Les cultures nordiques n’en finissent plus de séduire. La Nature ayant horreur du vide (tout en aimant à se cacher) et nos sociétés occidentales étant sorties de leur tradition chrétienne avec tous les dangers induits par cet effacement, les cultures païennes pré-chrétiennes sont revenues sur le devant de la scène et ne cessent de passionner. Et parmi ces dernières, celle des vikings séduit particulièrement. On ne compte plus les films / séries / livres sur ce sujet ô combien porteur, visuellement passionnant et culturellement très puissant (et au-delà la littérature nordique). Dans nos sphères musicales, l’impact et l’influence des scandinaves n’est pas nouvelle, mais j’ai ce sentiment qu’elle a encore augmenté avec l’arrivée de la Norvège dans la partie au début des 90’s quand la Suède était alors dominante culturellement sur la région. Et de fait, des groupes comme Wardruna ont apporté quelque chose en plus, une puissance dans les thématiques avec une vraie profondeur en plus d’une approche historique. On rentre presque dans une logique cultuelle avec des shows très impactant, immersifs et reprenant au passage les codes du sacré, certaines prestations étant pensées non comme un simple spectacle (aussi abouti soit-il) mais dans une démarche plus profonde. Le succès aidant, de nombreuses formations ont suivi le mouvement bien aidé par un music-business fidèle à sa vocation / fonction. On a donc eu les norvégiens, les islandais (qu’il convient de citer à l’impact puissant, malgré une population plutôt réduite). Eivør (Palsdottir de son patronyme complet) nous vient des Iles Féroé (50 000 habitants répartis sur l’archipel) et s’inscrit dans la dynamique évoquée. Originaire de Syðrugøta, patelin de 500 âmes situé dans l’archipel des Iles Féroé dont on recommandera de consulter quelques photos sur la toile. Maisons colorées en bois caractéristiques, le Grand Nord de carte postale qui fait rêver. Eivør nous vient donc d’un environnement très isolé et forcément, cela donne un cachet, une originalité à sa personne. Dès l’âge de 15 ans, la féroïenne se fit remarquer, sortit rapidement son premier disque. La suite ? une trajectoire remarquable où elle put user de sa voix d’or pour sortir nombre de disques et devenir une référence dans la musique nordique évoluant avec talent dans l’axe Reykjavík - Oslo - Tórshavn.
Il est vrai qu’avec une telle voix, la chanteuse se remarque. Voix d’ange aux possibilités infinies, Eivør a en plus un petit air à Lady Gaga ce qui ne peut qu’aider dans l’industrie du disque. Elle bénéficie de l’association aux scènes nordiques ce qui lui permet d’être invitée au prochain Hellfest (tête d’affiche sur la Temple s’il vous plaît) ce qui vu sa musique assez teintée de dark wave n’était pas intuitif. Reste des atmosphères sombres, inquiétantes et des thématiques qui ne pourront que plaire à un public fan de ces musiques. Et quelle voix !! Ok je l’ai déjà précisé mais à la première écoute, impossible de ne pas être subjugué. Musicalement, nous sommes devant une dark wave assez typé 80’s certes dotée d’une production moderne mais moult sonorités font penser à cette décennie, dans sa version dark. C’est très marqué sur Hugsi Bert Um Teg. J’en profite pour préciser qu’aucune analyse de texte ne sera proposé ici. Eivør chante dans sa langue maternelle, cela sonne bien mais à l’instar d’un Sigur Ros, impossible de comprendre quoique ce soit. Venant d’une contrée qu’elle qualifie elle-même d’extrême, ultra contrastée entre hivers glaciaux très sombres, étés très lumineux, grands espaces avec une nature dominante, Eivør incarne toute cette versatilité, tour à tour douce, apaisante ou angoissante, sombre. C’est tout un « pays » que raconte Eivør. Avec des guitares aussi peu présentes, Eivør plaira à un public en quête d’atmosphères, d’ambiances. Décidément, les cultures nordiques continuent de plaire mais au vu de la qualité artistique produite, du nombre d’artistes attachants et talentueux produits, on ne s’en étonnera pas. Et pour les curieux du Hellfest, ça peut mériter un détour. Rendez-vous 1h sur la Temple le samedi soir (enfin le dimanche matin), digestif classieux possible après le show des Metsun peu plus tôt sur les Main stage.