Symphony X ne passe pas très souvent nous rendre une petite visite de courtoisie... Et pour cause, quand on ne sort qu'un album tous les quatre (ou cinq) ans et qu'on ne tourne que pour cette occasion-là, on ne risque pas de lasser son public de par son omniprésence ! Du coup, la venue de ces Américains est toujours un petit événement. En plus, ces messieurs sont généralement bien accompagnés. On se souvient de la présence de Circus Maximus sur le Paradise Lost Tour ou encore de Pagan's Mind et DGM sur la tournée Iconoclast. La tournée européenne 2016 ne fait pas exception à la règle puisqu'on retrouve aux cotés de Romeo et compagnie les excellents Myrath qui viennent tout juste de sortir leur Legacy, ainsi que les Français de Melted Space dont le dernier effort a été plus qu'apprécié par notre Fifi national. Soirée immanquable alors ? Sur le papier, oui. D'autant plus qu'Underworld, le dernier rejeton de Symphony X, n'est carrément pas un album médiocre non plus, loin de là. Cette soirée parisienne du 23 février s'annonçait donc riche en émotions... mais toutes les promesses ont-elles été tenues ? Pas tout à fait...
Aux alentours de 19h30, la troupe de Melted Space fait son entrée sur la scène de la Machine du Moulin Rouge (ex-Locomotive). Je ne connais pas très bien leurs oeuvres mais ai beaucoup aimé les extraits que j'ai pu écouter ici ou là et j'ai hâte de découvrir ce que donne le groupe sur scène. Et c'est là que survient la première déception. Je le précise tout de suite, cela n'est pas dû au groupe... mais au son qui est tout bonnement mauvais. Je pourrais essayer d'embellir les choses et dire que c'était perfectible, qu'on avait du mal à distinguer correctement ceci ou cela mais franchement "mauvais" convient mieux. Il n'y a pas d'autre mot ! Et pour moi, ça a en grande partie gâché l'expérience.
Le groupe a de l'énergie à revendre, les compos sont intéressantes... mais ce son trop fort, brouillon voire cacophonique par moment (et aux guitares inexistantes) ne rend pas le set des Français très agréable. On sent que la troupe (le terme n'est pas usurpé, selon les morceaux, on trouve sept ou huit musiciens sur scène... au total, ils étaient neuf) a vraiment bénéficié du tarif "tout premier groupe de première partie de soirée qui a le droit au service minimum" avec light show inexistant (quelques spots de couleur bleue, blanche ou rouge... cocorico) et son bidouillé à la va-vite par quelqu'un qui a oublié d'enlever ses moufles. Bref, c'est un peu dégueulasse...
Le set commence avec Terrible Fight, une compo bien épique à l'ambiance sombre. Pierre Le Pape est bien en place derrière ses claviers, les musiciens font preuve d'énergie et les différents chanteurs (deux messieurs et une demoiselle) se donnent la réplique. Le style metal épique et mélodique mais qui fait intervenir quelques parties bien sombres et, notamment, du chant extrême, est assez séduisant mais on n'arrive pas à totalement à savouver le moment... Je n'insiste pas sur les conditions... je crois que j'ai été clair à ce sujet, non ?
A part ça, on aura eu le droit à six titres ce soir... quasiment tous extraits de The Great Lie sorti l'année dernière. Seule la très dark Para Bellum, jouée en avant-dernier, se fera la réprésentante du EP Between. Le show s'achève sur No Need To Fear, un titre plus mélodique et très sympa introduit par l'un des vocalistes de la plus étrange des manières "Va falloir vous bouger un peu le cul... Enfin, si vous avez un cul, j'sais pas". Marrant... et mémorable vu que ce fut la seule tentative de communication entre le groupe et le public pendant la demi-heure qu'a duré le concert. Ah si, à la fin, un des chanteurs balance quand même vite fait un "Merci, nous sommes Melted Space". Bah oui, quand on n'a qu'une demi-heure pour jouer, on n'a pas spécialement le temps de palabrer entre les morceaux.
Ce concert de Melted Space un peu froid et à la technique défaillante (la salle, pas le groupe, hein) n'aura donc pas été un grand moment... mais les musiciens se sont bien donnés, on a pu apprécier la diversité des chants proposés quand ceux-ci étaient audibles (j'ai reconnu au passage une certaine Clémentine Delauney qui a brièvement fait partie de Serenity et qui se trouve être la nouvelle vocaliste de Visions Of Atlantis) et on se dit quand même à se dire qu'il y a quelque chose à creuser et qu'il serait très souhaitable de revoir Melted Space dans de meilleures conditions.
Setlist de Melted Space :
01. Terrible Fight 02. Trust And Betrayal 03. Hopeless Crime 04. Titania 05. Para Bellum 06. No Need To Fear
Après une petite pause d'une demi-heure, c'est au tour de Myrath de venir chauffer la salle avant que n'arrivent les rois de la soirée. C'est toujours un plaisir de voir Myrath... mais sans doute encore plus ce soir. Car cela fait longtemps que le groupe tourne avec plus ou moins la même setlist (Tales Of The Sands est sorti depuis quasiment quatre ans et demi) sauf que là, on va avoir un peu de nouveauté à se mettre sous la dent étant donné que Legacy, attendu depuis longtemps, est enfin sorti !! Et d'ailleurs, histoire de démarrer avec de l'inédit, les Tunisiens balancent Storm Of Lies (dernière et très bonne chanson du nouvel album) d'entrée de jeu.
Le début de concert est tout de suite plus chaleureux que celui de Melted Space. On sent qu'une partie du public connait sans doute mieux Myrath et l'accueil réservé par certains fans est plus "sonore" ou festif, dirons-nous. La musique du groupe y est pour quelque chose aussi, bien sûr. Et puis, les membres de Myrath ont l'air très contents d'être là aussi. Il y a plus d'interaction entre le groupe et le public... Zaher (le chanteur) interpelle régulièrement la foule qui ne se fait pas prier pour taper des mains, accompagnant ainsi les tempos proposés par les nouvelles chansons. Puisqu'on parle de nouveaux morceaux, soulignons que le set démarre par trois d'entre eux. Après Storm Of Lies, ce sont les directes et entraînantes Get Your Freedom Back et Believer qui prennent le relais.
Ce qui retient l'attention, outre les beaux vêtements tunisiens portés par le groupe, c'est la qualité de la musique et la maîtrise technique de ces messieurs. Maintenant, ce n'est pas parfait. Décidément... Bah oui, parce que si le son est un peu moins mauvais que celui dont avait "bénéficié" (oui, pas sûr que le terme soit très approprié) Melted Space, il est encore loin d'être parfait. La guitare répond encore une fois aux abonnés absents (on l'entend mieux sur les solos mais au niveau de la rythmique, c'est pour ainsi dire du "air guitar"), le micro de Zaher n'a pas un son très agréable (il y a comme un effet de saturation gênant) et le tout a un côté un peu brouillon. Mais comme je connais la musique de Myrath et trouve que les morceaux sont plus faciles à appréhender sur scène, ça passe mieux.
Vous allez dire que je suis un râleur... c'est peut-être pas totalement faux mais voilà, une autre petite contrariété est à signaler : Myrath n'a joué que six morceaux. A peine une demi-heure et hop, c'est plié ! Pour un groupe qui est juste en dessous de la tête d'affiche, je m'attendais à quelque chose de plus généreux (en général, pour cette place sur ce genre d'affiche, on avoisine plutôt une durée de quarante ou quarante-cinq minutes). Heureusement qu'une tournée en tête d'affiche est prévue avant la fin de l'année, ça permettra aux frustrés (dont je fais partie) de mieux profiter du groupe.
A part cela, Myrath nous ressort deux compos de l'album précédent, Sour Sigh et l'excellente Merciless Times qui clôt un concert tout de même bien sympa. En plus, on a eu le droit à la présence d'une très jolie danseuse nommée Louna. Oui, si on peut mêler le plaisir des yeux à celui des oreilles, on ne va pas se plaindre...
Les musiciens sont tous très bons. Ils sont plutôt à l'aise, décontractés... Ce ne sont pas des bêtes de scène non plus, on sent comme une petite retenue... ou c'est peut-être tout simplement leur nature. Pas obligé d'en faire des caisses, non plus... on en reparle dans quelques instants avec Symphony X. Ce soir, je suis particulièrement impressionné par le jeu de batterie de Morgan... absolument excellent.
Le courant est bien passé entre le quintet et le public parisien comme en témoigne le "Paris, on vous adore" lancé par Zaher en fin de concert. L'histoire d'amour entre Myrath et la France est loin d'être terminée...
Setlist de Myrath :
01. Storm Of Lies 02. Get Your Freedom Back 03. Believer 04. Sour Sigh 05. Nobody's Lives 06. Merciless Times
C'est aux alentours de 21h15 que Symphony X investit la scène de la Machine du Moulin Rouge... devant un public chaud bouillant. Une fois que tout le monde est en place, c'est parti pour un enchaînement de trois titres redoutables extraits du tout dernier Underworld : Nevermore, la chanson titre et Kiss Of Fire ! Bam, prenons-nous ça dans le beignet ! Sauf que... attention, vous le sentez arriver ? Oui ? Le... son... est... bof. Meilleur que celui des premières parties, c'est incontestable. Encore heureux. Mais, décidément, ce soir, les guitares ne sont pas à la fête. Alors qu'elle est énorme sur album, la six-cordes de Romeo est ici toute discrète. Le son de batterie n'est pas fantastique non plus mais ça passe... Pour le reste, ça va. Et la bonne nouvelle, c'est que ça va s'améliorer à partir de la quatrième chanson. Ouf.
Russell Allen démarre la soirée avec les cheveux tirés en arrière et des lunettes de soleil. Le monsieur se serait-il mis en tête de travailler son look ? Il a en tout cas des allures et une gestuelle de rock star. Il en fait beaucoup... vraiment beaucoup. C'est le show à l'Américaine dans toute sa splendeur et c'est même un poil "too much" en ce qui me concerne (surtout pour ce qui est de cet espèce de déhanché quasiment lassif... à croire que Russell a été inspiré par la danseuse du ventre qui accompagnait Myrath). Allez, on va mettre ça (le côté "too much") sur le compte des tournées passées avec Trans-Siberian Orchestra aux USA. Mais en même temps, le monsieur est très charismatique, il est même énorme, difficile de le quitter des yeux... et sa voix est fantastique. L'un des meilleurs chanteurs de metal actuels ? A n'en point douter. Oui, je sais, je l'ai déjà dit de nombreuses fois dans des articles antérieurs mais tant que ça restera vrai, je le répéterai, c'est comme ça.
Comme je l'ai dit un peu plus haut, le public est chaud. On a même le droit aux premiers pogos de la soirée sur la chanson Underworld... qui s'y prête bien, il est vrai.
Après les trois premières chansons (bien) balancées, Russell Allen prend la parole pour la première fois de la soirée. Il nous explique que c'est toujours un plaisir de venir en France que c'est la première fois que le groupe joue à la Machine du Moulin Rouge. Sauf que non, ce n'est pas la première fois mais c'est pas grave, on ne lui en veut pas... Oui, ça remonte un peu mais pour la tournée de l'album Twilight In Olympus en 1998, Symphony X avait bien joué ici (mais à l'époque, ça s'appelait la Locomotive). S'en suit un petit discours explicatif qui sert d'introduction à la chanson suivante, la très belle Without You. Mais dites-donc, ils aiment bien leur nouvel album, les Américains, non ? Ah oui, ils l'aiment... et ce n'est pas fini car Russell vient tout juste de nous glisser qu'ils allaient le jouer en intégralité ce soir. Heureusement qu'il est très bon. D'ailleurs, les fans réagissent plutôt bien.
C'est donc parti pour encore plus de titres extraits du fameux Underworld, joués, sans surprise, dans l'ordre de la tracklist. Pour chaque musiciens, c'est l'occasion de briller... même si on note encore une fois que le batteur Jason Rullo, tout à fait excellent par ailleurs, a du mal sur certaines accélérations de tempo (c'est flagrant quand il faut reprendre juste après le refrain de In My Darkest Hour, le monsieur a du mal). Michael Romeo, toujours aussi flegmatique, représentant d'une certaine force tranquille, balance ses riffs incroyables et ses soli virtuoses avec une décontraction bluffante. Mike Lepond est un bassiste hors-pair et participe régulièrement aux choeurs, comme ça, il est sûr de ne pas s'ennuyer. Il sourit très régulièrement aux fans des premiers rangs. Quant à Michael Pinnella, il est toujours très calme et discret (mais efficace) derrière ses claviers. N'oublions pas la rock star de la soirée, l'animal Russell Allen qui continue de déployer le grand jeu en se servant de son pied de micro comme d'une rame, imitant ainsi le fameux Charon sur sa barque (à la fin de la chanson qui porte son nom), ou en s'amusant à alterner deux masques différents sur la longue To Hell And Back. Ce que je retiendrai surtout, c'est une performance vocale quatre étoiles. Il est trop fort ! Oui, je suis fan... et alors ? Je ne suis d'ailleurs pas le seul. A un fan hurlant "we love you" entre deux chansons, Russell répondra "I love you too, man... in a totally non gay way!". Voilà qui dissipe toute ambiguité.
Après quelques titres supplémentaires, toujours issus d'Underworld (dont Run With The Devil qui passe super bien l'épreuve du live), Symphony X s'accorde enfin une petite séance flash-back en allant chercher une poignée de vieux morceaux piochés au sein de leurs anciennes sorties. C'est l'instrumental The Death Of Balance qui entame ce retour dans le passé. Michael Romeo en profite pour placer le thème de la marche impériale de Star Wars qui fait son petit effet. Et puis, la fosse entre en ébullition quand Russell Allen nous annonce qu'ils vont jouer des titres de The Divine Wings Of Tragedy. Les élus sont Out Of The Ashes et Sea Of Lies. Génial. Quand on voit la réaction des fans, on se dit que le groupe devrait peut-être inclure un peu plus de vieilles compos dans leur setlist... J'y reviens dans quelques instants. Au moment du rappel, Allen a remis ses lunettes de soleil... Pourquoi ? On n'en sait rien et on n'a qu'à dire qu'on s'en fout. Par contre, on se prend un excellent Set The World On Fire en pleine face... et le dernier morceau de la soirée sera Legend. Juste avant cet ultime assaut, le frontman aura un petit mot pour les victimes du Bataclan (le concert a d'abord été programmé là-bas) et nous fera un discours sur notre liberté, notre amour de la musique (en nous offrant une petite digression sur Ronnie James Dio, une véritable source d'inspiration pour lui et un des artistes les plus gentils qu'il ait rencontré alors que quelques imbéciles le prenaient pour un disciple de Satan) et la nécessité de ne pas se laisser intimider par les obscurantistes, de croire en ses rêves et de faire en sorte que la légende du heavy metal ne meurt jamais.
Objectivement, Symphony X a proposé un set carré et le moment passé fut très bon. Des musiciens d'un tel niveau et qui nous livrent des albums aussi forts, ça s'apprécie comme il se doit. Maintenant, de manière plus subjective, le fan (et non le chroniqueur) que je suis voit quelques petits bémols... Quand on a une telle carrière (neuf albums) et qu'on espace à ce point ses albums et donc ses concerts, je trouve qu'il serait bon d'offrir un peu plus de chansons à ses fans. Certes, il y a quelque chose de très positif dans la façon dont Symphony X gère ses setlists car, au moins, on ne peut pas dire qu'on n'a pas de nouveauté ! Tellement de groupes jouent toujours les mêmes vieilles chansons, il est bon de voir que certains sont fiers de leurs créations les plus récentes... Mais quand même, seulement quatre petits morceaux (à peine vingt minutes) pour représenter le reste de la carrière du groupe, soit huit albums ? Je trouve cela très frustrant. Il y a tellement d'autres choses que j'aurais aimé entendre... Mais bon, mis à part cela et un son pas extraordinaire (et un Russell Allen qui cabotine un poil trop à mon goût), ce fut quand même un très bon concert. Et dire qu'il va probablement falloir attendre quatre ou cinq ans avant de les revoir...
Setlist Symphony X :
01. Nevermore 02. Underworld 03. Kiss Of Fire 04. Without You 05. Charon 06. To Hell And Back 07. In My Darkest Hour 08. Run With The Devil 09. Swan Song 10. The Death Of Balance 11. Out Of The Ashes 12. Sea Of Lies ------------------------------- 13. Set The World On Fire 14. Legend
|