Plaisante soirée estivale dans la Ville Rose, les terrasses sont pleines, la météo est parfaite le thermostat élevé mais juste ce qu’il faut. Soirée post-hardcore / screamo au Connexion, salle amenée à revoir son modèle délaissant a priori la tenue de concerts pour se repositionner vers une restauration de type espagnole. Bien dommage de mon avis tant ce lieu, idéalement placé à 200 mètres du métro Jean Jaurès en cœur de ville. Déjà pas mal de monde, des gens tatoués devant la salle où un premier bar tourne déjà bien. A l’intérieur, Boneflower, groupe de post-rock / screamo occupe la scène et déverse une musique pas toujours simple à appréhender mais qui est bien reçue par un public motivé et intéressé. Ils ne sont que trois sur scène, guitariste et bassiste alternent le micro et ainsi mixent deux aspects d’une musique à la croisée des chemins. Découverte un peu pour moi je le concède volontiers mais musique sympathique, originale de fait et plutôt créative même si je confesse que cela ne prend pas outre mesure pour moi perturbé que je suis par ces structures trop versatiles. Il n’en demeure pas moins que le trio madrilène fait bien le job et montre un bon professionnalisme. Bref un groupe solide, juste trop screamo pour moi.

Touché Amoré

Pour être franc, je n’avais pas forcément prévu de proposer un report de ce show. Je connaissais mal le groupe (pour ne pas dire quasiment pas), encore moins ce style de musique et craignais de me retrouver un peu « sec » et surtout imprécis et maladroit. Sauf que voilà, j’ai pris une jolie baffe et je ne m’y attendais absolument pas. Aussi, la volonté de partager l’enthousiasme que ce concert a généré chez moi. De plus, Touché Amoré n’a pas son entrée sur notre auguste webzine et après cette déferlante d’une heure, je me suis dit que c’était bien dommage. Quel groupe, quelle énergie !! Même si la formation a ses entrées dans de très bons fests, une rapide présentation d’usage ne me semble pas inutile. Touché Amoré, outre un patronyme forcément plaisant pour un francophone, c’est un quintette nous venant de Californie. Nos américains proposent un post-hardcore / screamo assez typique de l’époque, mais il me semble nécessaire de préciser qu’ils ont fait partie de ceux qui ont remis ce registre sur le devant de la scène. Aussi, marchant dans les pas des cultissimes Converge, Touché Amoré a diminué avec le temps l’aspect screamo de sa musique pour aller vers des registres plus mélodiques, plus accessibles. Et c’est justement ce qui fait le sel de ce groupe fascinant, cet équilibre entre mélodies et screamo. Nous sommes ici sur une ligne de crête et ça fonctionne à fond. Il y a quelque chose du hardcore mélodique, une énergie adolescente renvoyant même à une scène grunge déjà lointaine mais le tout avec un soleil californien (via de lumineuses parties de guitares). J’irai presque jusqu’à faire référence au rock indie mais accéléré et ce de manière furieuse. Le tout grâce à un batteur ultra dynamique au jeu très puissant, solidifiant l’ensemble. Le tout est porté par un chant plus classiquement screamo avec la voix éraillée / criée d’un Jeremy Bolm au look aussi sympathique qu’au vocaux bien énervés et des paroles assez sombres. Le chant est particulièrement marquant après une petite nécessité d'adaptation. On sent une faille chez le garçon, particulièrement écorché vif mais dégageant une réelle émotion. Touché Amoré a vraiment trouvé le bon réglage entre énergie, dynamisme, furie juvénile, noirceur des textes. Le rendu est passionnant, remarquable avec une dimension poétique ma foi envoûtante. 

En live, on retrouve tous ces éléments, des musiciens souriants dégageant force sympathie, le fameux batteur (au faux air de Juan Branco, cette comparaison « m’a fait » le concert). Tout ce petit monde est dans un espace réduit et d’emblée annonce la couleur : sublimes mélodies de guitares et grosse assise rythmique. Et ce chanteur, très impliqué et très présent, qui déverse son chant aussi nerveux que somme toute très catchy. L’ensemble bénéficie ainsi d’une cohérence remarquable. Jamais mélodies et rythmiques plus enlevées ne prennent le pas l’une sur l’autre, les parties plus catchy bénéficient systématiquement d’une accélération délectable, d’une relance foudroyante, jouissive même avec ces mélodies qui n’en prennent que plus de saveur. « Sans maîtrise, la puissance n’est rien » disait une publicité (adage que les groupes de Metal peuvent s'approprier sans problème). C’est rigoureusement exact mais j’ajouterai que sans assise, la mélodie n’est rien.

Pour l’interaction avec le public, cela démarre doucement, le chanteur nous trouvant même timides, mais cela va vite se décanter. Pour précision, c’est la première fois que le groupe vient à Toulouse, on ne se connait donc pas encore, forcément on s’appréhende, on se jauge. Mais dès le deuxième titre, ça se réchauffe et ça se finira en plaisir totalement partagé, les musiciens souriant régulièrement devant les marques d’affection renvoyés par le public, les dingueries dans le pit comme ses fans en mode crowd-surfing s’accrochant littéralement au balcon. C’est d’ailleurs cette atmosphère conviviale, ultra chaleureuse, cette communion entre musiciens et public qui m’a poussé à écrire ce report. Il s‘est certainement passé quelque chose au Connexion ce soir et l’air ravi des zikos faisait plaisir à voir. Comme ces derniers nous ont en plus avoué que la chaleur toulousaine leur rappelait leur chez eux en Californie, cela ne pouvait que matcher qu'entre nous. 

Au final, découverte d’un excellent groupe à la musique sincèrement jouissive, passionnante, étonnamment émotionnelle où il se passe indéniablement quelque chose. Une belle soirée où musique de qualité, bienveillance, bonne humeur, énergie et tant d’autres choses se sont mélangées avec bonheur. On ressort de là souriant, apaisé, un peu rêveur dans un bien-être appréciable tout autant que la douceur de la nuit toulousaine. 

Setlist de Touché Amoré :