Groupe:

Solstafir + Oranssi Pazuzu

Date:

28 Novembre 2024

Lieu:

Toulouse

Chroniqueur:

ced12

Belle date encore organisée par Noiser (qui décidément les accumule) avec les cowboys islandais de Solstafir et les réputés Oranssi Pazuzu. La météo est assez versatile avec des matinées très fraîches dans le brouillard avant l’arrivée d'un grand soleil où il fait incroyablement doux et beau en journée. Météo contrastée, donc, à l’image de cette affiche pas intuitive sur le papier hormis les origines nordiques des protagonistes. S’il n’y avait plus d’embouteillage sur la route, côté concert, c’est plus compliqué. En effet, Within Temptation joue au Zénith non loin. Pour certains (dont je ne suis pas, que le sieur Kabet me pardonne), il a fallu faire un choix. Au passage, l’écart de prix entre les deux shows en est presque caricatural (27€ contre 56€, il y a tout de même un souci !), ce qui continue de laisser perplexe. Enfin, là n'est pas le sujet de ce papier. 

Faute de temps, je manque Helga groupe dont la bio laisse songeur. Une jeune fille longtemps isolée dans l’arrière-pays suédois errait souvent seule et en aurait développé une forte connexion à la nature. Développant ainsi Psaume, chant en hymne à la Nature, la vocaliste a ensuite émigré à York en terre anglaise, découvert la « civilisation » et en a conservé une nostalgie de la Nature (ce qui peut se comprendre). L’accueil du groupe suédois a semblé bon, la salle étant très bien remplie alors que je rentrais dans les lieux… pour entendre la dite chanteuse dire merci et le groupe s’en aller. A revoir (ou pas). A écouter surtout même si le concept m’a paru un peu « cliché » à tout dire. 

Oranssi Pazuzu

En finnois, Oranssi veut dire Orange et Pazuzu c’est l’ancien démon mésopotamien du vent. Voilà pour la signification du patronyme et cela confirme ce qu'est ce groupe. Référencé et décalé. Avant-gardiste quoi. C’est peu dire que le groupe est très attendu. J’avais essayé d’écouter en amont le dernier album Muuntautuja paru cet automne (très représenté dans la setlist comme cette dernière le confirme). Bon, cela s'est avéré être une tentative infructueuse tant le black psychédélique du groupe m’a laissé perplexe. J’appréhendais donc un peu et sincèrement, le show des finlandais était vraiment bon. Si les approches avant-gardistes / expérimentales ne sont pas du tout ma tasse de thé, l’approche du groupe reste intéressante. La démarche est proche de l’électro avec le recours à des synthés, des boucles permettant ainsi de poser des ambiances, les faire tourner et ainsi développer des atmosphères qui, ma foi, passent plutôt bien.

Mon seul véritable souci sera ce chant, typiquement black, très sombre et profond et bourré de réverb. D’ailleurs, comme pour me confirmer ce ressenti, la seconde piste instrumentale me conviendra très bien. Ce n'est pas le frontman à la présence imposante et adaptée au concept que je critique, c'est mon goût personnel (je n'écoute pas de black n'aimant pas tout simplement). Avec des rythmiques bien troussées, l’approche transcendantale fonctionne et l’heure de show passe vraiment très bien. L’interaction avec le public est réduite au minimum (aucun mot ne sera d’ailleurs prononcé). Le second guitariste (assurant pas mal de claviers) lui ne cessera de bouger dans tous les sens, rendant la logique de trance palpable. Le public très réceptif écoute comme il faut, ça réagit peu forcément, la musique ne s’y prêtant pas. Reste une démonstration de force, hyper cohérente de bout en bout, une belle immersion dans un univers musical qui m’était étranger. La prestation a été très appréciée et le concert a marqué les esprits. Offrant une musique certes très conceptuelle, Oranssi Pazuzu délivre un show accessible et pour le néophyte que je suis, je n’ai eu aucun problème à bien comprendre ce qui se passait et même à profiter de cette musique (à part ce chant qui décidément me rebutera toujours). L’utilisation des synthés, très psychédélique, peut même faire penser à un Pink Floyd méchant. Alors que le dernier Blood Incantation (qui retient les mêmes influences psyché dans un death plus classique) se fait remarquer en ce moment, je n’ai pu m’empêcher de me dire que la musique psychédélique revenait un peu sur le devant de la scène. Un show vraiment intéressant, et pourtant ce n’était pas gagné me concernant.

Setlist
Bioalkemisti
Kuulen Aäniä Maan Alta
Muuntautuja
Uusi Teknokratia
Valotus
Hautatuuli
Vasemann Käden Hierarkia

Solstafir

Alors que la sono envoyait du gros rap US assez « dur » avant Oranssi Pazuzu, nous avons droit ici à des chansons venant du grand Nord avec un chant très Einar Selvik. La transition est un peu rude et d’ailleurs, j’ai entendu quelques échos de certains disant qu’il n’était pas possible de passer après une telle claque. Le concert d'Oranssi Pazuzu a clairement laissé des traces. Mais les islandais savent y faire. Le démarrage est un peu surprenant avec un long instrumental de dix minutes, très rock avec une approche presque jam (78 Days In The Desert). Pas le meilleur démarrage possible même si, de fait, la musique des islandais, souvent atmosphérique, nécessite de bien rentrer dedans et commencer par un titre lent et planant est impensable. La dimension rock reste très présente et souvent, certains aiment à rappeler les débuts black du groupe (qui commencent à dater). Aucune trace de cette dimension désormais Solsatfir proposant un post-rock atmosphérique souvent du plus bel effet. 

Silfur-Refur issu de l’excellent Berdreyminn pose enfin les premières ambiances du groupe et ça le fait. Et puis cette voix, reconnaissable entre mille. Magnifique et iconique en plus d'être totalement incarnée. Le groupe, en bon islandais, va ensuite souffler le chaud et le froid, le Feu et la Glace avec des titres plus rock, plus dynamiques et d’autres plus planants. Problème de riche du combo, le choix de la setlist n’est pas simple avec tous ces classiques (et surtout quand on envoie des titres de plus de dix minutes, forcément ça limite). Les trois titres du dernier album passent bien, Hun Adar surtout, excellente ouverture du dernier disque très dynamique. Le morceau Blakkraki m’a moins convaincu, même ressenti que le son studio au passage.

Au final, c’est un peu la limite du post-rock qu’on retrouve ici. Certains passages ne semblent mener nulle part et parfois on a le sentiment que les groupes font « long » pour faire long. Ritual Of Fire joué dans le dernier tiers du set en est pour moi l’incarnation où je me demandais si le morceau allait se finir à force de relances incessantes pas toujours avisées. Mais parfois, la transcendance se fait et l’atmosphère décolle. Fjara bien sûr emporte tout, enivre à l’infini. Rien que l’intro est déjà majestueuse et ce final ! Ah les iconiques chœurs féminins n’y sont pas, repris par la guitare de l’impeccable chanteur Aðalbjörn "Addi" Tryggvason mais le cerveau fait parfois bien les choses (pas toujours le cas malheureusement) si bien qu'on croirait presque les entendre. C’est magique et ça passe toujours aussi bien. Même constat pour Otta, longue montée en puissance démente, iconique là encore. Sur ces morceaux, Solstafir tutoie les étoiles qui sont encore de sortie ce soir. 

Le groupe ne fait même pas semblant de demander un rappel enchaînant Goddess Of the Ages non sans présenter les musiciens tous excellents, bien que dans la tradition nordique avec des visages impassibles à l’auditoire. Svavar "Svabbi" Austmann impressionne tout particulièrement à la basse avec son jeu au doigt bourré de feeling. Sæþór Maríus "Pjúddi" Sæþórsson est aussi efficace que discret à la seconde guitare. Mais le maître de cérémonie c’est bien Aðalbjörn "Addi" Tryggvason qui ira marcher sur la barrière chanter ce dernier titre en se tenant aux mains des premiers rangs du public. Un frontman charismatique (à la voix toujours aussi impériale et iconique je le répète mais c'est si impressionnant) qui aura encore parlé de cette Islande si chère au cœur et à l’âme de Solstafir. Un final de toute beauté (avec cette guitare qu’on croirait sortie de la BO d’Inception sur un passage planant) pour une soirée très réussie qui aura encore fait le plein (ou pas loin car c’était bien remplie ce soir malgré la concurrence). Au final, Solstafir a délivré un très bon show, prenant malgré quelques petites longueurs pas méchantes et inhérentes au style. Mais les passages « haut de gamme » ont tout emporté. Ça fait bien plaisir de retrouver Solstafir un peu en retrait depuis quelques années. Un groupe toujours aussi original et épatant. Et Oranssi Pazuzu très belle « découverte ». 

Setlist
78 Days In The Desert
Silfur-Refur
Blakkrakki
Svartir Sandar
Ljos I Stormi
Hun Andar
Fjara
Hin Helga Kvöl
Ritual Of Fire
Otta 
Goddess Of The Ages

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