Avant-propos : si vous détestez fondamentalement ce disque, n’ayez tout de même pas envie de me tuer suite à ma provocatrice mention "coup de cœur", que j’assume totalement :)

Slipknot et moi, en théorie, ça fait deux. Enfin, je devrais plutôt dire que ça fait dix, vu qu’ils sont neuf. Faut dire que ça commençait très mal : je me souviens encore de la fois où j’ai essayé d’écouter leur premier album, quelle crise de rire. C’était, à mes oreilles, du grand n’importe quoi, du bruit pour faire du bruit, aucun intérêt. Mais le groupe avait une sacrée réputation, notamment sur scène, alors ça m’embêtait un peu de passer totalement à côté... Et puis j’ai commencé à entendre Corey Taylor chanter, à droite à gauche. Sacré p..... de chanteur, l’un des meilleurs de sa génération, capable de chanter du Dio sans s’y casser les dents.

Et puis, il y a eu Guitar Hero. Rigole, rigole, ami lecteur, mais combien de hardos dans notre genre ont découvert des groupes, des chansons et même le genre entier en faisant des soirées console/bière entre potes ? GH, donc, où je m’étais amusé à faire toutes les chansons de tous les jeux avec un pote. Et là, arrive Psychosocial, de Slipknot. Vu mon passif avec le groupe, je souffle fort : "oh, nan, on va se faire ch*er, passe-moi une bière". Sauf que non. Enfin si, il m’a passé une bière. Mais on ne s’est pas fait ch*er : j’ai découvert une autre facette de Slipknot, bien plus à mon goût. Bourriner tout le temps n’a aucun intérêt. Par contre, créer un contraste entre les phases purement brutales et les phases plus aérées, plus mélodiques, ça ne fait que renforcer la violence du reste. Mince alors, j’ai bien aimé du Slipknot ?!

Du coup, j’ai réessayé le premier et Iowa, et non, toujours pas. Mais le reste passait mieux, sans totalement me convaincre. J’ai essayé Stone Sour, aussi, qui m’a un peu laissé de marbre. Et puis... 2019, We Are Not Your Kind. Attiré par la superbe pochette, je me suis laissé tenter. Et mince alors, j’ai vraiment aimé du Slipknot ! L’enchaînement Spiders/The Orphan m’a fait péter des plombs à chaque écoute ! Et l’album d’avant n’a pas tardé à le rejoindre sur l’étagère. Alors, contre toute attente, je me suis mis à attendre avec impatience ce nouvel album...

Les deux premiers titres révélés, donc The Chapeltown Rag et The Dying Song m’ont tout de suite plu, si bien que je n’ai même pas pris la peine d’écouter le troisième (Yen) avant la sortie de l’album. Deux titres bourrins mais avec pas mal de passages mélodiques, ou l’inverse. Et avec du refrain à chanter. Sans parler des interviews des gars, qui promettaient un album assez particulier et déstabilisant pour les fans. Cool, je n’en demandais pas moins. Bon, petite réserve sur la pochette, quand même, un peu décevante, surtout par rapport à celle de l’album précédent.

Et autant dire que la déstabilisation, elle n’aura pas mis longtemps à arriver. En effet, dès le premier titre, pas la moindre intro bourrine, pas un riff qui te pète la gueule, pas de hurlement bestial. Non. Juste une petite chanson aérienne, avec Corey qui chante doucement. Un truc planant, très, très Bowie. Wow. Chui déjà conquis et il me reste onze titres à écouter. Ah ouais, tiens, aparté : Slipknot fait toujours des albums bien trop longs pour moi, autour d’une heure, entre douze et quinze titres. Même sur les albums que j’aime, je trouve ça un poil trop. Spoiler : pas cette fois.

Le reste de l’album ne sera, heureusement diront certains, pas aussi "étrange". Seul le dernier titre, au nom très recherché -Finale- sera aussi en décalage par rapport au style habituel du groupe. Pour le reste, vous prenez We Are Not Your Kind, vous poussez l’audace et l’expérimentation encore plus loin, vous montez la qualité de compo, de chant et de mélodies de pas mal de crans et PAF, ça fait The End, So Far ! Comment ? De la mélodie, vous dites ? Comment osez-vous ?! Eh ouais, à part peut-être H377, qui doit récupérer les fans de la première heure en étant tout bourrin, tout méchant, tout Corey-qui-gueule après Acidic et Heirloom qui ont dû sacrément bien les énerver, chaque titre a sa grosse accroche mélodique, souvent un refrain très accrocheur, chant clair, après un couplet souvent un peu vénère. Basiquement, les deux singles sont exactement dans ce moule.

Mais on n’a pas que ça. On a des trucs encore plus énervants, pour les fans de la première heure. Notez, cela dit, que même si je me moque un peu, avec gentillesse, promis, je comprends tout à fait leur désarroi : l’album est très différent de ce qu’ils ont pu aimer il y a vingt ans. Les gars du groupe ont, forcément, défendu leur démarche en interview, déclarant notamment : "Le problème lorsqu’on écrit l’un des albums les plus lourds de tous les temps, c’est que les gens s’attendent à ce qu’on refasse toujours la même chose. Sauf que non, putain, c’est tellement ennuyeux". Cela dit, je m’insurge : râler parce que le groupe change est une chose. Mais décréter que l’album est nul parce que le style n’est pas le même, c’est, selon moi, dommage et un peu bête. Si l’album avait été mauvais, je ne dis pas, mais il ne l’est pas ! Comme je le dis toujours, en parlant de Metallica : "le problème de Load, c’est pas de ne plus être du metal, c’est d’être nul". Bien sûr, si The End, So Far ne vous plaît pas, je ne vous force pas à l’aimer. Et, bien sûr, c’est facile à dire pour moi, je n’ai pas d’affect particulier envers le groupe et j’ai adoré l’album...

Je m’égare, revenons aux trucs "plus énervants", comme je le disais avant de digresser. J’ai déjà cité l’enchaînement Acidic/Heirloom, un mid-tempo très mélodique et un gros tube très metal moderne, presque Arch Enemy-ien dans l’instru, mais sans le chant hurlé. Mais un titre comme De Sade, pas très loin d’Avenged Sevenfold dans l’idée, ou Medicine For The Dead, plus lent et rampant, un peu à la Manson, ça doit faire grincer des dents. Certainement pas les miennes, en tout cas. Dans un autre registre, Warranty est assez thrash dans son approche, un peu hardcore : pas exactement ce qu’on attend des neuf masqués. Mais ça bourrine un peu, donc ça va. Cela dit, bizarrement, ces titres plus "polémiques" se trouvent plutôt sur la deuxième moitié de l’album, seulement pour ceux qui sont allés jusque là. Les bons titres, ça se mérite, m..... ! Contre-exemple cela dit : Yen, le fameux troisième single que je n’avais pas écouté. Eh ben j’aurais dû, parce que c’est une des meilleurs titres de l’album.

Mais trêve de palabres, j’ai déjà bien trop parlé. De toute manière, l’album étant sorti depuis déjà plusieurs semaines, ceux qui sont ici pour me lire l’ont écouté pas mal de fois, donc l’aiment déjà. Et ceux qui l’ont détesté ont eu soit le temps de le réévaluer, soit décidé de ne plus en entendre parler. Donc je pense que je m’adresse à ceux qui savent. The End, So Far est un excellent album, qui a d’ores et déjà sa place dans mon top 10 de l’année, voire mon top 5. Plutôt le top 5, d’ailleurs. Il tourne en boucle depuis sa sortie, je ne m’en lasse pas, je le redécouvre à chaque écoute. Pas un seul titre est moins que bon, tout me plaît (sauf la pochette), les refrains sont canons, ça riff, les mélodies sont en or massif, y’a du super taf sur les samples et les effets du DJ... et Corey Taylor est au sommet de son art. Après avoir réécouté toute la disco, je peux le dire sans aucun problème : en ce qui me concerne, The End, So Far est tout simplement le meilleur album de Slipknot et l’un des meilleurs albums de metal de l’année. Et, pour être honnête, je suis triste pour ceux qui n’auront pas le bonheur de l’aimer autant que moi... Écoutez-le, réécoutez-le. Vraiment. J’avais conclu ma chro du dernier album en date de Kvelertak par cette phrase : "Parce que voilà, pour votre humble serviteur, ce que le metal doit être en 2020." Oubliez. Le metal, en 2022, ça doit être The End, So Far.

Tracklist de The End, So Far :

01. Adderall
02. The Dying Song (Time To Sing)
03. The Chapeltown Rag
04. Yen
05. Hive Mind
06. Warranty
07. Medicine For The Dead
08. Acidic
09. Heirloom
10. H377
11. De Sade
12. Finale