Signum Draconis est le petit nouveau de la prolifique scène metal transalpine.
Il s’agit ici d’un projet de grande envergure puisqu’on est en face d’un metal
opéra. Comme son nom l’indique, il s’agit d’une mise en musique de
l’œuvre de Dante Alighieri, La Divine Comédie. Inferno
est la première partie d’un triptyque. Suivront ensuite Purgatorio et
Paradiso. Aux commandes nous retrouvons Max Morelli (chant), Oscar
Grace (guitare, et également compositeur de l’œuvre), Filippo
Martignano (claviers), Stefano Antonelli (basse) et Francesco
Micieli (batterie). En outre, le groupe a vu grand avec pas mal de guest : MARK
BOALS (ex-Malmsteen) jouant le rôle de
Virgil, BEN JACKSON (Crimson Glory) celui de Charon, SIMONE
MULARONI (DGM) celui de Nimrod ’Le Titan’,
OLEG SMIRNOFF (Eldritch, Vision Divine) celui du Comte Ugolino.
D’autres protagonistes viennent compléter le casting : Renato Carrozzo
(narrateur), Chiara Manese (Beatrice), Ksenia
Glonty (Francesca), Luca Paolini (Pluton),
Andrea Ranfa (Brunetto Latini), et Frederick Pollock
(Ulysse).
Et ce n’est pas fini, il faut ajouter à ce petit monde un chœur et un orchestre :
le Bratislava Symphony Orchestra. Cette première partie n’est autre
qu’un double album de plus d’une heure et demie. Menu gargantuesque à
l’horizon, en espérant que le résultat soit à la hauteur des attentes. Car
avec un tel présentoir, sur la papier ça en impose sacrément ! La genèse du
projet remonte à 2010, et à lire les propos de Oscar Grace, les choses
n’ont pas été faites à moitié. Deux années passées
à lire les livres, étudier, faire des recherches, aller à Florence visiter la
maison de Dante. Puis quatre années pour composer, écrire et
s’entourer des musiciens. Pour les compositions de l’orchestre, tout a été
fait à l’ancienne, avec partitions et stylo-plume, sans avoir recours à la
technologie. Peu importe le résultat final, une telle passion pour mener à bien son propre
projet force le respect, surtout dans une société où
l’immédiateté et le court terme sont devenus une norme. Cela fait du bien de lire de
tels propos...
N’y allons pas par quatre chemins, cet album est une franche et belle réussite,
d’autant plus belle car inattendue. In the Midway of Life’s Journey nous pose
les bases. Du bon heavy des familles, une voix éraillée et puissante, l’orchestre en
fond qui se fait entendre sans engloutir le reste, et des chœurs que n’auraient renié
ni Therion ni Rhapsody ! Et ce qui sera une des grandes forces
de cet album... la guitare. Un super solo, à la fois technique et mélodique, sur un
refrain aux petits oignons, très théâtrale, bref, ça démarre
très fort ! The Mission of Virgil est quant à lui un titre typique
d’un opéra metal avec un duo que l’on imagine parfaitement sur la scène
d’un opéra, costumé, avec une belle mise en scène. Une ballade pour une fois
bien réussie et la voix de Chiara Manese parfaite pour cet exercice.
The Divine Comedy: Inferno passe par différents styles : heavy metal, power,
symphonique, d’un titre à l’autre et avec brio. Certains sonnent très
symphonique, avec chœurs et orchestre à l’appuis, alors que d’autres vont
lorgner sur du heavy très puissant et sans fioriture. Le tout avec une impeccable
homogénéité. Les quelques narrations permettent une immersion et ne coupent pas du
tout le rythme (ce qui n’est pas si courant que ça...) et apportent la touche de
théâtralité omniprésente dans l’ensemble.
Je parlais du refrain un peu plus haut. Même si l’opus est complexe, ou plutôt riche,
Oscar Grace a su rester très fluide dans les compositions et nous propose dans
la plupart des cas des mélodies imparables, sans tomber dans la facilité. La montée
des chœurs sur The Borderland est exquise, alors que Firestorm envoie du
bois, avec un refrain bien heavy qui donne envie de headbanguer et lever le poing. Certainement le titre
le plus heavy de l’album. Le solo de guitare est une nouvelle fois excellent, les parties
orchestrales parfaites, quel pied ce titre ! Whirlwind of Lovers de son côté nous
sort un duo de solo guitare - clavier parfaitement exécuté, typiquement prog dans
l’âme pendant que la soprano Ksenia Glonty nous régale de
son timbre. Le deuxième CD est bien plus court mais propose les deux titres les plus longs de
l’opus. Ten Moats of Damnation (Interlude: The Ulysses’ Chant) notamment
avec plus de onze minutes au compteur. Et c’est peut-être le seul titre sur lequel
l’accroche a du mal à se faire. Il traîne un peu trop en longueur avec cette fois-ci
trop de narrations. Mais le niveau reste élevé rassurez-vous. Il faut bien trouver deux ou
trois griefs pour faire le tatillon. In Hands of Titans propose une belle partie de basse
vrombissante sur l’introduction, pour une atmosphère lourde et pesante, avec
l’orchestre faisant un très bon travail. Encore un beau solo de clavier.
Décidément, tous les instruments ont leur place et leur heure de gloire. On ne pouvait pas
terminer autrement que par... une réussite bien sûr. Lucifer clôt
à merveille cet œuvre, avec en prime un solo de guitare typiquement néoclassique
baroque rappelant (fortement) les travaux de Malmsteen.
Au final, The Divine Comedy: Inferno jouit d’une interprétation musicale de
très grande qualité. Oscar Grace ne s’est pas perdu dans un fourre
tout inécoutable, tout est parfaitement bien mis en place. Malgré la richesse et la
longueur de l’album, c’est un régal de bout en bout. Les parties metal sont vraiment
présentes et mises en avant. Vous y trouverez forcément votre compte si vous aimez le
heavy metal des années quatre vingt et le power metal. La tension dramatique propre aux
opéras est très bien retranscrite et se combine à merveille à la puissance
globale de l’œuvre. A la fois puissante donc, mélodique et très
inspirée, c’est une réussite sans bémol. Vivement les deux suites !
Tracklist de The Divine Comedy: Inferno :
CD 1:
01. In the Midway of Life’s Journey 02. The Mission of Virgil
03. Gate of Hell (Arrival of Charon) 04. The Borderland
05. Whirlwind of Lovers 06. Under Eternal Rain
07. To the Edge of Stygian Lagoon 08. Regnum Dite
09. Burning Graves 10. Phlegethon (The Bloody River)
11. Forest of Suicides 12. Firestorm
CD 2:
13. On Geryon’s Back 14. Ten Moats of Damnation
(Interlude: The Ulysses’ Chant) 15. In Hands of Titans 16. Cocytus
(The Ice Terror) 17. Lucifer