C'est vers 18h30 que l'ami Deicide5000, dont vous allez pouvoir admirer les photos, et moi-même arrivons au centre culturel John Lennon de Limoges. L'affluence est très correcte pour un dimanche soir et nous devons patienter une demi-heure avant de pouvoir enfin accéder à la salle. Une belle salle refaite à neuf depuis peu, qui s'organise en cercle avec un balcon pour pouvoir mieux admirer le spectacle.
Moonspell prend place sur scène vers 19h30 et Ribeiro entre en scène sur l'introduction de 1755, lanterne à pétrole de marin à la main, manteau long et grand chapeau. Il entre tel un messager porteur de nouvelles, de mauvaises nouvelles. Heureusement la suite n'en sera pas une.
Avec Em nome do medo qui ouvre le bal, l'ambiance est sombre et Ribeiro avec sa grandiloquence naturelle nous transporte dès le premier titre vers l'histoire qu'il va nous conter pendant une grande majorité du concert. Le groupe semble très fier de cet album qui, à la base, devait être un EP et au fur et à mesure de sa création, est devenu un LP. Le groupe en défendra fièrement les couleurs pendant plus d'une heure.
Nous avons même droit au fameux masque que les docteurs portaient pour se protéger des méfaits de la peste. Une sorte de grand nez avec deux yeux globuleux tout en cuir, très impressionnant visuellement. Même s'il doit faire chaud là-dessous. Nous aurons également droit à un crucifix laser (c'est toi Sarah Connor ?) que Ribeiro prendra plaisir à utiliser sur le public. C'est assez drôle et décalé, c'est un drôle de mix entre Star Wars et la messe du dimanche matin.
Ribeiro fait une majorité du travail grâce à sa volonté de communiquer avec le public, en français dans le texte même si l'accent portugais, il faut le reconnaître, donne parfois des prononciations décalées. Ainsi nous aurons droit à des : « Bonsoir Limoches ! » ou un « A bientouche » qu'il ne faudrait peut-être pas prononcer au milieu d'une église justement... Mais grâce à un charisme de chaque instant, le bougre nous emmène dans son univers.
Les autres membres du groupe ne sont pas forcément aussi charismatique. Le bassiste donne un peu de vie de son côté mais globalement, entre le clavier coincé derrière ses tuyaux d'orgue d'un côté, la batterie de l'autre, il faut reconnaître que ce n'est pas très animé. Le guitariste essaie lui aussi de faire sa part de spectacle mais on le sent avant tout bien concentré sur son instrument.
Mais ce qui fait la force du groupe, c'est sa sincérité on sent que le groupe a mis ses tripes à l'intérieur de ce 1755. Ribeiro prend le temps de nous expliquer le changement que la peste a apporté sur Lisbonne et, par extension, sur le reste de l'Europe.
Mais le quintet sait tout de même faire plaisir à ses fans en ne restant pas exclusivement sur cette dernière production. Des titres comme le classique Opium, toujours très efficace sur scène, réveille un peu le public qui était jusque là très studieux.
Quant à Alma Mater, il est repris à pleins poumons par l'ensemble du public, c'est clairement un des temps forts du show et on voit des grands sourires apparaître sur beaucoup de visages. Sans oublier qu'un show de Moonspell sans la fameuse posture de Ribeiro, jambes écartées, le pied de micro posé sur les genoux, n'aurait pas été un show réussi. Cette posture typique du chanteur reste gravé dans la mémoire de chaque personne ayant vu Moonspell une fois dans sa vie.
Moonspell aura clairement fait le job, fait plaisir à ses fans, en sachant aussi se faire plaisir sur scène. Il est vrai que nous ne sommes pas face à un show de grande envergure mais malgré cela, l'expérience du groupe a payé et les fans semblent ravis.
Setlist de Moonspell :
Em nome do medo 1755 In Tremor Dei Desastre Night Eternal Ruínas Opium Evento Todos Os Santos Alma Mater Full Moon Madness
C'est la pause et nous allons faire un saut au stand de merch où nous découvrons que le stand le plus fourni est celui de l'organisateur, l'association Exécution. C'est d'autant plus surprenant que le stand de Moonspell est assez léger et celui de Cradle Of Flith est pratiquement vide, pas un CD, pas un vinyle à l'horizon. Interloqués, nous posons la question au vendeur qui, du haut de ses seize ans et demi, nous rétorque que les vendeurs de disques aux alentours ne sont pas très heureux de voir débarquer en ville des stands comme les leurs pour vendre des CDs. Comme si la marge des hypers ou des vendeurs de CD des alentours était menacée. Comment vous décrire notre moue dubitative à l'annonce de cette nouvelle... Alors vraie info ou fake news, that is the question...
Il est 21h et le Filth entre en scène sur la musique d'Ave Satani. Et dès le premier titre, ça commence très fort avec Gilded Cunt, extrait de l'album Nymphetamine, on voit tout de suite que le groupe est concerné, motivé, et a réellement envie d'en découdre.
C'est toujours un peu les même questions avec Cradle : Un, est-ce que le son va être correct ? Deux, est-ce que le groupe se sentira concerné ? Et trois, est-ce que Dani n'aura pas trop abusé, pour rester professionnel ? Et bien la réponse à ces trois questions est : oui !
Le son est globalement correct, il aura fallu un peu de réglage au fil de l'eau mais rien de très dommageable. Et puis ce groupe est enfin un groupe de scène, ça transpire l'envie de faire les choses bien. Et, trois, nous avons droit à un Dani sur ressorts, motivé, et surtout pas trop attaqué a priori.
Mais ce qui fait la grande spécificité de cette tournée, c'est que la playlist est absolument dantesque. Cradle tape dans tous ses albums phares et n'en a extrait que les titres cultes. Et vu que c'est aussi l'occasion de fêter les 20 ans de Cruelty And The Beast, nous avons droit à deux titres, Beneath the Howling Stars et à Bathory Aria, pierre angulaire d'un quart d'heure extraite du même album. Nous apprenons par la même occasion que cet album va ressortir, avec un nouveau mixage issu des bandes originales. Espérons cette fois-ci que la prestation hallucinante de Barker sera nettement plus valorisée.
Ce bon Dani, en armure à pointe, n'arrête pas les allers-retours d'un côté et d'autre de la scène et harangue le premier rang pour qu'il donne un maximum d'énergie. Il faut reconnaître que le pauvre fait un peu petit au milieu des trois géants guitaristes et bassiste mais il se donne sans tricher et est vocalement en forme. Heureusement que l'organisation et sympa et lui a mis une petite estrade derrière qui lui permet de surplomber ses collègues. Il va à l'occasion jouer les faire valoir à Lindsay Schoolcraft, la touche féminine de la soirée. Elle est clairement l'atout charme du groupe même si la demoiselle doit occuper deux postes, en combinant clavier et chant, question de rentabilité sans doute... Chapeau sur la plupart des compos où sa voix passe bien.
Du coup ce sont les guitaristes qui se retrouvent en première ligne. Ils assurent le show. Alors un show un peu à l'américaine, un brin poseur, mais au moins ça amène de la vie et on a droit à deux styles de guitaristes très différents. Un qui aime le contact avec le public, Marek Smerda, le second Richard Shaw est un peu plus dans sa bulle, mais a une faculté à jouer les riffs, tout en tapping de la main gauche, et de donner le tempo tel un chef d'orchestre avec la main droite, en fixant son regard dans le vide, comme habité. C'est assez drôle et ça rajoute clairement au côté grand-guignolesque du groupe.
La première partie se termine par le dispensable The Death Of Love, qui est à mon sens la seule erreur de casting de la playlist. Ils concluent par You Will Know The Lion By His Claw, extrait de l'excellent Cryptoriana - The Seductiveness of Decay sorti en 2017. Nous avons déjà dépassé l'heure de concert, le public est content et réclame son rappel. Le Filth s’exécute et revient non pas pour un, non pas pour deux, mais pour cinq titres ! Et là encore, que des hits ! L'enchainement The Promise of Fever, Nymphetamine (Fix), Her Ghost In The Fog, Born in a Burial Gown, From The Cradle To Enslave ne laisse personne vivant. Ce qui nous fait dire, avec l'ami Deicide5000, que nous venons certainement d'assister à la playlist la plus ambitieuse que Cradle pouvait nous proposer.
Cradle est aujourd'hui un vrai groupe, et cela se voit. Dani sait mettre un petit peu son ego de côté, même quand il se fait chambrer par le public, suite à une remarque sur la gent féminine française, par lequel il répond : « Are you fu***** me ? », comme quoi on ne se refait pas... Mais il sait se mettre en retrait quand c'est nécessaire, force un peu moins son talent et sa voix. Et surtout laisse plus de place à ses coéquipiers de scène. Nous avons assisté à une excellente prestation des deux groupes de la soirée, avec une mention très bien à nos pseudo-vampires préférés.
Tracklist de Cradle Of Filth :
Ave Satani Gilded Cunt Beneath the Howling Stars Blackest Magick in Practice Heartbreak and Seance Bathory Aria: Benighted Like Usher / A Murder of Ravens in Fugue / Eyes That Witnessed Madness Dusk and Her Embrace The Death of Love You Will Know the Lion by His Claw
Rappel : The Promise of Fever Nymphetamine (Fix) Her Ghost In The Fog Born in a Burial Gown From The Cradle To Enslave
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