Artiste/Groupe:

Queensrÿche

CD:

Digital Noise Alliance

Date de sortie:

Octobre 2022

Label:

Century Media

Style:

Heavy Metal Progressif

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Note:

16/20

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Certains ont du mal à accepter le "nouveau" Queensrÿche. Le départ de DeGarmo a déjà été un coup dur à encaisser pour de nombreux fans de la première heure. Le limogeage de Geoff Tate a créé une autre vague de mécontents, tout comme l’absence de Scott Rockenfield depuis 2017 (problématique puisque le groupe prétend que le batteur s’est désintéressé puis progressivement retiré des activités alors qu’il s’en défend et a décidé de poursuivre ses ex-collègues en justice). Beaucoup s’accordent donc à dire que cette formation (qui n’a conservé du line-up originel que le guitariste Michael Wilton et le bassiste Eddie Jackson) n’est plus vraiment Queensrÿche. Qu’ils aient tort ou raison (ce débat m’intéresse peu), il y a un point que je souhaiterais mettre en avant : vrai ou faux Queensrÿche, ce groupe a réussi à sortir, depuis 2013, des albums autrement plus sympas qu’une bonne partie de sa discographie post-âge d’or. Et même si j’ai personnellement eu un peu de mal à accrocher au très apprécié The Verdict (qui a reçu une majorité de critiques positives le décrivant comme le meilleur album enregistré avec Todd La Torre), je ne peux que saluer l’évolution et le chemin parcouru par ces Américains. C’est donc avec curiosité (mais également une légère appréhension vu que je n’ai pas été enchanté par le cru 2019) que je m’installe pour découvrir cette nouvelle proposition intitulée Digital Noise Alliance qui intronise Casey Grillo en tant que batteur sur album (et plus seulement en live) et accueille à nouveau le guitariste Mike Stone, de retour pour remplacer Parker Lundgren

Bonne nouvelle (pour moi en tout cas) : la première écoute de ce DNA (d’où la séquence d’ADN présente sur la pochette) m’a fait retrouver quelque chose qui m’avait manqué sur The Verdict : une accroche immédiate, un plaisir instantané ! Sans avoir à fournir de gros efforts (oui, je deviens feignant avec l’âge). Dès In Extremis, le dynamique morceau d’ouverture dispensant une vibe old-school (avec un petit twist Maidenien), Queensrÿche se montre en forme et (me) séduit. C’est rythmé (Casey Grillo est très convaincant derrière les fûts), entraînant, avec des guitares arborant un style et un son qui renvoient à ce que le groupe faisait dans les 80s et, pour ne rien gâcher, La Torre demeure le vocaliste classe que l’on a toujours connu. Chapters et Lost In Sorrow confirment ce très bon départ en jouant sur un registre plus mélodique, moins heavy metal, plus proche d’un mix entre Operation: Mindcrime et Empire (mais sans plagiat). Les fans de cette époque vont se régaler : l’écriture est de qualité et il est facile de se laisser embarquer par ces mélodies finement ciselées (le refrain de Lost In Sorrow est un modèle d’efficacité). 

Avec habilité et inspiration, les musiciens (qui ont privilégié le travail en présentiel) continuent de marquer des points tout au long des pistes suivantes. Les nouvelles compos sonnent - en partie - comme du Queensrÿche classique, celui qui a donné au groupe sa réputation de grand du metal (avant la chute), sans jamais sombrer dans la facilité ou la copie carbone. En plus, le groupe s’amuse à varier les styles et ambiances, puisant dans les différentes évolutions de sa carrière de sorte qu’il y en ait (presque) pour tous les goûts. Et tout cela sans que Digital Noise Alliance ne sonne comme une œuvre radicalement nostalgique... beau tour de force ! Après un trio d’ouverture facile d’accès, Queensrÿche va complexifier légèrement (et progressivement) son propos. Sicdeth ramène une bonne dose de heavy dans la formule, mais le morceau est changeant et parfois menaçant (d’un point de vue vocal notamment), Behind The Walls introduit davantage de froideur, des claviers, et un esprit prog épique (rien à voir avec le rongeur) qui peut rappeler l’album Rage For Order, Nocturnal Light poursuit ce travail autour d’une atmosphère sombre et électrique sans que la compo ne fasse perdre à l’album de son attrait... Non, vraiment, cette fois-ci, Wilton et compagnie ont clairement réussi à proposer des titres aux accroches mélodiques plus fortes qu’il y a trois ans (ce n’est pas la ballade Forest, douce et mélancolique, aux chœurs - sur le refrain - évoquant une certaine Silent Lucidity qui viendra contredire cette impression) et je pense qu’on tient là leur album le plus abouti depuis bien longtemps. 

Comme c’était déjà le cas sur The Verdict, la fin du voyage est plus aventureuse et progressive. Realms montre un groupe qui lutte contre l’obsolescence en rendant les influences du passé moins prégnantes. Cette piste demandera d’ailleurs plus d’écoutes que d’autres avant d’être mémorisée. Tormentum enfonce le clou sur plus de sept minutes avec un propos plus costaud et conquérant (La Torre en profite pour replacer quelques phrasés bien agressifs qui le distinguent de son prédécesseur), un break instrumental plus progressif que jamais (pour ce groupe) en milieu de parcours et un final quasi Dream Theateresque. Dernière surprise : une reprise (assez fidèle) du Rebel Yell de Billy Idol (La Torre y adopte un style de chant différent, faisant ainsi encore une fois démonstration de son aisance) en guise de conclusion. Le morceau n’a évidemment strictement rien à voir avec ce qui a précédé et fait que Digital Noise Alliance s’achève sur une note rock, fun et enlevée, pour le moins (d)étonnante.

Avec un tel album, Queensrÿche va donner du fil à retordre aux détracteurs qui ont remis en cause sa légitimité ces dernières années (allant même parfois jusqu’à qualifier ce line-up de tribute band). Il faudra en effet une sacrée dose de mauvaise foi pour ne pas reconnaître le talent et la pertinence dont il fait preuve sur ce Digital Noise Alliance qui réconcilie de belle manière le passé et le présent. Serait-ce donc le meilleur disque du Rÿche depuis 1994 (Promised Land) ? En ce qui me concerne, bien qu’il ne puisse reproduire la magie de la grande époque et égaler les classiques du groupe, je répondrai par un grand oui ! 


Tracklist de Digital Noise Alliance :

01. In Extremis
02. Chapters
03. Lost In Sorrow
04. Sicdeth
05. Behind The Walls
06. Nocturnal Light
07. Out Of The Black
08. Forest
09. Realms
10. Hold On
11. Tormentum
12. Rebel Yell

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