Artiste/Groupe:

Coroner

CD:

Dissonance Theory

Date de sortie:

Octobre 2025

Label:

Century Media

Style:

Thrash Metal

Chroniqueur:

Blaster of Muppets

Note:

17/20

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2025 n’est décidément pas une année comme les autres. Ozzy nous a quittés, Tomas Lindberg (At The Gates) aussi, Savatage est revenu sur scène après vingt-trois ans d’absence, Twisted Sister et Rush qu’on pensait ne plus revoir nous apprennent qu’ils vont repartir sur les routes, Megadeth annonce la fin de sa carrière et j’en passe... Que d’émotions ! Et bien sûr, il y a ce nouvel album des cultissimes Coroner. On l’a tellement attendu. On avait fini par douter de sa venue... Le combo suisse avait quand même opéré son retour en 2010 et ne semblait décidé qu’à donner des concerts. Mais il fallait être patient. Car ça y est. Trente-trois ans après Grin, son (véritable) dernier album (Coroner paru en 1995 étant une compilation... qui contenait tout de même pas mal de nouvelles compos) et quinze ans après la résurrection, Dissonance Theory est bel et bien là. 

Le groupe est culte, sa carrière (à l’époque où il était productif) a finalement été assez courte et la discographie n’est pas entachée d’albums honteux (Grin n’est clairement pas mon préféré du lot mais il a cependant des choses intéressantes à offrir). Alors forcément, après tout ce temps, les attentes sont élevées et il y a un risque non négligeable que les fantasmes nourris pendant des décennies favorisent un petit sentiment de déception quand ce sixième opus de Coroner se concrétise enfin. Mais le trio - composé des deux membres d’origines Ron Broder (basse, chant) et Tommy Vetterli (guitare) ainsi que du batteur Diego Rapacchietti - est fort et son nouvel opus ne vient pas ternir sa réputation. Alors, à quoi s’attendre avec Dissonance Theory ? Niveau format, on est face à dix pistes (dont une courte intro et un instrumental de trois minutes en guise de conclusion) avec des morceaux qui tournent globalement autour des cinq minutes (deux s’aventurent un peu au-delà mais raisonnablement, six minutes et quelques)... l’ensemble ne s’éternise pas, le total ne dépassant pas les quarante-sept minutes. Et stylistiquement parlant ? Sommes-nous face à une continuité de l’avant-gardiste (pour l’époque) Grin, avec des morceaux au tempo plutôt mid et des structures assez répétitives (avec des plages parfois longues, ce que la tracklist semble démentir, en terme de durée du moins) ou plutôt en présence d’un retour au thrash technique et véloce ? Coroner a-t-il choisi une autre voie ?

Les premiers extraits, Renewal et Symmetry, m’ont tout de suite rassuré. Coroner est toujours puissant, il est encore pertinent, conserve son identité (sans s’autopomper)... et surtout, il a toujours la hargne. Le son est implacable, massif et actuel (c’est Vetterli qui produit mais Jens Bogren a mixé et masterisé... fine équipe !), la voix âpre de Broder est immédiatement reconnaissable mais me paraît plus profonde ou imposante qu’avant, sans doute parce que bien "boostée" par la production. Et ces deux compositions sont véloces... elles renouent avec le thrash rapide et percutant qui avait été quelque peu délaissé sur Grin. Personnellement, ça me va très bien. Pour autant, Coroner ne sonne pas non plus comme sur ses premiers disques (les interventions de Vetterli sont plus concises, moins démonstratives, n’attendez pas de descentes de manche néo-classiques ici). En fait, il semblerait bien que l’on retrouve l’ADN du groupe (ce que semble suggérer l’artwork de l’album d’ailleurs) mais pas une resucée des gloires passées. Car il faut avancer et ne pas se complaire dans la nostalgie... Par contre, évidemment, et cela va se confirmer sur le reste du disque, Coroner ne surprend pas autant qu’il a pu le faire par le passé. Véritable figure avant-gardiste entre la fin des années 80 et le début des 90s, personne ne sonnait comme lui à l’époque, il ne peut pas exactement prétendre au même rang une trentaine d’années plus tard. Est-ce grave ? A mon sens, non. Car l’heure est aux retrouvailles et je suis juste heureux d’entendre de nouvelles compos de la part de ce groupe... j’ai envie de retrouver ce qui m’a plu quand je l’ai connu mais sans être contrarié par une sensation de répétition ou de stagnation non plus. Et c’est exactement ce que Dissonance Theory m’apporte. 

Ainsi, Oxymoron, l’intro de l’album nous fait retrouver l’univers froid, sombre et inquiétant des Suisses. Ses bruitages et arrangements au clavier nous font tout de suite dire qu’on ne va pas rigoler. Et en effet, avec Consequence et son riff dissonant (les bougres n’avaient pas menti), on est face à une musique agressive et terrassante. La dimension progressive chère au combo est toujours là, des plages plus calmes s’ajoutent à l’équation, les changements de tempo sont de la partie, une voix robotique s’invite sur le refrain, le son est top (la basse de Broden ressort bien, merci Jens Bogren pour ce mix !)... Beau début ! L’intensité est maintenue avec Sacrificial Lamb, un titre plus lourd mais captivant. L’équilibre entre la noirceur, un côté mécanique, une atmosphère pesante et une certaine beauté portée par les riffs, quelques mélodies, un beau solo ou une ambiance dramatique posée par des claviers (toujours) discrets est atteint pour mon plus grand plaisir. Retour au thrash moderne avec du riff tranchant sur Crisium Bound et encore plus sur Symmetry, déjà citée, dont les guitares m’évoquent un mix NevermoreArch Enemy. The Law et Transparent Eye sont excellentes (surtout la deuxième, à mon sens). Elles ralentissent le tempo et accentuent l’aspect hypnotique de la partition Coronerienne. Là, on se rapproche peut-être plus de Grin... avec une bonne touche de metal moderne, sur le riff de Transparent Eye qui se "désaccorde" progressivement par exemple. Bref, on ne s’ennuie pas. Vers la fin du voyage, il y aura encore du thrash rapide et rentre-dedans avec Renewal (on en a déjà parlé) et une surprise avec Prolonging, la conclusion instrumentale de Renewal, qui s’étend sur un peu plus de trois minutes et propose un solo d’orgue Hammond.

Avec Dissonance Theory, Coroner offre une belle extension de son œuvre. Au menu : une intensité dramatique, des ambiances cauchemardesques, de la froideur, des riffs tranchants ou hypnotiques (Vetterli demeure un excellent guitariste), un son décapant, des compos changeantes jamais trop linéaires... Les Suisses sont en grande forme. On retrouve des éléments caractéristiques de différentes étapes de leur discographie, des moments furieux, du thrash technique, des passages plus posés, progressifs ou atmosphériques et on en prend plein la tête. En ce qui me concerne, point de déception, Coroner signe un retour réussi, avec talent et classe. 

Tracklist de Dissonance Theory :

01. Oxymoron
02. Consequence
03. Sacrificial Lamb
04. Crisium Bound
05. Symmetry
06. The Law
07. Transparent Eye
08. Trinity
09. Renewal
10. Prolonging

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