AkromA

Interview date

22 Mars 2014

Interviewer

fifi59

I N T E R V I E W

Interview Matthieu Morand (par mail)


Salut Matthieu, merci d'accorder cet entretien au webzine auxportesdumetal.com. Pour commencer, peux-tu nous présenter les membres du groupe ?

Matthieu Morand (guitares et orchestrations) : Alain et moi nous avons remanié le line-up après la sortie de Seth. Thomas Das Neves est désormais notre batteur. Je joue avec lui depuis pas mal de temps maintenant dans Symakya et aussi dans La Horde. C’est un excellent batteur qui sait parfaitement adapter son jeu aux ambiances d’AkromA. C’est très agréable de travailler avec lui car il visualise très vite où je veux en venir sur le plan rythmique et il sait respecter les quelques directives que je peux parfois imposer sur telle ou telle partie de batterie. A la basse, nous avons proposé à Pierre-Yves Martin de nous rejoindre. Je le connais depuis plus de quinze ans, il a joué dans pas mal de groupes de Nancy. C’est un super bassiste qui a un jeu très mélodique qui est très complémentaire de mon jeu de guitare. Ils apportent tous les deux un regard neuf sur le basse/batterie et ils ont eu toute la liberté pour développer tout ça ensemble. Pour le chant féminin, je savais exactement le type de voix que je voulais mais trouver la chanteuse n’a pas été facile. Cependant, par l’intermédiaire de Sophie Hervé qui est professeur de chant lyrique à Paris et une amie, j’ai pu rencontrer et entendre la soprano Laura Kimpe. Elle s’est très rapidement approprié son rôle dans le groupe et sa performance est remarquable sur « La Cène ». J’ai aussi fait appel à deux amies pour des interventions additionnelles d’instruments plus « classiques » à savoir Lorraine François à la harpe et Hélène Dautry au violoncelle. La compagne d’Alain, Sophie, est également venue en studio pour faire une intervention narrative. Enfin nous avons les douze « apôtres » qui sont douze chanteurs issus de la scène extrême française qui donnent la réplique à Alain et interprètent chacun un apôtre.

Quelles sont les origines d'AkromA et de son nom ?

J’ai formé ce groupe avec Alain en 2003, au hasard d’une rencontre. Il venait tout juste de quitter Scarve et n’avait pas trop envie de se lancer dans un autre projet. Je lui ai dit que le groupe serait uniquement un projet studio. J’avais besoin à ce moment-là d’écrire une musique assez extrême, ce que je ne pouvais pas alors me permettre dans Elvaron qui était alors mon groupe principal et avec lequel je faisais du metal progressif. AkromA est le nom d’une carte du célèbre jeu Magic The Gathering® ; c’est l’ange de la colère, créature légendaire de l’édition « Légions ».

Quelle est ta définition de la musique d'AkromA ?

Nous faisons du metal extrême symphonique, c'est-à-dire que c’est à la fois très violent et très orchestral.

En comptant "La Cène", AkromA a sorti trois albums liés à la religion. Pourrais-tu revenir sur les deux premiers ("Sept", "Seth") et nous parler de leur conception ?

Je tiens à préciser que nos albums ne sont pas vraiment liés à la religion mais plutôt qu’ils se basent sur des thématiques bibliques servant de base à nos scénarios. Quand nous avons formé AkromA en 2003 avec Alain, j’avais déjà le concept et les idées musicales de « Sept » et des sept péchés capitaux avant de commencer, donc je savais où je voulais aller. Puis, au fil des discussions, le concept s’est affiné sur sept titres de sept minutes dans sept tonalités différentes. Alain a pu ensuite travailler sur ses textes dès janvier 2004. Il nous fallait une histoire cohérente, une sorte de fil rouge pour faire du concept quelque chose d’intéressant. L’idée de l’avocat qui est confronté aux sept péchés capitaux nous a plu tout de suite. Quand est venu le moment d’enregistrer l’album définitif, je me suis dit que ça serait cool de faire venir des musiciens de metal français. J’ai contacté tout ce petit monde et les réactions ont été enthousiastes ! Au final, il y a eu dix-sept musiciens sur l’album, dont douze qui jouent dans des groupes de metal français. En octobre 2006, lorsque « Sept » est sorti, j’éprouvais le besoin d’écrire à nouveau. Cependant je tenais à faire un travail de fond sur la composition, j’ai donc préféré attendre qu’Alain ait terminé l’intégralité de ses textes pour commencer. Nous avons discuté du scénario, de la trame de l’histoire. Nous recherchions de nouveau un thème d’origine biblique, les dix plaies d’Egypte telles que décrites dans l’Exode nous paraissaient être un excellent concept. Nous avons extrapolé ce thème vers l’Egypte Ancienne puisque Alain est particulièrement fan de cette période. Ensuite nous nous sommes demandé, « quel est le Dieu égyptien qui aurait le plus envie de se venger du sort qui lui a été réservé ?» ; Seth est apparu un bon choix. Ca permettait de développer un concept avec tout un folklore propre à l’Egypte Ancienne avec une occurrence moderne, puisque Seth revient sur terre de nos jours. Le but était de rendre l’histoire plausible en se rapportant au maximum à des faits avérés, des personnages issus de la mythologie. Donc ça demande d’importantes recherches bibliographiques évidemment. De plus, le concept se déroule dans un cadre géographique et sociologique bien précis ; nous évoquons les corridas espagnoles, le chikungunya en Tanzanie ; l’histoire se déroule à Venise, New-York, Tokyo… Alain m’a proposé ses textes assez rapidement et j’ai pu composer. Nous avons étalé les enregistrements sur plusieurs mois car nos emplois du temps étaient chargés, j’étais moi-même en pleine promo pour « Gravitation Control System » d’Elvaron. J’ai alors contacté Flavien Morel de Benighted Soul qui m’avait scotché par son travail sur leur EP. Parallèlement j’attendais les prises de basse, les solos et le chant féminin et finalement « Seth » est paru fin 2009.

Venons-en à "La Cène", le nouvel opus que je trouve riche, prenant et qui s'avère en outre doté d'un excellent son. Je présume que vous êtes tous pleinement satisfaits de cet opus au sein d'AkromA ?

Merci, oui nous sommes vraiment très fiers du résultat, je pense que personnellement j’ai proposé avec « La Cène » mon travail le plus abouti à ce jour.

Quel a été le processus de composition pour "La Cène" (de l'origine du projet à la finalisation en passant par le choix des invités) ? Comment avez-vous bossé avec L’abbé Pierre Binsinger, le consultant théologien pour l'album ?

Nous avons commencé à travailler sur « La Cène » début 2010 et nous voulions développer un scénario autour des douze apôtres. Dans un souci de cohérence, il nous fallait avoir des informations précises pour notre concept. Pierre est un ami et il suit AkromA depuis le premier album. Il a accepté d’être consultant et donc de faire tout le travail de recherche sur les apôtres dans les évangiles. Il lui a donc fallu compiler, vérifier en fonction de notre cahier des charges : qui sont les douze apôtres, quels métiers exerçaient-ils, comment sont-ils morts ? Ensuite, comme pour « Seth », j’ai attendu d’avoir les textes d’Alain pour composer. Je peux ainsi restituer les ambiances induites par les paroles et adapter la musique et les nuances en fonction de ce qui se déroule dans l’histoire. C’est un travail passionnant et j’ai pu expérimenter beaucoup de choses au niveau des arrangements et des orchestrations. Le concept de « La Cène » impliquait d’avoir douze invités interprétant chacun un apôtre dans un titre de l’album. Il y a eu des choix assez évidents bien entendu, je pense à des chanteurs qui sont des amis ou des proches : Patrick de Mortuary, Frank de La Horde, Laurent de Deficiency, Manu d’Avalon. Nous avons par ailleurs contacté des chanteurs dont nous admirons et respectons le travail et enfin quelques-uns qui nous ont été chaudement recommandés pour rejoindre le projet.

Comment s'est déroulé l'enregistrement de "La Cène" ?

Ce fut un processus assez long étalé sur quatre années. Beaucoup de choses on été échangées par emails, d’autres se sont faites en studio, en home-studio ou dans des endroits un peu plus improbables ! Le challenge se déroule surtout durant le mixage car il faut que tout cela sonne de manière cohérente et je dois dire que je suis plutôt très fier du résultat. Les derniers mois ont été décisifs sur ce point et Pierre-Yves, notre bassiste, m’a assisté régulièrement durant le processus en apportant ses idées.

Que peux-tu nous dire sur l'artwork de "La Cène" ?

Florian, alias le Chromatorium, est extrêmement talentueux et visionnaire. Son travail sur la pochette et le livret est remarquable car il colle parfaitement à l’ambiance et au concept d’AkromA. Il est très réactif, il a toujours l’idée juste et je ne peux que le recommander chaleureusement à tous les groupes en recherche d’un graphiste sérieux et passionné.

Comment qualifierais-tu "La Cène" par rapport à ses prédécesseurs ?

Je pense que dans « La Cène » nous avons trouvé un juste équilibre entre la violence de « Seth » et la musicalité de « Sept ». C’est aussi une œuvre beaucoup plus symphonique.

Est-il envisageable de voir dans un avenir proche AkromA sur scène ?

AkromA est un groupe qui n’a pas pour vocation d’aller sur scène même si, paradoxalement, les propositions que nous recevons dans ce sens sont régulières et très intéressantes. Il n’est pas impossible de changer d’avis un jour...

Quel meilleur souvenir retiendrais-tu de la vie d'AkromA depuis sa création... et le pire ?

Le meilleur souvenir, sans doute lorsqu’Alain est venu chez moi pour la première séance d’enregistrement et qu’il a chanté les quatre premières phrases de « La Colère ». C’est à ce moment là qu’on a perçu qu’on tenait avec AkromA quelque chose d’assez unique. Le pire, c’est quand le label qui avait signé AkromA a fait faillite en 2010. Les albums sont sortis du circuit de distribution et n’étaient plus disponibles, notre stock a été revendu au plus offrant dans une vente aux enchères, les références ont disparu des plateformes comme Itunes… Heureusement, j’ai pu récupérer les droits avec Fantai’Zic en 2011 et les albums sont revenus dans le circuit numérique depuis.

Quels albums écoutes-tu en ce moment et lesquels conseillerais-tu ?

En ce moment j’écoute le dernier Dream Theater et le dernier Orphaned Land mais aussi pas mal de « vieux » trucs, principalement Iron Maiden et Rush, « Dusk » et « Cruelty » de Cradle of Filth… Je recommande chaudement toutes ces références !! Mais j’écoute énormément de musique, entre quatre et six albums par jour ; du metal principalement mais aussi pas mal de classique et de musiques de films.

Je te remercie pour cette interview et te laisse le mot de la fin !

Merci pour toutes tes excellentes questions et merci à tes lecteurs d’avoir parcouru ces lignes. J’espère vous avoir donné envie de jeter vos deux yeux et vos deux oreilles sur AkromA. A bientôt.


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