Groupe:

Manticora + Loch Vostok

Date:

09 Mars 2019

Lieu:

Paris

Chroniqueur:

Blaster Of Muppets

Ceux qui connaissent et apprécient Manticora devaient être contents le samedi 9 mars dernier... car le groupe est passé, en compagnie de Loch Vostok et Hexed, dans la salle parisienne ultra-intimiste de la Boule Noire. Seulement, ils n'étaient pas nombreux à être contents... car au moment où je suis arrivé (lègèrement après le début du set de Loch Vostok, Hexed, ce sera donc pour une autre fois), la salle était très peu remplie. Alors soit, Manticora, j'aime mais je suis suffisamment objectif (et informé) pour savoir que ce n'est pas ce combo qui va faire déplacer énormément de monde. Le groupe, bien que pas totalement inconnu dans le milieu du Power Metal thrashisant et progressif, n'a jamais eu un énorme succès. Mais là, j'avoue que je suis quand même surpris. Une petite salle et peu de public, certes, c'était prévisible... mais une quarantaine de métalleux (j'ai compté), aïe... c'est douloureux. Pour autant, malgré cette gêne ressentie par votre serviteur (qui se met à la place des musiciens faisant face à une salle quasi-vide), la soirée ne fut pas désagréable, bien au contraire. Les groupes et le peu de fans présents, n'ayant clairement pas envie de s'être déplacés pour rien, ont dû faire "avec les moyens du bord" mais sans se laisser abattre. Pour revenir à ce que je disais au début, on peut même affirmer qu'il y avait donc deux raisons d'être satisfait ce soir-là. D'abord parce que le groupe est venu nous rendre visite dans une petite salle comme on (ou certains en tout cas) les aime, mais aussi parce que, du fait de cette très faible fréquentation, on avait vraiment l'impression d'assister à un concert ultra privé, genre "Manticora et Loch Vostok viennent jouer dans ton salon". Voilà, parfois, il faut savoir regarder le verre à moitié (ou au quart) plein.

Loch Vostok 

Voilà un groupe que je ne connais quasiment pas. J'ai juste écouté quelques extraits avant de me rendre au concert et j'y ai trouvé des choses intéressantes. La musique est musclée, changeante, technique... pas toujours hyper facile d'accès (surtout quand on ne connait pas les compos au préalable) mais les accroches mélodiques (me rappelant parfois le groupe Evergrey) et le niveau technique de ces Suédois rendent le set intéressant. Alors certes, ce style musical (metal progressif) n'est pas nécessairement le plus catchy ou le plus rock'n'roll (encore plus pour un premier contact live) mais Loch Vostok a des arguments. 

Le chanteur/guitariste a trouvé un truc entre les chansons, il fait crier l'assistance juste après avoir compté jusqu'à quatre... A la fin du décompte, il nous demande de pousser un gros "Huh !!!" bien barbare... Et ça marche, tout le monde se prête au jeu et ça a l'air de lui faire plaisir. On ne va pas lui refuser ça, déjà que nous ne sommes pas beaucoup à nous être déplacés... Petite pointe d'humour : on remarque une petite inscription "Loch Vostok sucks" faite au marqueur sur le bas de la guitare du frontman.


A part ça, pendant les morceaux, l'assistance est calme mais semble apprécier la musique tonique, sombre (parfois torturée) mais toujours mélodique du combo suédois. La paire de guitaristes tricotent du riff costaud et sait délivrer des solos bien ficelés, le tout étant soutenu par un clavier présent sans être envahissant, un bassiste qui occupe bien le devant de la scène et se déplace plus que ses compères (plus statiques), et surtout un batteur qui se révèle très impressionnant techniquement (pour la petite anecdote, Lawrence Dinamarca, car c'est ainsi qu'il se nomme, est celui qui a enregistré les parties de batterie sur le dernier Manticora, To Kill To Live To Kill). Sympa.


 

Manticora

Quand les Danois arrivent sur scène... ils ont le droit à un accueil bien chaleureux. Et comme nous allons vite nous en rendre compte, Manticora n'a visiblement pas l'intention de prêter attention au nombre forcément décevant de présents dans la salle mais compte plutôt donner le maximum. Les musiciens sont donc très souriants, conquérants, prêts à tout donner... à tel point que je me dis qu'ils n'auraient probablement pas pu faire meilleure figure devant une Boule Noire pleine à craquer ! 


Musicalement, c'est un début sur les chapeaux de roue que nous offre le quintet vu qu'il a décidé d'ouvrir le set avec deux chansons extraites de ce que je considère comme son meilleur album, l'excellent 8 Deadly Sins. On se prend donc King Of The Absurd et Playing God, les deux premières chansons de l'album en question, en pleine face, histoire de constater que Lars Larsen et ses complices n'ont rien perdu de leur force de frappe. Ca joue vite, fort et précis. Le son est d'ailleurs bien puissant... on entend (presque) bien chaque intervenant mais la voix reste un peu couverte par les instruments. Le nouveau batteur, dont je ne connais pas l'identité, est incroyable (le précédent était déjà très fort). Il la joue très "force tranquille", tout en décontraction, alors que, mine de rien, il balance des roulements, des blasts, des coups dans tous les sens à une vitesse hallucinante et avec une précision chirurgicale. On est également ravi de retrouver le bassiste Kasper Gram (il avait quitté le groupe mais dépanne ses copains sur cette tournée), toujours aussi souriant et charismatique sur scène, qui joue sans médiator... et, lui aussi, très vite. Le type doit avoir tellement de corne au bout des doigts qu'il peut venir chez vous décoller le papier à mains nues. 


Mais bien sûr, celui qui se donne le plus, c'est évidemment Lars Larsen lui-même. Le bonhomme n'est pas le meilleur chanteur de sa catégorie mais quelle présence ! Il bouge dans tous les sens, parcourt la scène d'une extrémité à l'autre (ce qui, à la Boule Noire, je vous le concède, ne représente pas une si grande distance) en bondissant, prend des pauses jambes écartées, jouant avec son pied de micro ou chorégraphiant avec ses bras (dans une gestuelle très "arts martiaux") les rythmiques endiablées des morceaux joués, et j'en passe... Bref, il se dépense sans compter, avec une bonne humeur resplendissante. Les guitaristes (excellents Kristian Larsen et Cbastian Andersen) sont moins exubérants, plus en discrétion, mais font un boulot remarquable. Les riffs et soli proposées par la paire sont un régal pour l'amateur de guitare speedée.


Après ce début pour le moins convaincant, retour sur le diptyque The Black Circus avec la chanson titre, encore un titre speedé qui ne laisse aucun répit et Gypsies Dance Part 2, qui avec ses parties plus mid-tempo (le démarrage est même presque lent), calme un peu le jeu. Lars nous dit d'ailleurs, avant qu'elle ne soit jouée, d'en profiter car c'est le seul morceau qui possède une allure raisonnable, cette chanson étant, d'après lui, ce qui se rapprochera le plus d'une ballade ce soir. Le bougre ne ment pas, le reste du set va vite confirmer qu'on va prendre cher. 

Au bout de quatre morceaux joués, il est l'heure pour Manticora de nous présenter son dernier album : To Kill To Live To Kill. C'est la très agressive Echoes Of A Silent Scream qui démarrera la session consacrée à ce disque. Sur ce morceau, Lars arrive sur scène habillé comme le personnage du clip, avec une combinaison bleue (qu'il met pour tuer ses victimes) et un katana ! A la fin du morceau, il ouvrira un peu la combi, s'exclamant qu'il fait une chaleur à crever. Trois autres morceaux de l'album sont joués à la suite, Through The Eyes Of The Killer - Towering Over You, l'excellent et bref instrumental virtuose (et hyper véloce) Humiliation Supreme qui permettra à Lars de se reposer un peu les cordes vocales et aux autres musiciens (notamment aux deux guitaristes) de nous en mettre plein la vue, et Katana - Awakening The Lunacy. Entre les morceaux, le frontman nous rappelle régulièrement sa joie de jouer à Paris, l'une des plus grandes villes d'Europe comme il le dit à maintes reprises... Quand on voit le peu de gens ayant fait le déplacement, cette déclaration fait quand même un peu sourire jaune (le contraste entre l'enthousiasme du chanteur et une salle quasi-vide est saisissant)... mais le gars a l'air sincèrement content. Un peu de méthode Coué ne fait pas de mal. 

La dernière partie du set nous propose un beau détour par l'album Hyperion avec trois extraits consécutifs dont je retiendrai surtout l'excellent Cantos, hymne parmi les hymnes de speed metal ! Malgré la grande qualité des compos proposées, la maîtrise impressionnante des musiciens (le niveau est quand même sacrément haut) et l'enthousiasme du groupe (et des fans... ce qui fait très plaisir à Larsen qui nous remerciera plusieurs fois pour notre accueil, nous disant que, bien que nous soyons peu nombreux, nous sommes le public le plus bruyant rencontré sur cette petite tournée), je commence à ressentir une petite fatigue. Il faut dire que c'est quand même souvent le cas avec Manticora... à force d'encaisser des titres assez longs, d'une rapidité décoiffante, avec moults riffs meurtriers à l'appui, un petit effet étourdissant finit par se manifester. Et alors que la dernière salve de la soirée, Revival Of The Muse That Is Violence (histoire de finir sur un titre du dernier album), est annoncée, je suis complètement rassasié et quasiment prêt à demander qu'on m'épargne. Une dernière fois, les Danois nous clouent sur place avec une énergie admirable et on termine le concert (d'une heure trente tout de même) totalement lessivés. 


Encore une fois, cela m'a fait plaisir de voir Manticora. Le groupe est méritant, attachant, ses musiciens sont des bêtes et Lars Larsen fait partie des chanteurs les plus sympathiques et généreux qu'il m'ait été donné de voir sur scène. Les quatre-vint-dix minutes furent intenses, éreintantes même... Je me dis qu'un peu plus de variété et quelques morceaux plus courts rendraient la chose moins assommante mais on ne peut qu'apprécier ce festival de riffs de tueurs décochés par un groupe dont la performance force l'admiration. Difficile de faire la fine bouche devant une telle manifestation d'énergie et de bonne humeur.

Serons-nous plus nombreux la prochaine fois... s'il y en a une ? Manticora va-t-il pouvoir continuer à nous rendre visite s'il perd de l'argent sur ce type de tournées ? A suivre...

Merci beaucoup à Roger Wessier pour l'accréditation.

Setlist Manticora :

01. King Of The Absurd
02. Playing God
03. The Black Circus
04. Gypsies Dance part 2
05. Echoes Of A Silent Scream
06. Through The Eyes Of The Killer - Towering Over You
07. Humiliation Supreme
08. Katana - Awakening The Lunacy
09. Cantos
10. A long Farewell
11. Keeper Of Time
12. Through The Eyes Of The Killer - Revival Of The Muse That Is Violence

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