Quand, comme moi, on s'intéresse au djent, il y a un nom qu'on ne peut pas rater, c'est celui de Periphery. Et on ne peut pas parler de Periphery sans évoquer Bulb, le projet solo de Misha Mansoor, guitariste relayant ses morceaux sur soundclick depuis 2004. C'est en effet Misha, fortement influencé par Meshuggah, qui initiera (presque) à lui tout seul ce mouvement encore ignoré par certains. Et même si son héritage laisse dans son sillage bon nombre de perles autant que de simples suiveurs, tous mélangés en une masse de donnée difficilement abordable au premier abord, j'ai toujours eu du mal avec son œuvre, et son groupe.
Mais la faute ne repose pas tant sur les épaules de Misha que de Spencer.
Il y a chez Periphery une espèce de mélange des genres, un contraste sucré-salé entre des mélodies assez pop, facilement mielleuses et des parties bien plus violentes, alambiquées et groovy. Et si les secondes flattent mon oreille, je n'en dirai pas autant des premières. C'était immanquable, le double album nous concernant aujourd'hui contient son lot de sucre. Cela tient principalement à Spencer Sotelo, le chanteur. Il est excellent et maîtrise très bien ses hurlements et son chant clair. Mais il a malheureusement tendance à rendre ce dernier trop mielleux pour moi. Mais depuis le temps que Juggernaut tourne dans mon player, j'ai eu le temps de m'y faire, tentons donc une analyse pertinente :
Tout d'abord, Periphery a choisi de sortir deux albums simultanément. Et en se permettant un petit calcul froid (non pertinent, ça reste à voir), on remarque vite que la durée cumulée des deux skeuds dépasse de seulement dix minutes la capacité d'un seul, c'est-à-dire quatre-vingts minutes. A leur place j'aurai taillé dans le gras. C'est tout pour l'aparté "M. Ralou".
Une des premières choses qui m'a marqué à l'écoute de Juggernaut, c'est l'alternance très régulière entre morceaux doux et morceaux violents. Et sur chacune de ces facettes, Periphery prend plaisir à greffer des influences pop et jazzy dans un esprit moderne. Si les secondes sont distillées avec finesse tout au long de l'album, les premières n'ont pas tardé à me hérisser le poil. Prenez par exemple le refrain de Heavy Heart, on le croirait taillé pour un passage radio. Même en France ça passerait presque ! Mais ce n'est pas pour autant que je dénigre cet album, il s'est développé en moi au fil des écoutes. Il faut bien reconnaître la finesse de son écriture : il est très ambiancé et, sur toute sa durée, ne lasse pas l'oreille. Periphery a enfin réussi à canaliser sa folie et en faire quelque chose de structuré, car si les premiers albums possèdent certaines qualités impressionnantes, ils ne sont pas homogènes. Alors que c'est le cas aujourd'hui.
Cela ne m'empêche toujours pas de me poser cette question : pourquoi deux albums ? Pourquoi pas un double album ? Eventuellement, Alpha est plus lumineux qu'Omega, qui lui est relativement mélancolique. Mais si vous aimez l'un, il n'y a pas de raison que ça ne soit pas le cas pour l'autre. En tout cas les différences ne sont pas suffisamment flagrantes pour justifier deux chroniques. Alpha et Omega s'enchainent très bien et proposent un ensemble cohérent, transformant en douceur l'ambiance développée.
Finalement, l'impression qui subsiste en moi est assez mitigée : d'un côté, j'aime la versatilité proposée, de l'autre, j'ai du mal avec certaines excentricités qui me laissent dubitatif. Mais l'impression globale reste très bonne et je conseillerai quand même l'expérience, il y a de quoi s'éclater à l'écoute de cet album.
Tracklist de Juggernaut :
Alpha :
01. A Black Minute 02. MK Ultra 03. Heavy Heart 04. The Event 05. The Scourge 06. Alpha 07. 22 Faces 08. Rainbow Gravity 09. Four Light 10. Psychosphere
Omega :
01. Reprise 02. The Bad Thing 03. Priestess 04. Graveless 05. Hell Below 06. Omega 07. Strange Things
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