Qu’il est bon d’entendre quelque chose de frais, d’écouter le travail d’un groupe qui ne se contente pas de surfer avec fainéantise sur une vague revival, old school, que sais-je, à peu près aussi passionnante et pertinente qu’une conférence de presse de Jean Castex. Mors Verum n’est pas de ceux qui se contentent de marcher sagement dans les pas des précédents. Le trio tourne le dos au passé, il l’a étudié, certes, regardé, écouté et digéré, bien décidé à le régurgiter à sa sauce à lui en offrant du même coup une nouvelle voie d’évolution à un death metal qui ne demande pas mieux que de rester vivace le plus longtemps possible.
Les cinq titres de ce EP suintent le Gorguts d’Obscura, l’Ange Morbid de Gateways To Annihilation, la grandeur d’Ulcerate et même, parfois, l’abstraction maîtrisée de l’énigme Portal. Tout ça donc, et plus encore, mais intelligemment revu par trois musiciens audacieux qui ont une vision ambitieuse et le talent, fou, qui va avec. Mors Verum crée sa musique, son death metal à lui, accordé tout en bas, en variant les approches, les vitesses, les ambiances. Un death metal vicieux, guttural mais jamais pataud, s’articulant autour d’une batterie ingénieuse qui bouillonne de créativité et de riffs multiformes qui nous jouent toute la palette de l’extrême avec une fluidité désarmante.
D’un très haut niveau technique, sans jamais être démonstratif, vulgaire ou pompeux, The Living brutalise, broie, dissone allègrement, dérange et déstabilise. Impossible de s’ennuyer à l’écoute de ces cinq titres talentueusement écrits, mis en place et arrangés. Cinq titres définitivement trop courts, dynamiques en diable, et, de surcroît, parfaitement produits…écoutez donc cette basse éléphantesque qui racle délicatement le fond du mix et clapote salement sur le début de Death’s !
Restons mesurés, Mors Verum ne nous refait pas le coup de ce Gorguts devenu fou qui renversa la table en 1998 mais il propose néanmoins quelque chose d’unique et semble désireux de creuser son propre sillon dans une scène death metal pas toujours très inspirée et qui résonne trop souvent comme un écho du passé. Evidemment, Mors Verum puise lui aussi dans ces racines communes mais uniquement pour aller de l’avant et sublimer la matière sonore que les Grands Anciens lui ont fourni en héritage. En ce sens, The Living, généreux et chargé d’audace, est une offrande ô combien précieuse sur laquelle il vous faut impérativement poser, pendant vingt-trois petites minutes, votre attention totale et pleine d’un désir gourmand qui sera largement comblé, miam !