Groupe:

Soilwork

Date:

08 Février 2023

Interviewer:

Blaster Of Muppets

Interview Björn, Bastian, Sven, Simon et Rasmus

Salut et merci de répondre aux questions suivantes pour Aux Portes du Metal. Alors, quel effet cela fait d’être finalement de retour sur les routes (européennes) après la pandémie ? Il me semble que c'est votre première tournée européenne depuis 2019, non ?

Björn : C'est notre première tournée européenne complète, effectivement. Cela procure un sentiment étrange et en même temps, c'est comme si nous reprenions là où nous nous étions arrêtés... Quelque chose a changé, mais il est difficile de dire exactement de quoi il s'agit. Il y a quelque chose de différent.

Cette pandémie nous a tous affectés de différentes manières. Avez-vous l'impression d'être la même personne qu'avant ? Qu'est-ce qui a changé dans votre vie depuis cette crise ?

Björn : Sur le plan personnel, les choses ont changé, c'est sûr. J'ai changé un peu, tu vois... en trois ans, j'ai eu beaucoup de temps pour réfléchir et prendre du recul par rapport à certaines choses.

Rasmus : Oui, nous avons également notre vie quotidienne et même si j'aime beaucoup partir en tournée, j'apprécie un peu plus le quotidien maintenant. Ceci étant dit, j'avais aussi envie de reprendre la route, bien sûr...

Simon : Personnellement, j'avais hâte de reprendre la route, ça m'a vraiment manqué et je suis plus heureux maintenant. J'espère que ce sera encore mieux l'année prochaine.

Bastian : La première chose que nous avons faite après la pandémie a été de participer à des festivals, et à ce moment-là, j'ai eu l'impression de redécouvrir ces événements, car nous les attendions avec impatience. Je pense que cela a été plutôt positif de faire une pause pour apprécier davantage nos activités… J’ai pris certaines habitudes pendant cette pause et j’ai encore du mal à m’en débarrasser. Par exemple : lorsque nous montons sur scène, c'est généralement l'heure à laquelle je me couche ! (rires)

Björn : J’ai l’impression que ma relation avec le public a changé. C’est plus facile maintenant. Tout le monde est plus détendu, comme si on se disait : “ça fait plaisir de vous revoir!”… comme lorsqu’on retrouve un vieil ami.

Je me demandais si je pouvais vous parler de David Andersson ou si le sujet était trop délicat ?

Björn : Bien sûr, pas de problème.

Alors, quand David a commencé à travailler avec Soilwork, vous aviez une tâche difficile à accomplir, en termes de composition, puisque Peter Wichers ne faisait plus partie du groupe. Après quatre albums, un EP (et six albums avec The Night Flight Orchestra), comment décririez-vous son influence sur le groupe ?

Björn : Il a joué un rôle majeur, c'est certain. Peter a quitté le groupe pour la première fois quelque temps après "Stabbing The Drama" et nous avons fait des essais avec différents guitaristes, notamment avec David. C'était notre première rencontre. Malheureusement, à l'époque, nous ne sommes pas tous tombés d'accord pour le garder. Mais plus tard, Peter a quitté le groupe une deuxième fois et David est revenu. Je pense qu'il a apporté beaucoup de choses différentes et intéressantes sur le plan musical et c'est ce qui nous a permis de composer "The Living Infinite". La communication passait mieux, je crois. Le groupe était plus soudé. David a sa propre vision, sa propre façon de s'exprimer musicalement, mais malgré tout, la musique correspondait toujours au style de Soilwork. Une nouvelle ère a commencé à ce moment là, nous avons découvert une sorte de Soilwork 2.0... et ce double album était crucial pour nous. Quand on y pense, c’était une idée un peu folle d’enregistrer un double album mais c’était un vrai défi. Quelque chose de vraiment spécial s'est produit à ce moment-là et cela a continué pendant un certain temps.

Björn, tu as composé beaucoup de morceaux avec David, qu'as-tu appris pendant cette expérience ? Cette collaboration t'a-t-elle donné plus d'assurance en tant que compositeur (apparemment tu as composé davantage de morceaux tout seul sur "Övergivenheten") ?

Björn : Oui, il m'a vraiment donné envie de me remettre à la guitare... je n'ai jamais été un excellent guitariste, mais il m'a donné envie de m'y remettre, il m'a vraiment encouragé et cette expérience m'a beaucoup appris. Je pense que notre plus grand défi a été de composer "The Living Infinite" car ce projet a vraiment amélioré notre musique, elle est devenue plus riche, nous avons eu tellement plus de possibilités tout à coup... Cela nous a vraiment ouvert de nouvelles portes. Et ce changement a été principalement initié par David. Son influence m’a beaucoup inspiré et elle m’a incité à travailler différemment, en ce qui concerne les guitares mais aussi les voix ou les arrangements.

Évidemment, Soilwork existait bien avant l'arrivée de David, sa disparition n'allait donc pas empêcher le groupe de poursuivre sa route... Mais est-ce la même chose avec The Night Flight Orchestra ? Avez-vous envisagé un instant de mettre fin à cette aventure que vous aviez commencée avec lui ?

Björn : Évidemment, j'y ai beaucoup réfléchi. David s'était montré très créatif et très impliqué au sein de The Night Flight Orchestra, nous avons créé ce groupe ensemble et il composait tellement de morceaux... tu sais, il pouvait composer trois morceaux par jour ! Mais plus récemment, il ne participait plus vraiment aux autres activités du groupe et il jouait rarement avec nous, c'est devenu vraiment frustrant... il n'était vraiment pas en état de le faire et nous voulions passer à autre chose. C'était difficile. Je lui ai posé la question avant son décès et il m'a donné sa bénédiction, je n’en avais pas vraiment besoin mais cela m'a fait du bien car nous avions débuté ce projet ensemble et j'ai beaucoup appris grâce à lui. Il m'a dit "Bien sûr, vous devriez continuer" et je pense que son influence est toujours très présente dans la composition des morceaux. Et de toute façon, nous ne souhaitons pas mettre fin à ce projet car nous nous amusons trop. C'est également ce qu'il aurait voulu pour le groupe. Evidemment, le décès de David a été une épreuve très douloureuse. Je me suis demandé si cela en valait la peine de continuer sans lui... C’était vraiment dur.

Je me souviens avoir lu dans une interview que David avait composé beaucoup de morceaux pour votre dernier album (une trentaine)...Envisagez-vous d’utiliser ces titres à l’avenir ?

Bastian : Comme l'album "Övergivenheten" est assez long, nous avons fini par supprimer deux morceaux... nous avons donc deux morceaux aboutis, pour ainsi dire, mais je ne sais pas si nous allons les utiliser. Un jour, peut-être. Nous n'avons pas encore décidé ce que nous allons en faire.

Avez-vous déjà trouvé quelqu'un pour le remplacer en tant que second guitariste permanent dans le groupe ?

Bastian : En fait, oui. Nous avons Simon qui a joué avec nous lors de la plupart de nos concerts depuis la sortie de Verkligheten. Il s'en sort très bien et c'est le moment de faire une annonce pendant cette tournée... Alors voilà, c'est fait (rires). C'est un Suédois vraiment adorable (rires)...

Simon : Merci, mon chéri…

Rasmus : … et il a une barbe magnifique.

En ce qui concerne votre dernier album, il semble que vous vous soyez surpassés une fois de plus. Peu de groupes y parviennent : vous continuez à progresser et à vous améliorer après toutes ces années, au lieu de vous essouffler ou de stagner... Pensez-vous être sur le point d’atteindre votre zone de confort et d'y rester ?

Rasmus : Eh bien, c'est peut-être ça notre zone de confort, faire des choses un peu folles…

Björn : Oui, c’est exact.

Rasmus : Oui, personne n’a envie de faire toujours la même chose au sein du groupe.

Björn : Nous nous sentons à l’aise en procédant ainsi et nous avons également constaté que la plupart de nos fans aiment évoluer avec le groupe et qu'ils s'attendent à être surpris.

"The Living Infinite" fête ses dix ans cette année. Dix ans plus tard, que pensez-vous de ce double album audacieux et de sa capacité à résister à l'épreuve du temps ?

Björn : Je n'arrive pas à croire que cela fait déjà dix ans, c'est tout simplement insensé. Je pense que cet album résiste bien à l'épreuve du temps, il a de très bons morceaux et il dégage une atmosphère très particulière. C'est également un album très varié. C'est une expérience monumentale. Je n'arrive pas à croire que nous ayons réussi à la mener à bien. Comment avons-nous pu faire ça ? À mes yeux, cet album constitue une étape cruciale pour notre groupe. Pourtant, il est passé relativement inaperçu... Enfin, il a reçu d'excellentes critiques, mais j'ai l'impression que les gens ne l'ont pas remarqué... Je ne sais pas pourquoi. J'ai l'impression que cet album est devenu plus culte/classique dix ans après sa sortie, en tout cas, c'est ce que je ressens. À l'époque, je me disais " ça y est, c’est l’album parfait " et j'en suis toujours très fier. J'étais tellement fier, je me disais "cet opus va révolutionner le metal" (rires)... Mais les gens ne s’y sont pas vraiment intéressés, donc j'étais un peu déçu. Je suis encore étonné qu'il n'ait pas eu plus d'impact à l'époque...

Et juste après cet album, vous avez enregistré votre premier album live... Étant donné que vous avez enregistré des albums remarquables (et une énorme quantité de bons morceaux) par la suite, ne pensez-vous pas qu'il serait temps de sortir un deuxième album live ?

Björn : Eh bien, je ne sais pas... Personnellement, je ne suis pas vraiment fan des albums live dans le domaine du metal extrême, même si notre musique n'est pas si extrême... Enfin, ça pourrait être sympa, je suppose... Mais ce n’est pas vraiment ce qui m’intéresse lorsque j’écoute du metal extrême, je ne m’intéresse pas aux albums live. J'aime beaucoup les enregistrements live de heavy metal classique, notamment ceux de Saxon, ce genre de groupes, c'est totalement différent... Mais en ce qui concerne le metal extrême, je ne sais pas... En réalité, les albums live les plus réussis sont ultra-modifiés et ça ne me plaît pas non plus. Les fans méritent un album live, évidemment, mais avant tout, il faut que ce projet intéresse le groupe. Je ne sais pas ce que les autres en pensent... C'est peut-être à cause de notre premier album live, car je ne l'ai pas trouvé si réussi.

Sven : Oui, ça va... On peut faire mieux. C'était notre premier album live...

Simon : Moi, je peux donner un avis extérieur et cet album m’a beaucoup plu.

Sven : Eh bien oui, mais au sein du groupe, nous nous montrons toujours beaucoup plus critiques...

Björn, ton chant s'est amélioré au fil des ans et tes performances s’avèrent vraiment impressionnantes sur "Övergivenheten". Est-ce que tu as beaucoup travaillé ou est-ce que cette progression s’est faite tout naturellement ? Penses-tu avoir atteint le summum de tes capacités à l'heure actuelle ou penses-tu pouvoir continuer à t'améliorer ?

Björn : Eh bien, je chante très souvent, tous les jours en fait ! Comme tu le sais, j'ai participé à plusieurs sessions par-ci par-là, j'ai participé à plusieurs projets en tant qu’invité, dans différents genres musicaux, notamment avec The Night Flight Orchestra. J'ai beaucoup sollicité mes cordes vocales, je suis sorti de ma zone de confort... C'est également grâce à David, tu sais. Il a écrit beaucoup de lignes de chant pour ses morceaux, certaines ont été modifiées mais d'autres non... et je dois dire que certaines de ces lignes auraient été complètement différentes si c’était moi qui les avait écrites. Et cela m'a aussi permis de progresser en tant que chanteur. J'espère que je n'ai pas atteint mon apogée, je m'épanouis peut-être sur le tard (rires) car il m'a fallu du temps pour apprécier mon chant. Certaines personnes aiment beaucoup mes premiers travaux, notamment ceux de l’album "A Predator's Portrait" par exemple, mais j'ai plus de mal. Pourtant, j'adore cet album, mais le chant clair, bof... Mais je n'étais pas très sûr de moi à l'époque. J'ai l'impression de m'améliorer chaque année, mais je ne sais pas combien de temps cela va durer, alors il faut toucher du bois (il frappe sur la table en bois)... Jusqu'à présent, ça va... Je suis très heureux que ma voix continue de s'améliorer. Je pense que mes cordes vocales peuvent supporter beaucoup de choses parce que j'ai participé à de nombreuses tournées et elles sont habituées à toutes sortes de conditions, de climats et de températures. À une certaine époque, je buvais toute la nuit et je continuais à chanter, mais je ne le fais plus, alors je pense que je prends un peu plus soin de ma voix. Mais je n'ai pas vraiment de rituels spécifiques. J'aime faire de nouvelles expériences, je m'entraîne beaucoup et je pense que cela a rendu ma voix plus puissante.

Rasmus, tu es devenu le bassiste officiel de Soilwork l'année dernière mais tu as également remplacé David à la guitare lors de la récente tournée avec NFO... J'ai entendu dire que NFO a récemment organisé une session studio. As-tu participé au processus de composition ? Comment as-tu contribué à ce projet en tant que guitariste ?

Rasmus : Je pense que tout le monde contribue au projet lorsqu’on est en studio et qu’on travaille sur des morceaux. J'ai mon propre style en tant que guitariste, je ne joue pas exactement comme David, donc j'ai contribué au projet grâce à ma personnalité. C'était une expérience marquante pour moi... Je me suis chié dessus avant cette session (rires), c'était un évènement majeur.

Björn : C'était génial. Tu as joué exactement ce que j’imaginais, c'était tout simplement génial. Vraiment super.

Comme certains morceaux de Soilwork sont plus mélodiques et sonnent comme des "hits" ces derniers temps, certaines personnes affirment que cette évolution est due à l'influence de votre autre groupe, NFO. Est-ce que vous ressentez la même chose ? Pensez-vous que les deux groupes s'influencent mutuellement ?

Björn : Non, pas vraiment. Enfin, pour moi, c'est totalement différent. Je pense que les deux styles ont commencé à se croiser un peu à cause de l’influence de David. Personnellement, lorsque je compose des morceaux, je porte deux casquettes différentes. Évidemment, on retrouve une certain sens de la mélodie de temps en temps, mais Soilwork a toujours été un groupe très mélodique, que ce soit au niveau des guitares, du chant... Cette particularité existait bien avant Night Flight Orchestra. Il est vrai que David ne portait pas toujours deux casquettes et parfois, lorsqu'il composait un riff ou autre chose, cette partie pouvait être utilisée par les deux groupes... et je ne dis pas que c'est une mauvaise chose. Mais j'ai toujours voulu que ces deux groupes soient très différents car je les considère comme deux projets opposés et je ne veux pas que cela change.

Quels sont vos projets à venir pour Soilwork et NFO ? Quels sont vos autres projets éventuels ?

Bastian : Eh bien, cette année, nous avons cette tournée, quelques festivals... nous voulons promouvoir cet album dans différents pays. Nous sommes en train de nous organiser pour donner plusieurs concerts en Suède à l'automne et, avec un peu de chance, nous pourrons également donner plusieurs concerts au Royaume-Uni. Ce n’est pas facile d’organiser tout ça avec tous les albums qui sortent chaque semaine, toutes les tournées qui ont été reportées... la situation post-pandémique complique un peu les choses.

Rasmus : Nous voulons vraiment permettre au plus grand nombre de personnes possible de découvrir "Övergivenheten" et nous voulons également que le public écoute nos morceaux en version live pendant nos concerts, c'est notre priorité. Nous adorons jouer nos nouveaux morceaux sur scène. Ils sonnent vraiment bien en live.

La question que vous auriez aimé que je pose mais que je n'ai pas pu trouver :

Rasmus : J'aurais aimé que tu t’intéresses aux talents de guitariste de Björn car je le trouve vraiment génial…

Simon : Oui, je me suis occupé des enregistrements... pour l'album de Donna Cannone où il joue de la guitare et je suis d'accord.

Björn : Eh bien, merci (sourire). Un autre projet sympa...

De quoi s'agit-il exactement ? Je ne crois pas en avoir entendu parler…

Björn : C'est un groupe dont je fais partie avec ma femme. Le style est plutôt punk, rock... on retrouve également un peu l’influence de The Cult. Et je joue de la guitare pour changer... Tu devrais l'écouter, il est vraiment sympa.

Simon : Il a été enregistré dans mon studio, nous avons tout fait sur place. C'était cool.

Quelques mots pour conclure cette interview, si vous avez quelque chose à ajouter, n'hésitez pas :

Björn : Eh bien, nous tenons à remercier tous nos fans pour leur soutien. Comme nous l’avons dit, ils acceptent les changements que nous apportons à notre musique et cela compte beaucoup pour nous, alors merci.

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