morceau suivant, That Kind Of Woman, car on se dit en écoutant la guitare qu'il y a un petit son reconnaissable, qui n'est autre que la guitare de George Harrisson, qui signe aussi le morceau. Leurs guitares "gently weep", accompagnées d'une belle section cuivre et de chœurs féminins, c'est un bon morceau. Toujours dans les reprises, on retrouve un grand classique, All Your Love, d'Otis Rush. Une autre star du blues de la région du Mississipi, qui aura bercé l'enfance de Gary. L'album se termine par une dernière reprise, de Fleetwood Mac (époque blues de Peter Green). Encore un très bon morceau, avec une excellente guitare, un piano honky tonky et une section cuivre de rêve.

Cet album est certes un album de blues, mais il a de tels atouts que tous les bons fans de hard rock devraient y trouver leur compte, ou au moins les racines de leur musique favorite. A posséder !

Tracklist de Still Got The Blues :

01. Moving On
02. Oh Pretty Woman
03. Walking By Myself
04. Still Got The Blues
05. Texas Strut
06. Too Tired
07. King Of The Blues
08. As The Years Go Passing By
09. Midnight Blues
10. That Kind Of Woman
11. All Your Love
12. Stop Messin' Around

Titres bonus (édition remasterisée de 2003) :

13. The Stumble
14. Left Me With The Blues
15. Further Up The Road
16. Mean Cruel Woman
17. The Sky Is Crying 

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