La Voix du Rock : Jour 2

K-poral Blutch :
 
Je ne reviendrai pas sur la difficulté à ouvrir une journée de festival, mais c’est le défi qui attend les poitevins de K-poral Blutch aujourd’hui. Défi d’autant plus grand que le groupe vit sa première expérience en festival, et que l’on sent une forme de stress au début du set. Et histoire d’en rajouter une dernière couche, le groupe ouvre une scène qui sera à thématique féminine, encore bien trop peu représentée dans le petit monde du Metôl ! Le quintet est composé de Meli au chant, de Daniella à la basse, et de Nico à la guitare, de Nick au clavier et de Max à la batterie.

Musicalement, le groupe se situe à la frontière entre le rock et le Metal, avec un chant aussi bien rappé que chanté, avec des effets de profondeur sur la voix. La base rythmique est solide, et c’est souvent le clavier qui rajoute de la mélodie sur une base assez directe. Au niveau des textes, le crédo de Méli, c’est de continuer à alerter les consciences sur la condition féminine, ce qui est totalement adapté à la thématique de la scène.
 
Le groupe se détend au fur et à mesure que la prestation scénique monte en puissance. Le titre Nous Sommes Légion est un morceau qui tient particulièrement bien la route, avec un riff principal dynamique, et entre les deux ça groove bien. La montée en puissance se fait tout au long du set, et finit en feu d’artifice. Finalement, le groupe est ravi de cette première expérience, et le public leur aura rendu toute leur énergie. What else ?

Darcy :
 
Autre groupe qui a connu sa première expérience scénique ici, les Rennais de Darcy. Et autant vous dire qu’ils sont très attendus, car le public se masse devant la scène bien avant le début de leur set. Et d’entrée de jeu, on comprend pourquoi, car Darcy, c’est avant tout un groupe de scène, qui fédère et transmet son énergie inépuisable pendant l’ensemble du show. Car oui c’est un show, à l’ancienne, tout basé sur l’envie de partager un moment presque en « famille », comme aime à le dire Irvin. Dès le début de l’excellent Cuidado, l'effet sur le public est immédiat, il ne lui faut pas bien longtemps pour se laisser emmener, entre les pogos et les slams, on peut dire que ça remue déjà sévèrement dans le pit.

 
Darcy c’est le chant de la colère et on connait sa cible principale, la famille LP, mais également les choix politiques très discutables en ce moment... Irvin nous demande à ce que : « Personne ne garde son calme », sur leur seul morceau de Metal de leur répertoire : L’étincelle au Brasier. Il ne manquait qu’un verre à partager qui sera ouvert par un yec'hed mat (santé en breton) collectif et un magnifique enchaînement sur un des tubes des Garçons Bouchers La Bière, et le show est complet. La prestation de Darcy aura été faite dans l’engagement, les sourires, et la fureur, sacré groupe de scène…

Madam :
 
Et voilà la découverte du jour ! Madam c’est : « "On aime le fait que les gens viennent voir un groupe dont ils n'ont jamais entendu parler, et repartent en nous disant qu'ils ne s'attendaient pas à se prendre autant d'énergie dans la gueule. On aime ce qu'on fait, et on le fait avec nos putains de tripes. Ce qu'on veut, c'est que les gens sentent ça, et qu'ils voient le plaisir qu'on a à monter sur scène, à ressortir moites de sueur, la bouche pâteuse, avec une seule envie : recommencer..."

 Il va être difficile de faire un meilleur résumé que cela. Madam aura distribué de la fessée à qui en veut. Nous touchons ici à l’essence du rock, déjà rien que par sa composition, Gabbie Burns à la guitare et au chant, Marine Masachs à la basse et Anaïs Belmonte à la batterie, mais également par l’énergie à transmettre, elles peuvent donner des leçons scéniques à n’importe quel groupe !

Et même si la musique proposée par les trois jeunes filles est directe, va droit au but, parfois sans fioriture, elle est surtout diablement efficace. Je pense à Motorhead, bien entendu, mais aussi aux Fallen Lillies, qui étaient à cette même place l’année dernière. Le rythme est bondissant, sans concession, intense, et qu’est-ce que c’est bon ! Merci !

Mass Hysteria :
 
En introduction, je vais vous faire partager mon inquiétude avant que la Mass investit la scène. Je fais certainement partie des quelques sceptiques face à Tenace. Cet album sera en deux parties, déjà je ne trouve pas que cette tendance non spécifique à la Mass soit intéressante, et pour cette première nous présente sept titres (un LP non ?), pas tous inoubliables, pour un tarif discutable surtout en vinyle… Je crains que cette tendance ne devienne la norme, et au final que nous ayons des chutes de studio pour remplir deux volumes. MH suit une direction impulsée outre-Atlantique, qui me laisse craindre un peu moins de qualité et plus de quantité, on verra…
 
Bref, voyons ce que ça donne sur scène. Même avant que le groupe n’investisse les lieux, il y a une mise en scène assez atypique. Raphaël derrière ses fûts se retrouve en hauteur, en avec deux plateformes accessibles par un escalier de chaque côté sur lesquels trônent un M à gauche et un H à droite. Yann et Fred, les deux guitaristes en chef, ou encore Jamie derrière sa basse, iront y faire régulièrement un tour. J’en profite pour souligner la qualité du ligthshow qui mettra aussi bien le décor, que le groupe en valeur. MH a mis les petits plats dans les grands et compte bien nous en mettre plein les mirettes.

Et bien sûr, plein les oreilles… La playlist est de très bon aloi, et il faut bien avouer qu’avec trente années de carrière au compteur, la Mass peut se targuer d’avoir quelques très belles réussites.
Le groupe débute avec un extrait du petit dernier Mass Veritas, qui fonctionne finalement mieux sur scène. Il vient ensuite le best of de la Mass, Positif à Bloc, Chien de la Casse, l’explosif Reprendre mes Esprits, la fin apocalyptique de Tout est Poison, l’hymne L’Enfer des Dieux, l’emblématique Plus que du Metal, les très dansants Contradiction et Furia, la Mass enchaîne son best of à vitesse grand V et avec une conviction qui force le respect.
 
Mouss derrière son micro conserve cette forme de poésie naïve, et possède tout de même un sacré répertoire de punchline. Il remercie chaleureusement le public d’être devant un spectacle vivant, et non pas devant un écran, et loue cette communion qui nous file des frissons, et là-dessus il est difficile de lui donner tort. Oui, il est toujours possible de mettre des bémols à Mass Hysteria, mais il est difficile de leur enlever leurs impressionnantes prestations scéniques. Chapeau bas.

Foxy Ladies :
 
Qu’il peut être difficile pour un groupe de passer après une telle prestation, sauf que là ce n’est pas n’importe quelle groupe, puisque que ce sont les Foxy Ladies qui se présentent sur scène, et elles sont prêtes à en découdre. Certes, le style est différent car leur répertoire est bien moins Metal et plus rock, mais l’énergie est identique et nous allons prendre une sacrée dose de Rock’n Roll.

 Le clin d’œil à Hendrix est évident, mais leur rock incisif, musicalement le groupe oscille entre le punk, le grunge et d’une dose de Metal, et surtout prend une tout autre dimension sur scène.  Le groupe a décidé de souligner son regard avec une peinture noire du plus bel effet, et Gabi est une frontwoman qui sait y faire. Elle pose et interprète ses paroles sur des temps calmes, naviguant entre tendresse et folie, fait ensuite monter la pression, jusqu’à une explosion totale d’énergie. Elle vit ses paroles à fond, ici, on ne joue pas, on vit.
 
Les Foxy Ladies nous ont délivré une prestation on ne peut plus vivante, chargée en émotion et en puissance. L’inarrêtable Gabi propose même de remplacer la traditionnelle photo de fin de concert face public, par une photo du groupe en plein slam dans le public, une initiative à l’image du groupe inattendue et sauvage !

Tagada Jones :
 
Nous arrivons en fin de journée, et le public trépigne d’impatience en reprenant, avant même que les Tagadas entrent sur scène, le gimmick musical de Mort Aux Cons. Vous dire que le groupe est attendu est donc inutile ! Le site est encore bien rempli, et le public chaud comme la braise. Tout comme la Mass, Tagada soigne sa mise en scène avec six bidons en arrière-plan qui avec une lumière adaptée donne la sensation d’être en feu. Le groupe ouvre sur le bien nommé Le Dernier Baril qui met tout de suite le feu, l’ensemble est visuellement très sympa.
 
Difficile de vous donner un chiffre précis du nombre de fois où je les ai vus sur scène, mais ce soir je les trouve particulièrement en forme, Niko est comme à son habitude remontée comme une pendule et éructe ses paroles avec toujours autant de conviction, La Guiche c’est l’efficacité à l’état brute, Job le fait toujours aussi bien (je n’aimerai pas être sa caisse claire…) et l’intenable Waner virevolte avec sa basse comme un beau diable !

 Il y a toujours quelques rituels chez les Tagadas, par exemple Niko transmet sa guitare à Waner sur De Rires et De Larmes, ce titre en réaction au confinement est l’occasion pour Niko de faire le tour de la scène en long et en large. Attendu comme le loup blanc, Mort aux Cons sera un vrai temps fort du concert... (Est-ce qu’il y a eu des temps faibles au final…) Et forcément un show des Tagadas sans une pensée à Parabellum, ne serait pas un vrai concert des Tagadas. Les Enfants de Cayenne prennent place, et il ne faut pas attendre bien longtemps avec que Jamie de la Mass, ainsi qu’Irvin et Clément Darcy viennent chanter l’emblématique refrain de cet hymne. Les Tagadas Jones ont conclu tout en bonne humeur cette seconde journée d’un festival qui a tenu toutes ses promesses.

Un grand merci à l’association Vox Populi qui nous a permis de vivre deux jours exceptionnels. Une pensée aux bénévoles qui se sont démenés comme des dingues avant, (repas, tombola…) pendant le festival (buvette, accueil) et certainement après pour continuer à faire vivre un événement dans un lieu tellement atypique. Un grand merci à Sylvia également pour nous avoir permis d’assister à cet événement.