Praise the Plague, un nom de groupe qui me parle. Depuis longtemps à la recherche du son qui m’envoûte et m’emmène ailleurs, je suis tombé par hasard sur ce groupe durant mes pérégrinations musicales. Cette sortie est la première galette (après deux EP et un live) des germains et cela ne déroge pas au cliché de la rigueur allemande et qui m’a propulsé ailleurs malgré un style aujourd’hui classique.
Commençons d’abord par l’artwork de l’album ... Hé oui, c’est dans ce sens que j’explore les albums. Tel un enfant avec un jeu vidéo, je choisissais parfois des albums en fonction de leur artwork. Mais je vous rassure, je ne procède plus vraiment de cette manière. Cependant, avant d’écouter un album, je prends toujours le temps de bien observer son enveloppe graphique qui m’ancre au contenu auditif (c’est de plus en plus difficile avec les plateformes de diffusion en ligne).
L’artwork est sombre et ne se laisse pas apprécier du premier coup d’œil. De prime abord, on aperçoit un amas de formes dans la pénombre d’une caverne éclairée simplement par une lune pâle. En s’attardant, on discerne clairement une noire congrégation au sommet d’un précipice lugubre et vertigineux : une procession maligne, composée d’anges, de monstres et d’hommes, menée par la représentation ovine de Baphomet. Cela laisse présager d’une noirceur subtile, iconique et symbolique – soit dit en passant cela n’est pas rare mais l’artwork est vraiment sublime avec ses nuances de noir, gris et sépia – dans la même veine que leur précédent opus. Il est vrai que même si le thème général de l’album est différent des derniers EP (L’Enfer de Dante), l’illustration nous rappelle tout de même une œuvre de Gustave Doré – La Procession apocalyptique – où l’on discerne clairement humains et anges en pleine procession. Le groupe a extrapolé l’illustration en sortant du cadre en imaginant la procession vue d’un angle différent.
Alors que les précédents EP s’attachaient à suggérer l’enfer de Dante, celui-ci se centre sur l’illustration textuelle et auditive d’un rêve tournant au cauchemar dont le protagoniste ne peut se réveiller car il est en fait mort. Le groupe s’est notamment inspiré de témoignages de personnes ayant vécu des NDE (pour Near Death Experience). Bon, en fait on pensera quand même à Dante et sa descente aux enfers… Je pense que les Allemands n’ont pas su se détacher de ce thème qui finalement est riche en symboles en y faisant tout de même quelque peu allusion.
En termes de composition, The Obsidian Gate fait suite aux deux EP précédemment sortis en 2017 Antogonist I et Antognist II et s’inscrit parfaitement dans la lignée de ces derniers.
Praise the Plague nous propose ici une combinaison de styles déjà entendus auparavant, mais le groupe a eu le talent de faire de l’album un savant mélange entre Doom, Black Metal et Sludge. Cet opus a été composé comme un album concept : en témoigne le nom des titres – The Descent, Blackening Swarm II, The Great Collapse, The Obsidian Gate, Beyond et The Ascent – tous écrits dans un sens précis, le cheminement d’une descente aux enfers vers un retour au calme mortifère. On ressent déjà l’assoupissement puis le réveil de cet homme dès la première piste. Un réveil « poing dans la face » à coup de gros blastbeats bien dosés.
A mon sens, le gros bémol est la durée de l’album (un peu moins de quarante-quatre minutes) que je juge trop courte, comme une histoire qui finirait trop tôt. J’aurais apprécié pouvoir aller plus loin dans les limbes de l’esprit du protagoniste pour me délecter encore un peu plus de la noirceur dans laquelle il s’enfonce.
Cependant, il pourra permettre à ceux qui n’apprécient pas toujours ce style d’en apprécier la beauté en un temps restreint. La longueur de l’opus n’empêche en rien la virtuosité des musiciens qui composent notamment grâce au talent du guitariste Marcel Martin qui n’en est pas à son coup d’essai (ex-Earth Ship, ex-Impure). On parle ici d’un Black/Doom/Sludge propre et carré qui n’a rien à voir avec le black low-fi des 90’s (qui aujourd’hui me semble désuet malgré une bonne partie de fans qui l’apprécient encore, désolé les gars) ou bien le Doom/Sludge aux mix crades au possible. Le côté Doom apporte une touche lourde et atmosphérique qui, en alternance avec les blastbeats de la batterie et les cris, parfois perçants, parfois viscéraux, du chanteur provoque la mise en forme des textes dans notre imaginaire. L’adéquation guitare/batterie est aussi remarquable par sa qualité même si le niveau Mario/Joe Duplantier (Gojira) n’est pas atteint.
Enfin, en termes de mix, c’est surtout la voix qui m’a semblé intéressante. Tantôt devant, prononcée, et tantôt plus à l’arrière et caverneuse. C’est là que l’on retrouve toutes les nuances de l’histoire racontée à travers les textes et que l’on prend la mesure du désespoir du protagoniste et du tumulte de son cheminement.
C’est l’écoute de cet album qui m’a donné l’envie d’écrire et de partager mon engouement pour ce groupe. Il est sombre, bien écrit et composé de manière précise et propre. Il s’écoute d’une traite et surtout permet de toujours découvrir de nouvelles musicalités à chaque écoute. Je ne peux que vous le recommander.