Artiste/Groupe:

Darkthrone

CD:

Eternal Hails...

Date de sortie:

Juin 2021

Label:

Peaceville

Style:

Metal chiant

Chroniqueur:

Ignatius

Note:

11/20

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La position du chroniqueur n’est pas toujours la plus aisée. Que faut-il réellement prendre en compte quand vient l’heure de donner son avis, car il ne s’agit au final que de ça, sur un disque ? A quel moment la carrière, l’histoire et l’influence d’un groupe doivent être des éléments qui vont orienter l’écoute et le jugement ? A quel point ces éléments extra musicaux vont forcer l’indulgence au point de biaiser la réception d’un album puis la sentence ? Faut-il laisser la tendresse que l’on ressent pour un groupe, le lien qui peut nous unir à lui, étouffer toute forme d’objectivité pour protéger, inconsciemment peut-être, l’artiste qui nous a tant apporté ?  
Bien évidemment, si ce nouvel album de Darkthrone avait été une réussite absolue, toutes ces questions parasites ne se poseraient pas mais voilà, Eternal Hails… est, en ce qui me concerne, difficilement défendable. Je pourrai faire une pirouette en parlant de la démarche unique du groupe qui pousse toujours plus loin son besoin d’authenticité, de ce je m’en foutisme magnifique, de la culture métallique immense de Fenriz qui nourrit cette œuvre dédiée à l’Histoire du genre, etc, etc. Parler de tout pour éviter, au final, de parler de musique.  L’honneur serait sauf et je n’aurais pas égratigné le mythe.

Mais, décidant de mettre mon honnêteté au défi, je pose la question que tout fan redoute, si cet album n’est pas celui d’un groupe que j’aime, de la légende Darkthrone, mais plutôt l’oeuvre d’un obscur combo Slovène, Mexicain ou Italien, aurait-il récolté autant d’éloges ? Moi le premier, aurais-je lutté contre l’ennui pour m’imposer suffisamment d’écoutes afin de rédiger consciencieusement cette chronique que vous êtes en train de lire ? La réponse est très clairement non ! Non parce que seuls le nom, célèbre, et la très chouette pochette ont titillé ma subjectivité au point de laisser à cette galette d’innombrables secondes chances que je n’aurai jamais accordé à d’autres moins connus, d’autres qui n’auraient pas à ce point marqué ma jeunesse et mon parcours musical.
Assoiffé de justice pour tous les mauvais, les sans talent, les médiocres à qui on ne laisse jamais le temps de s’expliquer, je décide donc d’occulter tout ce qui ne concerne pas la musique, uniquement la musique, en essayant d’être le plus objectif possible et tant pis pour les légendes si elles doivent être traitées comme le petit peuple.

Eternal Hails…, donc, m’a ennuyé dès la première écoute et ça ne s’est jamais arrangé par la suite, pire je n’ai jamais réussi à rester concentré sur le disque qui enchaîne, sans réelle logique, les riffs moyens avec d’autres peu inspirés. Quelques moments permettent de sortir provisoirement de la torpeur, Wake Of The Awakened parvient à sortir son épingle du jeu, l’intro prometteuse de His Master’s Voice, la seconde partie de Voyage To North Pole Adrift ou encore le  final absolument magnifique de Lost Arcane City of Uppakra que j’aurai aimé entendre tourner beaucoup plus longtemps contrairement à bon nombres de plans lourdauds qui s’éternisent inutilement. Quelques moments qui poussent à se dire qu’en creusant, en étant patient, il finira par se passer quelque chose mais non, les structures à rallonge des morceaux en mode “collage de riffs” et les vocaux étrangement inexpressifs finissent par réduire tout espoir de déclic à néant. Le constat, qui se dessinait déjà sur les deux précédents albums du groupe, s’impose douloureusement, Darkthrone est devenu terriblement chiant ! 

En effet,  pas aussi à l’aise qu’ils semblent l’imaginer avec la lenteur, un peu comme Iron Maiden confond musique progressive avec morceaux looongs, Fenriz et Nocturno Culto semblent confondre Doom metal et metal sans énergie. Le duo, depuis quelques années maintenant, ralentit le tempo, nous parle en interview de Candlemass ou de Trouble, mais ne remplace pas la fougue qui fut la sienne par cette intensité dramatique, cette profondeur, qui nous saisit à l’écoute des grands classiques du genre. Non, Darkthrone se contente de ralentir et de produire ses albums avec le c.. pour injecter, avec ce son sans puissance et sans relief, une sorte de feeling factice sensé nous immerger dans l’époque du “vrai metal”. Gageons que si le metal des années 70/80 avait été aussi mou, le genre aurait depuis longtemps disparu et  ne serait aujourd’hui plus qu’un lointain souvenir.

Alors oui, Darkthrone remonte le temps et explore le Metal d’avant mais je préfère définitivement écouter le Metal d’avant quand l’envie me prend, parce qu’il est animé par l’énergie de l’époque totalement absente ici. Si la démarche du groupe est inattaquable sur le plan de l’intégrité, intouchable dans le fond, elle est beaucoup plus fragile dans la forme parce que le groupe, trop limité sur le plan purement musical, n’a définitivement pas les moyens techniques de ses ambitions. Les solos sont gênants, les harmonies de guitares font de la peine, les lignes de basse manquent d’idées et même Fenriz derrière ses fûts livre sa partition la moins créative.

L’heure du triste bilan a sonné, comme à chaque fois Darkthrone sur le papier fait saliver sa meute avec des artworks affriolants, des “expect the unexpected” excitants mais pourtant Artic Thunder m’avait laissé de marbre, Old Star n’avait pas fait mieux et Eternal Hails… enfonce encore un peu le clou. Je m’apprête à coller un 11 sur 20 à Darkthrone, qui l’eût cru… Sale époque.

Tracklist de Eternal Hails... :

01. His Master’s Voice
02. Hate Cloak
03. Wake Of The Awakened
04. Voyage To A North Pole Adrift
05. Lost Arkane City Of Uppakra

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