DGM, c’est la classe. Et Life, onzième album des Italiens, s’en vient vous le prouver une nouvelle fois. Ces fiers artisans d’un power metal progressif de haute volée, riche en ambiances travaillées, riffs ciselés et mélodies accrocheuses, vous ont concocté un menu d’un peu moins d’une heure et constitué de dix compos racées. Cette arrivée, c’est la fin d’une attente de trois ans et la suite d’un Tragic Separation globalement réussi qui se présentait comme un édifice impressionnant au sein duquel on pouvait tout de même entrevoir quelques petites failles (une production et une écriture un peu denses qui auraient pu se préoccuper de créer davantage d’espaces de respiration... et un petit manque de renouvellement aussi). Spoiler : après plusieurs écoutes, cette fois encore, je peux vous affirmer que le quintet (m’) impressionne... et constater que la perfection n’est (encore) pas de ce monde. Life, c’est donc très bon (vous avez vu la note...) mais pas un coup de cœur total.
L’opération de séduction italienne fonctionne à plein régime sur le titre d’ouverture, l’excellent Unravel The Sorrow. J’aime la façon dont le groupe prend le temps de l’installer (pendant une bonne minute) avec une belle intro dominée par les claviers d’Emanuele Casali. L’ambiance est prenante, le reste des musiciens arrivent et il faudra attendre un peu plus de deux minutes avant que la voix de Mark Basile se fasse entendre. On a connu des débuts d’albums plus immédiats, plus percutants, avec des morceaux qui font tout de suite parler la double grosse caisse, les riffs supersoniques etc. Mais aujourd’hui, DGM privilégie l’atmosphère, la mélodie... et ce titre, que je trouve envoûtant (mais qui n’oublie pas d’être assez rythmé et virtuose), me rappelle les belles heures de l’excellent album The Passage sorti en 2016. Plus prog que power, ce démarrage me plait beaucoup. Et cette tendance va globalement se confirmer sur l’ensemble de Life. Même s’il contient des titres plus rapides et directs, plus robustes (To The Core, Dominate, Leave All Behind...), ce disque ne s’impose pas comme le plus heavy ou le plus speed proposé par les Italiens. Par exemple, pas de compo à l’allure effrénée à la Hereafter ou Universe ici. Le groupe n’a donc pas pour intention de balancer cinquante notes par seconde (je sais que c’est impossible, ne commencez pas, c’est une image) mais livre ici une version peut-être un peu plus mûre de lui-même. Ainsi, l’ensemble, bien qu’enlevé, toujours pourvu de super riffs ou rythmiques massives et d’influences Symphony X ici ou là, est un peu plus posé, moins dense. Un peu mais pas complètement car la grosse production moderne de Mularoni (également excellent guitariste de la formation) pèse toujours son poids.
En plus de cet effort, qui s’illustre aussi à travers des compos powerprog (comme Find Your Way) où le hard rock accrocheur s’invite (tendance amorcée sur The Passage, souvenez-vous du single Animal), DGM se permet de nous surprendre avec Eve, une septième piste instrumentale où les musiciens laissent libre cours à leurs penchants progressifs, plus rock que metal d’ailleurs. Ca joue très bien, sans tout miser sur la technique (ou la vélocité... puisque Eve adopte un tempo tranquille) et la compo est très agréable avec un petit intermède au clavier planant à mi-parcours. Reposant. La conclusion de Life est également assez remarquable : Neuromancer est un titre assez lent, beau et sombre qui repose (comme Unravel The Sorrow au tout début du disque) pas mal sur les claviers de Casali (intro atmosphérique, final au piano). Le chant de Basile est excellent, nuancé, très calme au départ, plus intense par la suite... De toute façon, comme d’habitude, chanteur comme musiciens excellent, rien à redire, c’est du haut niveau sur tous les plans.
Alors oui, DGM, c’est la classe. Toujours l’un des plus dignes représentants du power prog européen contemporain et sans aucun doute le groupe italien le plus performant dans ce genre. Mais DGM, comme beaucoup d’autres avant lui, après plus de vingt-cinq ans d’existence (le premier essai date de 1997), avec une dizaine d’albums à son actif et un line-up stable depuis un bout de temps, n’en est clairement plus au stade de l’expérimentation. La formation excelle dans son registre mais, malgré quelques efforts notables, peine à créer la surprise. Les mélodies, les ambiances, la production... tout cela sonne assez familier. Est-ce qu’on peut vraiment lui en vouloir ? Il n’est pas simple de contourner ce qui semble être une fatalité pour une énorme majorité de groupes. Dream Theater, Symphony X et d’autres ont tous évolué, progressé et sorti des disques relativement différents les uns des autres dans un premier temps, grandissant au fur et à mesure de leur parcours, peaufinant leur écriture, leur style, leur son... jusqu’au moment où leur formule, bien rodée, a cessé de se renouveler. Il en va de même pour nos Italiens qui, une fois de plus, proposent un bel album, bien écrit, parfaitement interprété... mais qui, malgré ce côté un peu plus "posé" qui le rapproche de l’excellent The Passage cité plus haut et une ou deux petites surprises, ne m’excite pas tout à fait autant qu’il le devrait. La subjectivité étant de mise et le travail accompli restant admirable, je vous le recommande tout de même chaudement.
Tracklist de Life :
01. Unravel The Sorrow 02. To The Core 03. The Calling 04. Second Chance 05. Find Your Way 06. Dominate 07. Eve 08. Journey To Nowhere 09. Leave All Behind 10. Neuromancer