Artiste/Groupe:

Evergrey

CD:

Escape Of The Phoenix

Date de sortie:

Février 2021

Label:

AFM Records

Style:

Metal Progressif

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Note:

17/20

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Depuis un peu plus de vingt ans, les Suédois d’Evergrey proposent leur metal racé, classe et mélancolique à qui veut l’écouter... et je fais clairement partie de la cible visée par le groupe. Je le suis d’ailleurs depuis ses débuts et, même si j’ai parfois connu quelques petites déceptions en cours de route, je suis toujours partant pour découvrir ce que Tom Englund et ses collègues ont à nous offrir. Car Evergrey, c’est du sérieux. Sans forcément adorer toute sa discographie, on sait qu’on a affaire à un combo à la personnalité affirmée qui propose une musique puissante, non dénuée d’émotion, élégante et travaillée. Et depuis qu’il a signé chez AFM Records, on note une certaine constance dans la qualité de ses productions. Hymns For The Broken, The Storm Within et The Atlantic ont en effet montré une formation en pleine possession de ses moyens. Ce douzième essai fera-t-il aussi bien ? Voire mieux encore (oui, c’est possible, selon moi en tout cas) ? C’est l’heure de vérité.

Une fois n’est pas coutume, je vais commencer par me débarrasser tout de suite de l’éventuel défaut de l’album (éventuel car tout le monde ne sera pas d’accord, certains verront cela comme une qualité ou s’en ficheront, tout simplement), ce sera fait et je n’aurai plus qu’à me concentrer sur les aspects positifs de cet opus : à l’écoute d’Escape Of The Phoenix, zéro surprise. C’est du pur Evergrey et cet album s’inscrit tellement dans la continuité de ses travaux les plus récents que le groupe aurait pu le sortir en même temps que The Storm Within, par exemple, et dire qu’il s’agissait de sa deuxième partie sans que cela ne choque personne. Donc oui, tout est familier, la recette est la même que précédemment... si vous vouliez être dépaysés, ce ne sera pas pour cette fois. Voilà, il n’y a pas d’évolution notable ni de prise de risque ici. Maintenant, malgré cela, je peux tout de même affirmer qu’Escape Of The Phoenix est une belle réussite. Voire - soyons fous - l’un des meilleurs albums du quintet depuis longtemps.

Tout commence très bien avec Forever Outsider, une entrée en matière directe et enlevée comme le combo n’en avait pas proposé depuis un moment (King Of Errors, Distance ou A Silent Arc étaient très bons mais dans un registre plus mid-tempo voire pesant). On sent tout de suite un petit regain d’énergie après un The Atlantic bien beau mais qui n’était pas l’album le plus musclé d’Evergrey. Très bon riff typique du groupe, ambiance grave sur des breaks endiablés, beau solo et mélodie qui nous emporte sur un refrain conquérant. Emballez, c’est pesé ! La grande forme des Suédois se confirme avec Where August Mourn, plus "single" dans l’esprit avec des mélodies léchées, notamment lors d’un refrain entêtant. Le passage instrumental qui précède le solo limpide et concis (servi par un Henrik Danhage qui, on va vite le voir, se montre très inspiré sur ce disque) est méchamment heavy... un régal ! Détail d’importance : on y est habitué depuis quelques albums mais ça fait toujours plaisir, le son est absolument sublime. D’une puissance et d’une clarté exceptionnelles. Cela ne gâte rien... De toute façon, du superbe artwork à la production en passant par les paroles, on sent que tout a été bien pensé et soigné. Un vrai travail d’orfèvre. Enfin, gagnons du temps, ce qui a été perçu jusque-là va se confirmer : Escape Of The Phoenix est un album un peu plus "metal" et direct que son prédécesseur. 

N’allez pas croire pour autant qu’Evergrey a délaissé sa mélancolie ou sa pesanteur. Des plages plus calmes, il y en a. Dès la troisième piste d’ailleurs, avec Stories : un titre lent introduit par un piano et le chant tout en émotion de Tom Englund (il commence d’ailleurs comme du Silent Skies, autre projet du chanteur) avant qu’une lourdeur métallique n’arrive sur le refrain avec le reste du groupe. Le travail sur l’ambiance est remarquable (aaahhh... les claviers d’un Rikard Zander toujours impeccable, la mélodie prenante du refrain livrée par un Tom impérial) et le solo est (encore !) de toute beauté, sobre, fin, gorgé de feeling. Le punch s’invite de nouveau à la fête avec A Dandelion Cipher dont le riff porte la marque de l’évolution moderne du groupe sur ses albums les plus récents (même remarque pour la chanson titre, une vraie tornade heavy - avec double grosse caisse au menu - au riffing syncopé et sec ressemblant à s’y méprendre à celui de A Silent Arc sur l’album précédent). La batterie de Jonas Ekdahl (qui a co-écrit et co-produit l’album avec Englund) est massive, ce qui n’empêche pas à la compo de posséder une certaine subtilité, le groupe sachant manier l’art du contraste comme quand les instruments se taisent subitement, laissant Englund accompagné d’un clavier discret pendant quelques secondes avant que la tempête ne reprenne de plus belle. Le tempo ralentit sur The Beholder, sorte de ballade (très heavy tout de même) sur laquelle est invitée un certain James LaBrie. Douceur et mélancolie sont au menu de In The Absence Of Sun. Zander délaisse un peu les sonorités électro pour ressortir le piano et ce morceau intense et envoûtant jouit d’une très belle atmosphère. Eternal Nocturnal est un autre excellent single, bien rythmé, entraînant et doté d’un refrain mémorable. You From You est une autre ballade bien dark (oui, c’est Evergrey pas Scorpions) et réussie qui contient l’un des plus beaux solos de l’album. Pour finir, Leaden Saints et Run remettent le metal au centre avec riff bien torturé pour la première et tempo plus enlevé pour la dernière. Toutes les qualités perçues précédemment sont toujours de la partie, Escape Of The Phoenix n’étant pas un disque qui place vite fait ses meilleures compos au début pour s’essouffler par la suite.

Ce douzième opus n’est donc pas - d’un point de vue stylistique - une énorme surprise. Comme dit plus haut, on reconnait parfaitement le groupe qui, sur ce coup, n’a pas cherché à bousculer nos attentes. En revanche, cet album est à considérer comme un aboutissement. C’est une belle synthèse de tous les ingrédients disséminés précédemment formant un tout équilibré et cohérent. J’avais reproché un petit manque de pêche à Hymns For The Broken ou The Atlantic (bien que j’aime ces deux disques), je n’aurai pas à le faire ici : point d’enlisement causé par trop de pistes calmes cette fois. Beau, tourmenté, heavy, sombre, rythmé... Escape Of The Phoenix, c’est du Evergrey en grande forme qui connait ses points forts, a bien su peaufiner son style et sortir un de ses albums les plus consistants. 2021 ne fait que commencer mais il me semble que l’on tient déjà l’un des grands disques de l’année. Si la situation sanitaire mondiale voulait bien évoluer positivement, nous aurions alors la chance de voir le groupe se produire en Europe à la fin de l’année. Quatre dates sont prévues en France début novembre (avec Witherfall et Dust In Mind en guise d’apéritif)... on croise les doigts.

Tracklist de Escape Of The Phoenix :

01. Forever Outsider
02. Where August Mourn
03. Stories
04. A Dandelion Cipher
05. The Beholder (feat. James Labrie)
06. In The Absence Of Sun
07. Eternal Nocturnal
08. Escape Of The Phoenix
09. You From You
10. Leaden Saints
11. Run

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