En 1999, dans la foulée d’unFollow The Leader paru l’année précédente, Korn revenait vite avec un nouvel album, cet Issues qui va nous intéresser. Timing sacrément court mais Korn n’a jamais trop traîné entre ses différents albums. Ross Robinson avait déjà pris du recul sur Follow The Leader et n’apparaît désormais plus dans l’orbite de Korn. Besoin de changement ? Sans doute et pour des artistes, la démarche est plutôt saine. Exaspération par le fait de retrouver « leur » son chez d’autres formations (Machine Head et son Burning Red au hasard) ? Très possible. Il m’avait semblé lire des commentaires de Munky en ce sens. C’est Brendan O’Brien qu’on retrouve aux affaires, valeur sûre s’il en est. Les musiciens avaient aussi avoué que ce dernier les encadrait bien plus et que ce fut moins la fête durant les sessions d’enregistrement. Pour le reste, au final peu de changements. Un artwork dans la tradition du groupe avec encore et toujours les angoisses de l’enfance mises en avant. Enfin, le sujet de l’artwork mérite un mot car cela fit l’objet d’un concours organisé par MTV. Trois autres visuels furent proposés dans le cadre d’une édition limitée, assez différents les uns des autres mais tous réussis (même si la plus sombre des trois autres reste particulièrement glauque, sorte d’affiche du film Panic Room en version expressionniste dark).
Autre époque, autres habitudes, Korn surprenait en publiant gratuitement un premier single en mp3, l’excellente Falling Away From Me, typiquement dans la veine du combo en retrouvant même un côté dark, délaissé sur Follow The Leader, plus « lumineux » (pour du Korn, entendons-nous bien !) comme si Korn annonçait quelque part vouloir revenir de son statut superstar / commercial de ce précédent disque. Pour autant, le groupe a mûri et ne reviendra pas au style épuré de Life Is Peachy. Plus heavy, plus puissant même, mieux chanté (il a progressé, le Jonathan Davis), Korn évoluait, ce qu’il ne cessera de faire par la suite, tout en conservant ses fondamentaux avec ses riffs distordus, marque de fabrique du gang de Bakersfield.
Souffrant probablement de son image néo métal, de son succès commercial peut-être aussi, Korn n’a peut-être pas eu la légitimité artistique que cet Issues aurait mérité. Plus abouti, réfléchi avec la volonté de proposer une musique aboutie, ce disque (bien qu’un peu trop long, comme souvent à leurs débuts) reste un des meilleurs du combo. Les départs n’avaient alors pas commencé à s’enchaîner, la paire de guitaristes souhaitait encore évoluer / innover offrant par-là de belles choses et variant au maximum le propos toujours dans son style très dark (l’ambiance « dépressive » de Trash). L’album de la maturité ? Bon, le terme est un peu galvaudé mais le style du groupe est mieux maîtrisé, c’est indéniable. La suite sera aussi plus compliquée, Korn partant dans des registres plus inattendus. Si je reste toujours sceptique sur les performances live de Korn, force est d’admettre que les quatre, cinq premiers disques sont des références, intéressants par la démarche sonore et créative des débuts avant une évolution vers un registre plus accessible, moins étouffant mais toujours allant de l’avant. Le disque suivant, Untouchables, encore plus abouti sur le plan de la créativité fera pschitt ! sur le plan commercial (malgré un succès critique, comme quoi !) le groupe entamant alors une mini traversée du désert, relative tant l’aura du groupe persistera. Bien sûr, la musique de Korn ne sera jamais une musique de joyeux lurons mais le groupe a toujours eu (et a encore) la volonté d’améliorer sa palette, ce qui est louable.