Groupe:

The Young Gods

Date:

23 Juin 2019

Interviewer:

dominique

Interview Franz, Cesare & Bernard

Salut, je suis Dominique et je représente le webzine AuxPortesDuMetal. Merci de prendre le temps pour cette interview. Pour nos plus jeunes lecteurs, The Young Gods, c’est qui, c’est quoi ?

Franz : C’est une histoire qui à 34 ans… C’est un groupe genevois-fribourgeois. A la base, c’est Cesare et moi ; et puis ensuite ça a été à géométrie variable avec des membres qui ont fait quelques années, qui sont partis et parfois qui sont revenus. Pour la formation actuelle, en plus de moi qui suis là depuis le début, il y a Bernard qui a rejoint la bande il y a vingt ans et Cesare qui est revenu il y a un peu plus de cinq ans. C’est un peu compliqué, mais en général c’est resté un power-trio qui fait du rock mais avec des instruments électroniques. A la base, c'était pour savoir si on peut, et comment, amener l’électronique dans le rock. Donc c’est issu du sampling, avec par-dessus une voix et une batterie. Avec le temps, ça a un peu évolué ; maintenant, par exemple, on a aussi de la guitare en live. Mais en gros, la base reste la même.

Et la re-fusion d’un groupe, avec un line-up qui change et des personnes comme Cesare qui reviennent, c’est simple à gérer ?

Franz : Ce n’est pas toujours simple. Par exemple, Bernard a dû apprendre des vieux titres auxquels il n’avait pas participé ou qu’il n’avait pas co-composé. Ce qui est important dans notre histoire, c’est qu’elle est basée sur des rencontres. On n’a jamais forcé quelqu’un. Bernard a toujours été proche du groupe. Au début, c’est lui qui s’occupait du son, qui nous prêtait son local de répète, et même qui nous laissait son sampler pour les concerts live! Donc quand Üse (nd: le précédent batteur) est parti, ça a été naturel qu’il rejoigne le groupe. Même chose pour Cesare ; quand on s’est séparé d’Al Comet (nb: le précédent clavier), il était là. Il avait eu vingt ans hors du groupe et il voulait simplement refaire de la musique. On ne s’est jamais battu pour que le groupe existe, c’est surtout une histoire d’amitié.

Depuis "Everybody Knows", cela a été une longue pause, pourquoi ?

Franz : A cause des départs justement. L'album est sorti fin 2010, on a tourné jusqu’en 2011 et là, il y a eu séparation. Al Comet est parti en Inde, il avait besoin de faire autre chose ; tout comme Vincent Hänni (nb: autre ancien clavier/guitariste). Donc on s’est retrouvé Bernard et moi, en se demandant ce que l’on voulait. C’est là que l’on a demandé à Cesare, ça s’est passé comme ça.

Bernard : Ouais, on a simplement pris le temps que cela arrive. Au lieu de se forcer, de vouloir absolument trouver un pro des claviers qui puisse prendre la suite. On a simplement pris le temps, on s’est remis en question. On ne voulait pas forcément trouver un autre son.

Franz : Quand Cesare est revenu, on a joué pendant deux ans sur les albums passés, et puis on s’est dit qu’il fallait qu’on fasse quelque chose de neuf pour que le groupe existe. Du coup on a accepté des trucs un peu différents, notamment le Cully Jazz Festival où on nous a proposé une résidence ; c'est la source du nouvel album.

Ça tombe bien, on va parler du dernier, "Data Mirage Tangram". Il est sensiblement différent des deux précédents LP. C’est quoi le processus de création pour un album comme celui-ci ?

Franz : Il est issu d’un processus de composition qui est à la base des jam-sessions au Cully Jazz, qu’on a fait en live dans un tout petit caveau devant 80 personnes pour environ trois heures de set chaque soir. Il s'est développé live, avec des titres qui s’allongeaient, en expérimentant. On a voulu garder cet esprit-là pour l’album.

Du coup, vous le percevez comme une continuité par rapport à ce qui était fait avant ?

Franz : Il a permis d’exploiter un côté des Young Gods qui existait déjà dans les années 90, avec des titres plus psychés, plus longs. "Data Mirage" prend cette couleur là et il la développe plus que d’habitude. Ce n’est pas absolument différent.

Bernard : En fait sur scène, moi je ressens la différence plus dans une espèce de liberté d’interprétation que ce que je peux avoir sur d’autres titres plus anciens. Ça ne veut pas dire que c’est du free-jazz, loin de là ; mais la bascule est différente. On interprète plus la musique qu’on ne la rend fidèlement. Et c’est dès le départ que cela s’est passé comme ça ; la manière dont elle a été créée fait qu’on a cette liberté d’interprétation de la musique.

Et donc ce soir, vous allez jouer un set basé sur "Data Mirage" ?

Franz : Oui, mais on a quand même évité des trucs trop abstraits... C’est un set un peu mélangé avec deux ou trois clins d’œil au passé. Mais il reste les deux-tiers de "Data Mirage". On y va franco, tu vois, après tout c’est ça que l’on fait maintenant.

Et vous pensez que "Data Mirage" peut être joué au Hellfest ?

Franz : Qa on verra bien, mais on a confiance envers le public

Ce n’est pas votre première fois au Hellfest, non ?

Franz : C’est la troisième fois que nous sommes invités. On était venu en 2010, et là la sono avait sauté après vingt minutes de concert. Donc le festival nous a réinvités en 2011, pour "Everybody Knows". Donc c’est la troisième visite.

Vous avez trouvé le festival changé ?

Bernard : Il est plus gros, même s’il y avait déjà les deux mainstages à l’époque. Ça prend une dimension incroyable. Tu vois comme on en entend parler. Tu mets les infos à la télé et tu sais que le Hellfest a commencé.

Et pour vous, pour un groupe comme les Young Gods, c’est important de venir jouer ici ?

Franz : Eh bien déjà, ça veut dire que l’on est encore accepté par la tribu metal, c’est cool ! On fait donc encore parties des OVNI qui viennent au Hellfest et moi je trouve ça excellent !

Les Young Gods est un « vieux groupe ». Comment avez-vous vécu l’évolution de la musique et de ses vecteurs entre 1985 et aujourd’hui ?

Franz : Il y eu clairement une explosion de la musique. A l’époque, en Suisse, on avait des clubs sauvages, et on se battait pour que Frisson Fribourg, l’Usine à Genève ou la Rote Fabrik à Zurich existent. A partir du moment où ces lieux ont existé, la scène musicale a simplement explosé en qualité et en quantité. Après si tu veux parler de la diffusion de la musique avec les nouvelles technologies, les choses sont très différentes. L’industrie essaie de faire croire aux gens, aux jeunes surtout, que la musique est gratuite ; alors qu’elle ne l’est pas. Après, les amoureux de la musique existent toujours, et ils continuent à acheter des albums et à les écouter. Nous, on a nous a dit qu’un album c’est obsolète, qu’il faut juste faire trois titres parce que c’est la tendance. C’est un dictat complètement faux ! Tu dois faire les trucs que tu aimes et ne pas prendre les gens, surtouts les jeunes, pour des cons. Ils sont bien plus au courant, grâce aux nouvelles technologies justement, de ce qui se passe. Moi le seul truc qui m’embêterait, c’est que le CD disparaisse. Parce que c’est quand même un bien matériel que tu peux toucher…

Bernard : Oui, le format album et CD ça a l’avantage d’être un tout. Ça a un début et une fin et ça raconte quelque chose. Nous, avec "Data Mirage", on a fait un album avec un choix de l’ordre des titres, même si les titres ont été créés individuellement. Un album c’est un voyage qui t’amène quelque part. Si tu fais les choses à ta manière, les gens s’arrêtent ou pas ; mais si tu veux juste plaire, tu ne fais que courir après le public.

Merci pour votre temps, je ne sais pas si vous connaissez notre webzine, mais je vous laisse dire le mot de la fin :

Bernard : En fait on connait le webzine, on y a lu des trucs, des reviews notamment. C’est un peu plus diversifié que d'autres, un peu comme ici. Tu peux y croiser Magma l’an passé et les Young Gods cette année, des trucs qui ne font pas forcément partie du noyau dur du metal. Le webzine représente bien cette émulation…

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