Dites, vous me feriez une faveur ? Bon. Donc cliquez ici, ouvrez bien grand vos esgourdes et accrochez-vous à votre fauteuil. Si tout se passe comme prévu, l’écoute de l’album distillera l’enthousiasme le plus pur dans votre p’tit cœur et vous hocherez du chef à la lecture de ce qui suit. Si ça se passe moins bien, peut-être aurai-je au moins la chance de changer le regard que vous portez sur la bête avec la présente chronique.
Paleopneumatic. Rigolo, non ? On se gausse a priori, mais on fait moins les malins après avoir mangé les soixante minutes bien denses qui composent le disque. Et on en oublie le titre aux airs de Michelin préhistorique.
Paleopneumatic est donc le deuxième full length de Dissona, groupe basé à Chicago et dont le premier effort, Dissona, valait déjà son pesant de cacahuètes et augurait du meilleur pour la suite. Et, chose chouette, ce qui était auguré advint. On apprécie.
On goûte en effet, une heure durant, à un prog metal des plus léchés aux sources d’inspiration très disparates qui s’enlacent avec bonheur sans pour autant s’affadir. Le riffing se rapproche d’un prog death technique à la Persefone, la surenchère en moins. Les synthés se chargent de parer le tout d’une aura orchestrale, très présente mais qui sait se retirer au moment opportun. L’album est également parsemé de sons et d’instruments moins communs : les cloches succèdent au vent, le clavecin au tronc martelé, une cavalcade au 8bit. La gageure restant de lier tous ces éléments sans qu’ils ne jurent entre eux.
Et force est de constater la réussite de l’entreprise, avant tout permise par la structure des titres ; oubliez les notions de couplet et de refrain, elles sont dispensables ici. Dissona progresse en permanence, en ce sens que leur musique s’achemine d’un point à un autre et ne tourne pas en boucle. Quelques motifs se répètent pour mieux assembler deux sections aux accents trop éloignés pour cohabiter directement. La première écoute est une aventure, où nous serions bien en peine de prévoir ce qui nous attend au détour de chaque accalmie, de chaque plan récurrent. Ces derniers sont par ailleurs salvateurs, comme une bouée de sauvetage à laquelle s’accrocher dans un océan de changement explosif.
Cette première écoute nous laisse avec l’impression de n’avoir pu entendre qu’un quart de l’album, tant les sons se superposent. S’ils paraîtront trop enchevêtrés pour certains, ils sont à l’origine de la densité et de la profondeur de la musique du groupe. Nous pouvons plonger à notre guise dans ces couches empilées qui se complètent mieux qu’elles ne s’entrechoquent.
Notre brasse coulée nous mène, entre autres délices, à la voix de David Dubenic. Là encore la diversité est de mise, puisque le bougre jongle avec brio entre un chant clair, un chant plus rauque, des hurlements et des growls profonds, tous époustouflants d’expressivité. Il est parfois secondé par une superbe voix féminine, tout en contraste, qu’il nous est donné de savourer sur Another Sky et Sunderance notamment. Pour autant, les parties vocales ne sont jamais l’ultime centre des compositions et font davantage corps avec le reste des instruments. Ainsi, le jeu de la guitare n'est jamais le faire-valoir du chant, et il s’agit d’une force inestimable. A tout instant de l’écoute, tendez l’oreille et elle se fendra d’un riff percutant, d’arpèges discrets ou bien brillera par son silence. Même les solos s’intègrent avec justesse à l’atmosphère des compositions. Et il s’agit là d’un véritable tour de force.
Paleopneumatic dépasse largement les attentes pourtant solides qui s’étaient ancrées en moi après la découverte de leur premier album. La musique développée est riche, changeante, puissante, originale, bigrement expressive et délivre plus de claques en une écoute qu’un instituteur d’autrefois en quarante ans de carrière. Personnellement, je ressens une étrange envie de dire merci.
Tracklist de Paleopneumatic :
01. Another Sky 02. Fire-Bellied 03. Outside The Skin 04. Breach 05. Totality 06. Odium 07. Anastomosis 08. Lysis 09. The Last Resistance 10. Sunderance
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