Groupe:

Ayreon Universe

Date:

16 Septembre 2017

Lieu:

Tilburg

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Au beau milieu du mois de septembre dernier, un événement pour le moins rare et donc incontournable a eu lieu aux Pays-Bas : Arjen Lucassen, mondialement connu pour être le géniteur d'Ayreon et quelques autres groupes ou projets, également réputé pour sa grande réticence à donner des concerts, a enfin consenti à offrir à ses fans une très courte série de shows, récompensant ainsi plus de vingt ans de patience (pour certains d'entre eux). Trois dates "à la maison", à Tilburg, les 15, 16 et 17 septembre... et c'est tout. Le nom du projet : Ayreon Universe. Le but : offrir une sorte de best-of Ayreon (tout en incluant une poignée de chansons de Star One, autre projet du maestro, lié à Ayreon de par la thématique SF et quelques musiciens employés). Le casting : énorme. Seize chanteurs et chanteuses, un groupe formé de collaborateurs bien connus des fans, agrémenté de violons, flûtes et autres joyeusetés. Sur le papier, assister à l'une de ces trois soirées s'annonçait immanquable. Mais Ayreon Universe a-t-il tenu ses promesses ? S'agissait-il d'un des grands concerts de l'année (voire plus) ? Votre serviteur vous répond par l'affirmative. Voici un compte-rendu (un peu de texte, beaucoup de photos) du concert donné le 16 septembre. 

Evidemment, vu le caractère exceptionnel de l'événement, le Poppodium 013 affiche complet. L'ambiance est particulière, il y a de l'excitation dans l'air, ce n'est pas tous les jours qu'on est sur le point d'assister à un concert d'Ayreon quand même ! C'est même la première fois. Le show démarre avec un prologue mené par Mike Mills, à l'aise dans le rôle du narrateur de cette soirée. S'en suit un petit film projeté sur l'écran géant positionné à l'arrière de la scène dans lequel on voit défiler toutes les pochettes des albums d'Ayreon et Star One dans un ordre chronologique avant que le conclusion ne se fasse sur un énorme logo "Ayreon Universe", sous les acclamations d'un public surexcité bien sûr. Et le show peut commencer...

Vous raconter toute la soirée, parler de chaque chanson et de tous les intervenants mobilisés pour l'occasion ? Ouh là, plutôt sortir un livre, oui. Non, nous n'avons pas toute la journée... je vais donc tâcher de ne pas entrer dans (tous) les détails mais plutôt vous relater quelques moments choisis. Le début du show est beau, classe. Mais plutôt calme. Déjà, il commence avec Dreamtime, pas le morceau le plus remuant de la discographie de Lucassen, vous en conviendrez. L'écran restera allumé tout au long de la soirée, avec des illustrations, des animations, les paroles de quelques chansons et, à chaque entrée d'un nouveau vocaliste sur scène, son nom affiché en énormes lettres capitales. Il y aura également de la pyrotechnie, très régulièrement même, des canons à fumée... bref, Lucassen et son équipe ont tenu à ce que le spectacle soit aussi visuel qu'auditif.

Le son est plutôt bon, ce qui est rassurant étant donné que le concert est enregistré. Cependant, pendant les premiers morceaux, les guitares manquent un peu de présence, cela s'arrangera rapidement par la suite. On démarre avec de la "vieillerie" (Dreamtime, Abbey Of Synn) mais très vite, des compos extraites d'albums plus récents prennent le relai (River Of Time, The Theory Of Everything). Tout cela se déguste avec plaisir mais, en ce qui me concerne, ce n'est pas encore le délire... probablement parce que je connais moins des albums comme Actual Fantasy ou The Theory Of Everything et parce que, comme je le disais un peu plus haut, les titres proposés ne sont pas, à mon sens, les plus entraînants que le groupe puisse servir en début de show. En fait, pour moi, la soirée décollera véritablement au bout d'une demi-heure, avec l'arrivée d'un titre plus heavy : Dawn Of A Million Souls. Là, je me prends une claque. J'étais un peu déçu que Russell Allen ne fasse plus partie de l'aventure et quand John Jaycee Cujipers arrive sur scène pour chanter ses parties, je me dis intérieurement "bonne chance, mec, ça ne va pas être simple"... Mais le John assure ! Il est excellent, bluffant. A posteriori, c'était incontestablement le bon choix pour remplacer Russell. Quelle belle surprise ! Personne n'a osé s'attaquer au magnifique solo de Michael Romeo par contre... il est donc zappé.

A partir de Dawn Of A Million Souls, c'est un enchaînement de "hits" et de vocalistes que je suis ravi de voir sur scène. Valley Of The Queens avec un trio de charme assuré par Floor Jansen, Anneke Van Giersbergen et Marcela Bovio, Ride The Comet avec l'excellente et rock'n'roll Magali Luyten, Loser avec Mike Mills, la magnifique And The Druids Turn To Stone avec l'impeccable Damian Wilson qui livre là l'une des prestations les plus mémorables de la soirée et l'entraînante The Two Gates pendant laquelle Irene Jansen présente tous les musiciens sur scène. En parlant de musiciens, je ne l'ai même pas précisé, mais cela va de soi, ils tiennent la baraque avec brio. La section rythmique, assurée par Ed Warby et Johann Va Stratum, ne souffre d'aucun reproche. Les guitaristes Marcel Coenen et Ferry Duijsens ne sont pas des manchots non plus... Et les chansons sont soutenues par un excellent trio de choristes (Irene Jansen, Marcela Bovio et Lisette Van Den Berg) sans lequel les chansons n'auraient vraiment pas la même saveur. J'en oublie mais il y a trop de monde, il se passe trop de choses... Ah si, quand même, Joost Van Den Broek, est sacrément présent et performant lui aussi, derrière ses claviers. Point commun de tout ce beau monde, au-delà d'une maîtrise instrumentale qui n'est plus à démontrer, le sourire. Tout le monde semble s'éclater sur scène. La bonne humeur régne.  

Arjen avait dit qu'il prévoyait de jouer des titres de tous ses albums, deux de chaque même. Pari presque tenu. Oui, tous les disques d'Ayreon sont bien représentés ce soir... Mais certains moins que d'autres, alors que quelques oeuvres sont citées plus de deux fois (The Source ou 01011001, par exemple). Mais il y a tellement de musique à se mettre sous la dent qu'il est de toute façon difficile de faire la fine bouche. Mon petit regret personnel : pas assez de titres de Star One (deux chansons du premier album, aucune du second). J'aurais adoré un Songs Of The Ocean ou un Digital Rain, par exemple...

Comme dit plus haut, je ne vais pas tout vous raconter. Quelques morceaux choisis donc... Quand je repense aux moments forts, l'arrivée de Tommy Karevik sur Into The Black Hole s'impose rapidement à moi. Quel chanteur (quelle compo aussi, ça aide) ! Age Of Shadows, avec Hansi KürschMarco Hietala et Floor Jansen... la classe ! Le bassiste Peter Vink, qui avait participé à la petite tournée Star One arrive avec sa basse rose sur l'intro de l'excellentissime Intergalactic Space Crusaders. Pour l'occasion, étant donné que Russell Allen est absent, c'est Magali Luyten et sa voix rauque qui prennent le relai. Très sympa... et le duo formé avec Damian Wilson (vraiment, j'insiste, l'un des vocalistes les plus impressionnants de la soirée) est aussi performant que fun.

  

Au bout d'une heure et quarante-cinq minutes de concert, une bonne vingtaine de morceaux ont été joués et toujours pas de Lucassen en vue. Mais quand va-t-il enfin apparaître ? Pas sur n'importe quelle compo, c'est sûr... C'est The Castle Hall, extraite du classique Into The Electric Castle, considéré par beaucoup comme étant l'un des disques les plus importants sortis par son créateur, que Mr. Arjen débarque enfin, guitare à la main ! Au moment où il apparaît, il a le droit à une véritable ovation, vous vous en doutez ! Il ne s'en est jamais caché, la performance live, ça n'est vraiment pas son truc, il déteste même ça. Et pourtant, il affiche un énorme sourire et virevolte d'un bout à l'autre de la scène. On pourrait presque jurer qu'il y prend du plaisir. S'en suit un long discours assez touchant. Touchant parce que pas pro, trop long, maladroit, un peu balbutiant... mais d'une certaine façon, il est parfait. Parce que Lucassen n'est pas un entertainer qui balance des formules toutes faites. On n'est pas face à un showman ultra rodé mais en présence d'un artiste qui s'était juré qu'il ne donnerait jamais de concert avec Ayreon et qui se retrouve face à ses fans, vingt-deux ans après les débuts de cette aventure. Il est nerveux, regarde ses pieds, marque quelques pauses... c'est authentique. Il peut bien prendre tout son temps, on s'en fout, on sait qu'on vit un moment assez unique. Il remercie ses fans, ses musiciens et complices, nous raconte une anecdote ou deux... avant de nous proposer une chanson sur laquelle il va chanter en compagnie de Jay Van Feggelen : Amazing Flight ! Et ce sera tout pour lui... deux chansons et un long discours, pour l'hermite qu'il est, c'est déjà sans doute bien assez. Avant le rappel, un deuxième et dernier titre de The Human Equation, l'imparable Love

Les meilleures choses ont une fin... et comment conclure une telle soirée ? Le choix de la toute dernière chanson est surprenant car il s'agit de The Eye Of Ra qui est un morceau extrait du premier album de Star One. Ce n'est certainement pas moi qui vais me plaindre, j'adore cet album et cette chanson. C'est juste inattendu de finir sur une compo qui ne soit pas un classique d'Ayreon. En tout cas, le morceau est magnifiquement interprété... par Damian Wilson d'abord, bientôt et progressivement rejoint par tous les chanteurs et chanteuses de la soirée pour un final choral à coller des frissons. Magique ! La conclusion a cappella reprise par les seize vocalistes et les fans (les paroles sont projetées sur l'écran géant, ça aide) fait décoller le toit du Poppodium 013 et laisse sur les visages un sourire béat. Arjen vient saluer ses camarades, puis la foule... les lumières se rallument, le rêve éveillé s'achève. Retour à la réalité. 

Quelle magnifique soirée ! Deux heures et vingt minutes de ravissement. On a eu droit à un bel échantillon de la carrière d'Ayreon... même si, évidemment, tout le monde ne peut pas avoir ses chansons préférées et que certaines frustrations sont forcément inévitables. Mais comment oser se plaindre ? Autant de beau monde sur une même scène, des compos variées extraites de tous les albums du maestro, de la générosité, un son et une mise en scène au diapason, une ambiance chaleureuse et festive... l'événement s'annonçait immanquable, il le fut. L'un des grands concerts de l'année alors ? Voire de ces dernières années ? Pour les fans de ce genre musical et des musiciens conviés, assurément. Vivement le DVD pour revivre tout cela !

Setlist Ayreon Universe :

01. Prologue (avec Mike Mills)
02. Dreamtime (avec Edward Reekers)
03. Abbey Of Synn (avec Robert Soeterboek)
04. River Of Time (avec Hansi Kürsch et Marco Hietala)
05. Prologue : The Blackboard (avec Marcela Bovio et Mike Mills)
06. The Theory Of Everything part 1 (avec Marcela Bovio et Mike Mills)
07. The Theory Of Everything part 2 (avec Marcela Bovio et Mike Mills)
08. Merlin's Will (avec Floor Jansen)
09. Waking Dreams (avec Jonas Renkse et Anneke Van Giersbergen)
10. Dawn Of A Million Souls (avec John Jaycee Cujipers)
11. Valley Of The Queens (avec Anneke Van Giersbergen, Floor Jansen et Marcela Bovio)
12. Ride The Comet (avec Magali Luyten et Jonas Renkse)
13. Star Of Sirrah (avec Hansi Kürsch, Mike Mills, Magali Luyten et Floor Jansen)
14. Comatose (avec Jonas Renkse et Anneke Van Giersbergen)
15. Day Sixteen : Loser (avec Mike Mills)
16. And The Druids Turn To Stone (avec Damian Wilson)
17. The Two Gates (avec John Jaycee Cujipers et Damian Wilson... présentation du groupe par Irene Jansen)
18. Into The Black Hole (avec Tommy Karevik)
19. Actual Fantasy (avec Edward Reekers)
20. Computer Eyes (avec Robert Soeterboek et Edward Reekers)
21. Magnetism (avec Marco Hietala, Tommy Karevik et Anneke Van Giersbergen)
22. Age Of Shadows (avec Marco Hietala, Hansi Kürsch et Floor Jansen)
23. Intergalatic Space Crusaders (avec Damian Wilson et Magali Luyten)
24. Collision (avec Marco Hietala et Tommy Karevik)
25. Everybody Dies (avec Mike Mills, Tommy Karevik, Hansi Kürsch, Magali Luyten et Floor Jansen)
26. The Castle Hall (avec Arjen Lucassen, Robert Soeterboek et Damian Wilson)
27. Amazing Flight (avec Jay Van Feggelen et Arjen Lucassen)
28. Day Eleven : Love (avec Edward Reekers, Marcela Bovio, Robert Soeterboek, Irene Jansen et Lisette Van Den Berg)
29. The Eye Of Ra (avec tous les vocalistes)