Artiste/Groupe:

Bliss Of Flesh

CD:

Empyrean

Date de sortie:

Juillet 2017

Label:

Listenable Records

Style:

Death/Black

Chroniqueur:

hourkach

Note:

16.5/20

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"Abandonnez toute espérance, vous qui entrez."
Si vous êtes comme moi et que vous êtes incrédules face à l'avertissement écrit sur la porte des Enfers de Dante, je vous invite à me rejoindre immédiatement dans mon odyssée maléfique. Quatre ans après la sortie de Beati Pauperes Spiritu, Bliss Of Flesh est de retour avec un nouvel opus intitulé Empyrean. Les Nordistes clôturent ainsi l'adaptation musicale de La Divine Comédie de Dante lancée en 2009 avec leur premier album, Emaciated Deity. Pour ceux qui ne connaîtraient pas ce monument de la poésie classique, La Divine Comédie est le récit d'une vision durant laquelle Dante, transporté dans le monde surnaturel enseigné par la théologie du Moyen Age, est admis à contempler les supplices des damnés dans l'Enfer, l'état des âmes dans le Purgatoire et les joies célestes des justes dans le Paradis. Après avoir traité des deux premiers mondes dans ses précédents albums, Bliss Of Flesh ouvre donc l'ultime chapitre de cette trilogie consacrée au désir de tout homme, accéder au Paradis. Je croyais être éloigné de toutes ces croyances mais lorsque les premières notes de Empyrean jaillissent dans mes oreilles, mes certitudes s'effondrent littéralement et me poussent à entamer ma propre traversée en quête de cette vision livrée dans un tryptique.

Après plusieurs riffs de grattes envoûtants, Ascension explose sous les hurlements de Necurat et les blasts de Fleshstigma. Ce premier titre marque d'entrée les esprits grâce aux nombreux changements de rythmes et aux multiples timbres de voix du chanteur. En effet, Necurat ne se contente pas de vociférer bêtement derrière son micro car le bonhomme possède un talent incontestable en se payant le luxe d'allier chants éraillés, backing growls de bûcheron et voix claires. Paradoxalement, l'utilisation de ce dernier registre vocal renforce le côté malsain d'Ascension et le transforme même en une complainte ensorcelante au fil des minutes. Penitent et Agnus Dei ne me laissent absolument pas le temps d'expier mes pêchés et viennent, au contraire, me posséder avec des blasts de fou furieux. Malgré la voix très gutturale du frontman, les riffs acérés et la rapidité du tempo confèrent à ces deux morceaux une dimension et une sonorité black incontestables. Penitent se transforme même en un supplice lorsque le rythme s'apaise enfin laissant des voix de femmes prendre le relais. La combinaison de cette chorale féminine et des gémissements de Necurat est une véritable démonstration de haine qui prouve le talent d'écriture et l'énorme progression du combo nordiste depuis sa création en 1999. Inspiré par des monstres tels que Behemoth ou Belphegor, Bliss Of Flesh accroît l'impact de ces deux morceaux en cassant le rythme à de nombreuses reprises et en proposant plusieurs solis glaciaux et aiguisés de leurs guitaristes Sikkardinal et Pandemic.
Avec un tel déchaînement de violence, Bliss Of Flesh me met encore à l'épreuve et tente de corrompre mon âme avec deux nouvelles offrandes diaboliques. La tentation devient alors irrésistible car le quintet nordiste ne se repose pas sur ses lauriers et parvient, une nouvelle fois, à hausser son niveau de jeu en renforçant la sensation de cataclysme subie jusqu'alors. Le titre éponyme se divise en deux chansons d'une complémentarité et d'une efficacité redoutables : après une montée en puissance lente et déchirante, les instruments s'emballent brusquement et les hurlements morbides de Necurat viennent me glacer le sang. Empyrean (Last Kingdom) me fait de suite penser à du bon vieux Mayhem avec les incantations possédées et tourmentées du légendaire Attila Csihar. A l'image de leur maître, Bliss Of Flesh délivre ici une composition frôlant la perfection grâce à l'harmonie destructrice de chaque musicien et aux variations de chants toujours aussi cruelles. Lorsque le tempo ralentit et s'immobilise enfin sous un riff hypnotisant, la brutalité laisse place alors à un morceau d'une noirceur totale. Dans la continuité de sa première partie, Empyrean (Miserere Dei) vient briser mes certitudes à grands coups de riffs massifs, d'ambiances occultes et de chants monastiques. Au final, ces treize minutes de messe noire sont venues s'opposer à ma quête spirituelle mais je ne regrette pas ma lâcheté car l'orgasme auditif provoqué légitime amplement mon retour en Enfer...
Malgré cette démonstration d'agressivité, Bliss Of Flesh ne lève pas le pied et continue son travail de démolition en m'affligeant deux nouveaux sévices. Apostasy et Exercitus Caelorum ne sont pas des compos extraordinaires en soi mais leur savant mélange de mid-tempo, d'accélérations assassines et d'évocations malsaines confèrent à ces morceaux une dimension Black/Death redoutable. Comme un symbole, Empyrean s'achève avec une ultime nuisance sonore répondant au nom de Renunciation. Ce titre a vu juste car cela fait bien longtemps que j'ai renoncé à ma quête spirituelle en succombant aux sirènes du Mal. Renunciation vient définitivement me condamner au châtiment éternel par une intro acoustique enivrante, des passages au parfum Hard Rock et un côté groove très surprenant. Le style de cette chanson rompt totalement avec le reste de l'album mais c'est drôlement bon de se prendre un dernier hymne au headbanging dans les dents !

Au final, les huit titres de Empyrean ne m'ont jamais permis de trouver la Lumière et la paix intérieure. Bien au contraire, je me suis senti glisser inexorablement vers les ténèbres et, telles les flèches des archers centaures, chaque note de Empyrean est venue me transpercer sans me laisser le moindre espoir de rédemption. Grâce à des morceaux d'une brutalité et d'une puissance incroyables, Bliss Of Flesh a réussi son pari en clôturant sa trilogie divine de façon Dantesque. J'avoue avoir hésité à me lancer dans ce pèlerinage car je trouvais que les précédents albums du combo manquaient d'originalité et de maîtrise mais ce temps est désormais révolu car Empyrean m'a enfin permis de persister dans la voie de la souffrance, des limbes et des flammes...

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Tracklist de Empyrean :

01. Ascension
02. Penitent
03. Agnus Dei
04. Empyrean (Last Kingdom)
05. Empyrean (Miserere Dei)
06. Appstasy
07. Excercitus Caelorum
08. Renunciation