Petit événement sur la ville Rose que la venue de Wardruna. Et c’est ni plus ni mois qu’au Zénith que se produit la déjà mythique formation norvégienne. Si la salle n’est pas en format complet, il y a une longue file d’attente sur le parvis. La première impression est mitigée avec ces grands parkings sans âme dans un quartier tout neuf. Ce concert fait partie de la longue liste de ceux reportés pour cause de crise sanitaire et cela génère d’ailleurs un petit souci technique avec les « anciens » billets, certes toujours valables mais ne passant pas à l’entrée. Le problème sera vite réglé (bonne réactivité de l’organisateur, au passage) avant de découvrir que la salle n’a apparemment pas l’habitude d’un public metal avec trop peu de bars ouverts. C’est que ça boit de la bière, un metalleux ! Enfin, les horaires ayant été bien communiqués, parfaitement respectés, le public a le temps de s’abreuver et de se restaurer avant que la cloche ne retentisse, amenant un peu de vie dans un lieu qui génère une froideur regrettable. Kalandra Autre surprise, il n'y a que des places assises dans la fosse. Cela étonne mais il me faut préciser que le Zénith est actuellement en configuration « élection présidentielle » et que les candidats y défilent chaque week-end. La salle a donc probablement conservé le décor mais vu la musique proposée, cela ne pose aucun souci et se prête même plutôt bien aux registres folk nordique du soir. Parfaitement adapté à Wardruna, Kalandra vient aussi de Norvège même si on dénote des musiciens suédois. On ne va pas rentrer dans la géographie scandinave, même si j’avoue que je suis fan du sujet, mais la pop alternative nordique fonctionne à merveille. Le groupe commence par un Borders lumineux, où la voix a beaucoup de réverb'. Le rendu est très élégant, les guitaristes aux bons looks nordiques, cheveux longs, grosse barbe, on les croirait sortis des contrées du Nord de Game Of Thrones ou de celles du Seigneur Des Anneaux. La demi-heure passe à merveille, la chanteuse semblant très heureuse de l’accueil chaleureux reçu. C’est la dernière date de la tournée et Kalandra mesure la chance d’avoir ouvert pour un groupe comme Wardruna leur offrant une très belle exposition. Le groupe a vraiment assuré, délivré une jolie performance, parfaite dans le contexte de la soirée. Wardruna Autre avantage de la folk nordique, les changements de plateaux ne prennent pas un temps de fou. Une demi-heure après la fin du show de Kalandra, des croassements de corbeaux résonnent dans le Zénith et le groupe au complet lance un Kvitravn, morceau impressionnant du dernier album du même nom. La musique prend une ampleur remarquable avec des percussions réussies et très présentes. On est plongé d’entrée dans l’ambiance si caractéristique du groupe avec la voix très grave d’Einar Selvik, véritable maître de cérémonie et âme de ce projet si marquant. Je ne peux manquer de citer Lindy Fay-Hella, vocaliste remarquable qui accompagne au chant Einar Selvik et abat un boulot fantastique tant par sa présence que ses vocalises. Une autre chanteuse (celle de Kalandra) appuie le contraste vocal entre la voix masculine et celles féminines et le rendu est génial. J’avais déjà écrit que ce chant féminin apportait un plus indéniable à Warduna. C’est encore plus marqué en live. La tessiture du chanteur restant particulière, Wardruna pourrait vite être « limité » or là, le groupe élargit son spectre pour un réel plus artistique. On sent aussi que Wardruna a passé un cap et assume son nouveau statut. Fini le groupe culte underground en mode « niche artistique », place à une vraie formation mature, professionnelle. La formation utilise encore un jeu d’ombres très réussi avec des lights superbes mettant bien dans l’ambiance. La setlist est en mode best-of, les moments très forts sont très bien positionnés dans le set avec l’exceptionnel Solringen (je pèse mes mots, les mélodies vocales sont envoûtantes) rapidement proposé. Le triptyque Raido – Lyfjaberg – Voluspa met la barre très haute (et les fans de saut à la perche savent que les Scandinaves montent très haut en ce moment) avec une mention spéciale pour la chamanique Lyfjaberg. Tyr voir ressortir les grandes trompettes pour un rendu visuel toujours aussi spectaculaire. Autre grand moment, le titre Gra où l’apport de Lindy Fay-Hella est remarquable et valide à mon sens tout mon argumentaire sur la complémentarité des vocaux. Le concert passe à une vitesse folle et avant d’annoncer le très attendu Helvegen, dernier très grand moment d’un show qui n’en aura pas manqué, Einar Selvik prend une minute pour remercier le public, saluer l’équipe technique mais aussi rappeler la démarche du groupe, avec un rapport à la tradition très intéressant. En substance, le musicien explique que les anciennes chansons sont mortes, qu’il faut certes s’appuyer sur ces dernières, sur de l’ancien mais pour proposer quelque chose de nouveau, en lien avec son époque. Respect du Passé donc, connaissance de son Histoire, de ses traditions mais regard porté sur l’avenir, volonté d’innover. Démarche passionnante qui prend un sens particulièrement intéressant dans ce contexte d’élection présidentielle. Helvegen, qui traite des sujets difficiles du deuil en plus de rendre hommage aux disparus que nous continuons de porter avec nous, emporte tout. Conquis, le public finit debout et alors qu’Einar Selvik invitait le public à se rasseoir pour le final, il se vit opposer un refus net d’une grosse partie de l’auditoire partageant son enthousiasme à l’égard du groupe et les « on veut voir personne assis » résonnaient magnifiquement dans un Zénith emporté. Grand show de Wardruna qui a réussi, aidé en cela par Kalandra, à donner de la vie dans un format de salle et sur un site qui en manque cruellement. Avec une démarche aussi aboutie que passionnante qui nécessite cependant une adhésion de l’auditeur, le registre pouvant laisser de marbre, intelligemment adapté à un public plus large sans compromis, Wardruna marque son époque avec une musique originale et un show très réussi. Merci à Noiser pour cette belle soirée. Setlist de Warduna : 01. Kvitravn 02. Skugge 03. Solringen 04. Bjarkan 05. Heimta Thurs 06. Raido 07. Lyfjaberg 08. Voluspa (Skaldic Version) 09. Tyr 10. Isa 11. UruR 12. Gra 13. Rotlaust Tre Fel 14. Fehu 15. Odal 16. Helvegen Rappel 17. Snake Pit Poetry
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