C’est la salle de la Nef à Angoulême, qui accueille ce soir une date à part
dans sa programmation habituelle puisque ce soir se produisent deux des groupes les atypiques de la
scène Metal avec Fange et Ken Mode. Les deux groupes proposent
leur vision de la musique et distillent une musique totalement à fleur de peau, aussi abrasive
qu’écorchée vive. Un grand merci à Meriem pour avoir rendu ce live report
possible.
Fange :
C’est Fange qui ouvre le bal, et soyons clair d’entrée de jeu. Les
Rennais ne vont pas laisser grand-chose après leur passage. Toujours menés par mené
par Matthias Jungbluth, qui est plus qu’accessoirement le boss de
l’excellent label Throatruiner Records, Fange nous aura dépend tout au
long de ce concert : “ses cauchemardesques paysages sonores aux rythmiques industrielles
piquantes, riffs Death des plus punitifs et ambiances Sludge sans pareil.”
Cette description qui introduit le groupe n’est absolument pas galvaudé puisque
Fange va nous asséner ses ambiances malsaines ainsi que sa puissance lourde qui
frappe comme un coup de pelle de Marcel Barbeault. La musique de Fange
est faite pour créer une forme d'oppression au pauvre auditeur qui se trouve face à la
scène. Que ce soit le son est massif, dont les basses remontent les tripes à la gorge, les
arpèges aussi inquiétant qu’une BO de film d’horreur, le tout enrobé
d’une modernité évidente, l’ensemble relève autant de l'uppercut que du
rouleau compresseur. C’est impressionnant !


Malgré une configuration scénique un peu particulière puisque
Fange n’a pas de batteur sur scène, il y a du mouvement le chanteur avec ses
attitudes qui me rappelle le chanteur de TDEP, éructe ses paroles avec une
puissance rare et nous plonge dans l’expression de ses angoisses les plus profondes. Le groupe
joue donc sur bande, ce qui n’aide pas à la communication, mais le bougre nous aura
transmis son énergie par son attitude. Du côté des musiciens, ça headbangue
férocement, se frappe le torse au rythme des coups de boutoir, et oscille entre riffs techniques
et plus bas du front.
Fange m’aura complétement soufflé par sa prestation qui à
couper le souffle. Et même si le groupe quitte sans un mot la scène, c’est bel et
bien par sa musique que Fange nous aura fait passer par un panel d’émotion
extrêmement varié. Un grand concert !


DETRUIRE :
Le temps du changement de plateau, c’est le one man band DETRUIRE qui prend le
relai dans le patio de la Nef. Le projet est présenté ainsi : “Des sons
samplés, des voix hurlées, mantras étouffés et des fields-recordings se
confondent et se confrontent dans un flou Power Electronics. DETRUIRE propose sur
scène une performance Harsh Noise abrasive laissant beaucoup de place à
l’improvisation.”
Sa performance me renvoie à ce que peut faire Mike Patton que ce soit
dans Fantômas
ou bien encore Adult Themes for Voice. Les samples vont de la noise, à de la
musique classique, tandis que l’homme hurle ses paroles soit sur la foule, soit la tête dans
les enceintes. Un concept qui, à défaut d’être totalement passionnant,
interroge, bouscule et a le mérite de marquer les esprits.
KEN Mode :
C’est l’ami Fabulous qui m’avait initié en 2018 aux joies de KEN
Mode, et c’est avec l’excellent album Loved que j’avais
été totalement happé par la démarche artistique des Canadiens et leur
univers si singulier. Et autant vous dire que le quatuor composé des frangins Jesse
et Shane Matthewson respectivement à la guitare et chant, et à
la batterie, de Scott Hamilton à la basse et de la multiinstrumentiste
Kathryn Kerr vont nous faire jongler avec nos émotions.
Mention spéciale à Jesse qui avec sa voix totalement
écorchée vive va nous offrir une prestation à hérisser le poil. Son
énergie est palpable, son implication est sans faille, et son besoin de lâcher les chevaux
face à une société qu’il ne comprend manifestement pas (Pour rappel KEN
signifie Kill Everyone Now) font de lui un frontman d’exception. Et lorsqu'il se met en
lumière sur l’excellent titre Lost Grip, du début avec son intro martiale
accompagné de son contrejour enivrant, en passant sur sa boucle et la redondance des paroles (We
Deserve This !) jusqu’à sa fin apocalyptique, il nous transporte pendant dix minutes dans
sa transe... L’homme nous aura offert une prestation en tout point remarquable !


Du côté des autres musiciens c’est également un véritable show de tous
les instants. Scott est totalement intenable, il vit sa musique autant que le chanteur
et s’implique physiquement dans chaque note jouée jusqu’à planté la
tête de sa basse dans le sol. Shane derrière sa batterie n’est pas
en reste, et j’aime autant vous dire que je n’aimerais pas être la peau de sa caisse
claire ! De toute façon, c’est bien simple, la batterie ressemble à un jouet dans
ses mains et la puissance physique du bonhomme est incroyable. Il sera tellement pris dans la folie du
show qu’il fait voler le casque pour être au plus proche de l’ambiance de la
scène. Quant à Kathryn, elle est au four et au moulin. Elle assure les
ambiances et les transitions entre les titres grâce aux machines mais elle contribue
également à rajouter des parties de saxophone qui sonne comme des solos.
KEN Mode aura été grand ce soir, leur musique qui confère aussi
bien au Rock, qu’à la Noise. Elle est teintée de couleurs si différentes,
qu’il est impossible de rester insensible à l’univers développer en live. Une
belle soirée comme il est rare d’en trouver dans notre belle Charente. Merci à la
Nef et à Merieme pour avoir rendu ce moment possible !


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