Membre de ce que je considère être des « mastodontes
» de la scène, Rammstein avait déjà pris des
rythmes de sénateur entre deux albums studio. C’est que depuis Rosenrot en 2005,
les Allemands n’ont sorti que … deux disques studio ! Et cela en maintenant un rythme de
tournée très satisfaisant ce qui à mon sens confirme leur statut de
référence absolue du genre. On retrouve en effet là les calendriers des Metallica et autre
AC/DC. Et comme pour ces deux groupes, on retrouve les mêmes commentaires
à chaque sortie de nouveau disque. En rapide synthèse : « ces groupes ont leurs
classiques loin derrière », « aucune surprise, zéro prise de risques »,
etc. Soyons justes, il y a du vrai dans ces remarques. Parfaitement établis, ces groupes font du
fan service. Il n’en demeure pas moins que ces sorties restent de bonne qualité et
continuent de faire autant parler d’elles et de capter l’intérêt
médiatique (confère le dernierIron Maiden récemment). A la décharge de ces formations,
quand on voit comme ils se font « tomber dessus » à chaque prise de risque /
évolution (confère Load de Metallica), on peut les comprendre aussi. Ajoutons des enjeux
financiers énormes (un Metallica c’est littéralement une PME avec une trentaine de
salariés alors l’innovation pour l’innovation ça a ses limites aussi !). Oui
tout cela est un business (quel scoop je vous offre !!). Et dans cette perspective, la crise sanitaire a
fait mal comme pour tant d’autres secteurs (et j’aborde pas là les aspects
humains). Rammstein a dû ajourner sa monumentale et exceptionnelle tournée
(avec deux dates à venir sur Lyon pour les retardataires) et remisé dans des hangars son
incroyable scène. Plutôt que d’attendre un retour à la normale sans cesse
repoussé, manquant de visibilité, les Allemands ont repris leurs quartiers dans notre si
belle Provence (où le précédent disque avait déjà été
enregistré) et ont mis en boîte ce nouvel album, preuve au passage que ces garçons
n’ont pas si mauvais goût. Voilà qui explique le délai si court avec
l’arrivée de ce nouveau disque. Malins les Germains.
Petite inquiétude artistique tout de même car cela implique
un processus raccourci et la crainte que le groupe ne ressorte du matériel non retenu sur ce
précédent disque sorti en mai 2019.
C’est que le souvenir de Rosenrot est un peu cuisant pour certains. Certes, les temps ont
changé, le groupe était alors « cramé » sur le plan relationnel quand
les choses semblent se passer bien mieux aujourd’hui (allez savoir, c’est peut-être
aussi pour protéger cet aspect que ces groupes lèvent le pied sur le studio les
années passant). Aussi, le précédent disque Rammstein sorti en
2019 fût un peu contesté artistiquement en dépit de chiffres de ventes plus que
satisfaisants même dans le contexte. Inégal certes mais contenant quelques sacrés
bons morceaux, je trouve qu’il passe bien le temps et j’y reviens, ce qui est plutôt
bon signe. Rammstein a mûri et ça leur va bien. Enfin, ce dernier point
est à relativiser car comme toujours avec eux, les vidéos associées aux nouveaux
singles cultivent des images percutantes et un goût de la provocation certain. Le mauvais
goût de Zick Zack se place là !!! Rammstein avait
déjà un peu perdu un peu de sa force de frappe au passage et ce Zeit confirme
cette tendance. La surpuissance si spécifique du combo est moins percutante sur le plan sonore
mais Rammstein est toujours là et bien là et continue de reléguer
loin une grande partie de la concurrence ! La voix de Till impressionne toujours autant
avec cet inimitable sens du refrain. Toujours sans grande surprise, on retrouve le même plan de
lancement avec un premier single plus majestueux accompagné d’une vidéo et
d’une thématique ambitieuses (le temps qui passe, sujet passionnant s’il en est et
donc on se doute ce qu’un Till inspiré peut en tirer) avant un second
single Zick Zack plus simple au gimmick vocal plus accrocheur, faisant au passage beaucoup
penser au Radio d’il y a trois ans.
La dynamique me semble enclenchée depuis les années 2010
mais le contexte récent a dû encore plus contribuer à avoir un
Rammstein en pilote automatique offrant ce qu’il a à offrir à ce
jour. Et j’en reviens à mon point évoqué plus haut : qui sera
étonné de ce point ? Bien sûr qu’on a cette impression de déjà
entendu mais la qualité est là, l’efficacité aussi. Le savoir-faire est
indéniable et un titre comme Zeit, certes en mid-tempo, se hisse à la hauteur des
très bons titres des Allemands. Moins « fracassant » dans son approche musicale, le
groupe se repose sur un Till toujours aussi aérien. Le chanteur propose aussi
deux titres en référence à son recueil de poésie (Angst,
Schwarz). On trouve aussi un titre en français, on le sait, notre langue plaît au
garçon, la dédicace plaira. Musicalement, un morceau comme Angst sort du lot avec
son riff bien écrasant.
Difficile au final d’émettre un avis apportant
réellement une plus-value. Rammstein, qui s’auto-plagie, nous offre
là un disque qui devrait générer les remarques / réflexions habituelles
déjà évoquées. Pour ma part, je me réjouis de les retrouver, la
qualité étant à mon sens au rendez-vous. Il ne convient plus d’attendre autre
chose que ce qui nous est proposé ici et une fois ce point accepté, le résultat est
parfaitement satisfaisant. Les fans apprécieront, celles et ceux qui aimaient à les
critiquer continueront de pester. Le nombre de vues des vidéos du groupe, on parle ici en
dizaines de millions, laisse augurer d’un succès commercial là encore sans grande
surprise. On attendra le retour scénique des Allemands et on sait que là, on n’en
prendra pleins les yeux et les oreilles à coup de sensations très fortes. Ce groupe reste
une sacrée machine de guerre œuvrant dans un registre personnel enthousiasmant et
profondément original. On espèrera que le dernier titre proposé ici ne se veuille
prophétique mais on connaît le sens de l’ironie des Allemands et ce titre
s’inscrit dans la thématique du twemps qui passe ce qui fait sens (comme souvent chez eux).
Certes sans surprise mais encore très crédible Rammstein.
Tracklist de Zeit :
01. Armee Der Tristen 02. Zeit 03. Schwarz 04.
Giftig 05. Zick Zack 06. OK 07. Meine
Tränen 08. Angst 09. Dicke Titten 10.
Lügen 11. Adieu