Trust

Interview date

27 Mai 2011

Interviewer

Didier

I N T E R V I E W

Interview Nono (face à face)


Salut Nono, merci pour cette interview pour notre webzine auxportesdumetal.com, et tout d'abord, Patrick Rondat, qui était là lundi, te passe un petit bonjour ?

C'est super, merci, oui c'est mon pote, un super musicien et un super mec !

Alors, tu es en concert privé ce soir au magasin Music 3000 de St Laurent du Var. Tu représentes Gretsch, raconte-nous un peu ça ? Tu joues avec qui ce soir ?

Alors, je joue avec des musiciens locaux que j'ai découverts aujourd'hui et qui sont excellents ! Et donc que je ne connaissais pas du tout auparavant. C'est toujours une bonne expérience. J'aime bien rencontrer d'autres musiciens et faire ce genre de trucs, c'est toujours intéressant, tu fais des rencontres et c'est toujours enrichissant [le barman apporte deux verres de bordeaux, que, très sympa, Nono prend sur sa note de chambre]. Voilà [le responsable du magasin a fait ramener la guitare que Nono avait laissé au magasin car il veut bosser quelques morceaux dans sa chambre après l'interview]

Ca fait longtemps que tu représentes Gretsch ? Comment ça se passe, tu bosses pour Fender et Gretsch ?

Alors je vais t'expliquer. J'ai signé un contrat avec Fender Etats-Unis avant même que Fender France n'existe, et avant que Fender ne rachète Gretsch, c'était encore deux marques séparées et autonomes. J'ai signé ce contrat en 1997 ou 1998 par là, et après j'ai assisté à la création de Fender France, je connais donc toutes les personnes de Fender France, depuis le début à aujourd'hui, tous ceux qui sont rentrés, partis, je fais partie des murs et de la maison [rires].

Tu fais souvent ce genre de master class ?

Pas du tout. Je le fais très, très rarement. Je le fais aujourd'hui parce que je travaille avec Fender et Gretsch et que quelque part, il faut que je donne un peu de ma personne pour représenter ces grandes marques. Ici, les conditions sont excellentes, il y a une belle scène, d'excellents musiciens et de très bonnes conditions techniques et surtout ce ne sera pas un cours de guitare, mais du live ! Faire des master class tout seul est moins intéressant pour moi car d'une part, je ne suis pas pédagogue, et d'autre part ce n'est pas mon truc, je préfère de loin faire du live, d'où ma présence ce soir car ce sera 100% live !

A part la Corvette que tu as signée, tu participes à l'élaboration de certains produits de la marque ?

Non. J'ai d'abord eu l'honneur et la chance d'élaborer, en 2001, une Fender Stratocaster signature, la "NonoCaster", que nous avons conçu ensemble avec la marque. Et là, avec Gretsch, j'ai participé à l'élaboration de mon modèle Gretsch, une "Corvette G5135N", mais par contre non, je n'interviens pas du tout dans le développement ou l'élaboration des autres modèles de la marque, ils n'ont pas besoin de moi pour ça !

Alors, roulements de tambours, le 6 juin sort ton premier album solo : il était temps ! Pourquoi avoir tant attendu ?

Oui. Alors il sort le 6 juin, jour du débarquement, mais c'est aussi la Saint Norbert ! Mais je précise que ce n'est pas calculé, ce n'est que le fruit du hasard, je tiens à le dire. Alors pour répondre à ta question, pourquoi avoir attendu autant ? Ca doit faire plus de dix ans que j'annonce mon album solo, tous les ans je l'annonce pour l'année qui suit, ainsi de suite... bla bla bla... J'ai eu et j'ai toujours la chance d'être beaucoup sollicité et donc de travailler beaucoup depuis que j'ai commencé ce métier il y a plus de trente ans, et une des parties de ce métier qui me plaît le plus, hormis la scène et le live bien sûr, c'est de travailler en collaboration avec d'autres musiciens, d'autres artistes. Donc, chaque fois qu'on me sollicite pour travailler sur un projet d'album qui me plaît, ou pour faire, soit des parties de guitares, soit un travail sur des arrangements ou autre, tant que c'est de la collaboration musicale, j'accepte. J'aime beaucoup ça et donc, à chaque fois, je mettais en stand-by mon projet d'album, et du coup je repoussais de quelques semaines... quelques mois... quelques années... Le temps passe très très vite ! Ensuite en 2006, il y a eu la reformation de Trust, on a dû se consacrer à ce retour du groupe, faire l'album, la promo, les tournées et tout ce qui s'en suit. Et j'ai donc encore repoussé le mien. Au bout d'un moment, je me suis dit que je n'allais plus être crédible à force de repousser mon projet, j'allais finir par l'appeler "l'arlésienne" cet album... donc je me suis dit qu'il fallait que j'arrête tout et que je m'y consacre. C'est ce que j'ai fait l'année dernière. L'été 2010, je me suis dit : "je ne prends plus rien comme travail et je me consacre entièrement à mon disque". Et puis, je crois aussi que les choses arrivent quand elles doivent arriver... donc l'heure a sonné !

C'est marrant mais, il y a un mois le premier album solo de Brian Robertson de Thin Lizzy, est aussi sorti, lui aussi est né en 1956, vous vous êtes donné le mot ou quoi ? La crise des 55 ans ?

Le guitariste de Thin Lizzy ? Cette année ? Super ! Et bien c'est peut-être ça aussi ouais la crise des 55 ans ! [rires]. Je suis un grand fan de Thin Lizzy. Malheureusement Phil Lynnot est décédé trop jeune ! Il était pour moi et certainement pour beaucoup partie intégrante du groupe, la couleur et l'essence même du groupe, sa manière de chanter, sa voix et sa personnalité. Ca a été une grande perte, et ça ne sera plus jamais comme avant...

Alors qui t'accompagne sur cet album ?

J'ai évidemment monté mon projet autour d'un groupe. Le choix n'a pas été facile... les critères étaient d'abord le rapport humain, c'est très important. Parce que je sais ce que c'est que d'être dans un groupe depuis longtemps. Il faut s'apprécier, s'aimer, avoir du plaisir à passer des heures ensemble, des journées, voir des semaines ensemble, quand on est en tournée, donc se supporter. Ce fut mon premier critère. Et mon deuxième était musical évidemment, musical, en tant qu'instrumentiste, mais aussi en tant que chanteur. Parce qu'en fait sur cet album, tout le groupe chante. Et je tenais absolument à ça, il n'y a pas de chanteur lead. J'avais envie de monter un groupe de copains, mais sans chanteur lead. On est quatre, deux guitares, basse, batterie. On a, Jimmy Montout, à la batterie et au chant, Sly Léon Combettes à la basse et au chant, Pat Llaberia à la guitare et au chant, et donc moi à la guitare bien sûr et au chant aussi ! Sur l'album il y a quelques personnes en guest, tout d'abord mon frère Jean-Claude qui vit en Angleterre depuis plus de 30 ans, et qui a écrit tous les textes en anglais, il chante sur 4 titres de l'album. Il y a ma belle-fille qui fait quelques petites parties de voix, mon ami et talentueux Greg Zlap à l'harmonica, il travaille avec Johnny Hallyday, mon ami Erick Bamy pour quelques choeurs, ma copine Dalida pour quelques choeurs et saxophone sur un titre, mon ami Thierry Tamain au piano sur un titre instrumental et pour finir Bako [Pascal Mikealian] à l'harmonica sur la reprise de Canned heat "On the road again" que nous avons enregistré et ré-arrangé live en studio.

Tu chantes aussi sur l'album alors ?

Oui, je fais les doubles voix dans les refrains, les doublettes dans certains couplets. Par contre sur scène, les quatre chansons que mon frère interprète sur l'album, je vais les chanter sur scène... du moins essayer... [rires] et j'ai la trouille...

L'harmonica sur ton l'album est vraiment excellent...

Greg Zlap, pour en revenir à lui, joue depuis deux ou trois ans avec Johnny Hallyday. Pour l'anecdote, avec Greg, on avait monté un groupe de blues ensemble en 2006/2007, nous avons un mini LP 5 titre live qui sortira un jour. Il a été embauché chez Johnny sans aucune interférence de ma part... j'ai trouvé ça extraordinaire. C'est un harmoniciste exceptionnel. D'ailleurs il vient de sortir un album qui s'appelle Air, qui est un album de blues, un album superbe.

Comment s'est passé l'enregistrement de cet album ?

J'ai commencé en juillet/aout 2010 à trier la quantité énormes de titres que j'accumule dans mes tiroirs depuis tant d'années. J'ai donc passé bien deux mois voire deux mois et demi, à ressortir tout ce que j'avais fait, réécouter, et à faire une petite mouture d'album avec les morceaux qui me plaisaient bien. Et puis je me suis aperçu que dans cette première mouture de l'album, il y avait trop de morceaux medium, blues medium, et que ça ne pêtait pas assez à mon goût. Donc je me suis dit, c'est pas bon, et donc, j'ai refait un autre tri, ça m'a pris du temps, et au bout d'un moment je me suis dit, et puis merde... Balles neuves comme on dit en tennis... Je vais en refaire des nouveaux, et j'avais envie d'en recomposer de nouveaux de toute façon. Donc en fait, sur l'album je n'ai gardé que deux anciens morceaux, qui sont deux instrumentaux, un qui s'appelle "WaveDream" qui doit dater de 1986 ou 1987 , et l'autre "Charter 68" de 1999. Sinon pour le reste, ceux sont des morceaux que j'ai composés, entre novembre et décembre de l'année dernière.

J'ai reçu la promo de l'album, pour le chroniquer, je le trouve excellent. Très varié, avec quelques trucs géniaux, par exemple presque toutes les fins des morceaux sont étranges, rien à voir avec le reste du morceau, comme une sorte d'intro sur le morceau d'après, c'est quoi le plan ?

Merci. C'est super. Oui en effet, il n'y a pas de silence entre chaque morceau, tout s'enchaine et j'y tenais car pour moi, la musique c'est un voyage, et donc je ne voulais pas un enchainement classique de chansons avec entre chacune d'elles, des silences, j'avais envie de faire un truc continu, et à chaque fois qu'on enregistrait un morceau, à la fin, je disais aux mecs, on ne fait pas de fin, on part en bœuf, et on partait en bœuf. Ensuite j'ai essayé de coller tout ça, et cela me plait bien !

Ca donne un côté fun...

Cela j'y tenais particulièrement à ce côté fun, parce que la musique, je la fais sérieusement, mais sans me prendre au sérieux ! La musique est un voyage, mais c'est aussi donner du plaisir, et du fun aussi ! Du moins c'est ce que je voulais avoir sur cet album.

C'est un album plutôt rock, musclé mais rock, tu n'as pas peur de décevoir les hardos qui ne jurent que par les riffs d'Antisocial ?

Les fils du metal ? [rires]. Ecoute, je vais te dire une chose sincère, de toute façon tout ce que je dis, je le dis sincèrement, cet album je l'ai fait d'abord et uniquement pour moi ! C'est à dire qu'il était important et primordial que j'en sois d'abord pleinement satisfait et surtout en phase avec ce que j'ai envie t'entendre et ce que j'aime. Je n'ai pas pensé une seule seconde à ce qui ferait plaisir aux uns ou aux autres, ni à ce qu'on pourrait attendre de moi, que ce soit les fans de Trust, de Johnny, de guitaristes en général, tu vois ? Je me suis aperçu tout seul lorsque j'ai ressorti mes vieux morceaux des tiroirs, qui dataient de quelques années... qu'ils ne me correspondaient plus exactement, je me suis aperçu aussi et en fait que ce n'était pas assez rock. J'en ai tiré tout seul la conclusion que ce que j'avais envie de faire sur cet album, c'est du Rock ! Du moins pour l'instant et surtout concernant ce premier album solo. Voilà, maintenant l'essentiel est que j'en suis totalement satisfait, cet album me plait beaucoup ! Et j'en suis très fier ! Si il plait aux gens, tant mieux, si il ne plait pas et bien tant pis, je ne peux rien y faire. L'important, et je dis ça pour tous les artistes, c'est d'être en phase avec soit-même. Moi, aujourd'hui avec cet album, je le suis, et de toute façon, on ne peut et ne pourra jamais plaire à tout le monde, c'est une réalité ! That's life !

Moi qui avais pile 16 ans à l'époque de Trust, j'ai trouvé cet album très bon, donc, tu vois...

J'en suis ravis !

En parlant d'Antisocial, j'étais au Sézamo à Nice la semaine dernière et Adam Bomb y a joué Antisocial. Très bien d'ailleurs. Ca te fait quoi de voir le morceau repris et surtout d'avoir écrit un tel hymne ?

D'abord, c'est une grande fierté de l'avoir fait. Une grande fierté de voir le succès qu'il a depuis plus de trente ans. Fier et heureux qu'il ait toujours autant d'impact sur les gens, mais aussi bien triste et bien malheureux que le texte soit toujours d'actualité... cela prouve bien que malgré toutes ces années certaines choses n'évoluent pas et restent inchangées ! Il a été repris, par Anthrax, Children Of Bodom, par un nombre incalculable d'artistes français et étrangers, pour des films, Bernie et moi recevons des demandes régulièrement, quasiment tous les mois pour des autorisations d'utilisation d'extraits. Donc oui, c'est une grande fierté d'avoir écrit un tel morceau qui traverse le temps et un grand malheur que le texte prouve que certaines choses sociales ne changent pas, voire régressent !

L'écoute ton album m'a fait un peu penser a celui de Slash, avec un peu plus de folie, et des délires un peu à la Steve Vaï, ca te choque ?

Non, je dirais merci, je vais le prendre comme un compliment ! Steve Vaï est un guitariste redoutable, j'ai plus d'affinité musicale avec Gary Moore ou Joe Satriani. J'ai beaucoup de respect pour tous ces guitaristes, comme Edouard Van Halen ou bien d'autres virtuoses, qui ont bousculé le coté basique des guitaristes de l'époque 70's. Ces gens là ont un grand mérite, ils ont élevé la barre à un très haut niveau et c'est tant mieux, c'est important d'avancer ! Avec tout le respect que je leur porte, je n'ai pas la prétention de me comparer à eux, chacun doit savoir où il en est, je sais où j'en suis, et où je veux arriver, l'apprentissage de la musique et en l'occurence de la guitare, est sans limite et sans fin ! Tant mieux !

Je trouve que Here And Now sonne très Beatles et Do It Right et She's Burning Up My Bed très Rolling Stones, ce sont des influences majeures dans ta musique ?

Tout à fait. J'adore les Beatles, j'adore les Rolling Stones. J'adore plein d'autres groupes, mais faut savoir que mon grand frère, donc celui qui a écrit tous les textes, du fait qu'il ait six ans de plus que moi, il m'a mis le pied à l'étrier. Il ramenait des disques des Beatles et des Stones à la maison, et j'ai donc découvert ça très jeune. Il m'a initié et ce sont donc mes racines quelque part. J'ai découvert la musique électrique avec les Beatles et les Stones, Jimi Hendrix, et aussi Ten Years After avec Alvin Lee, Mountain avec Leslie West, Johnny Winter, etc ... et d'autres. Il se trouve que Pat Llabéria mon comparse guitariste dans le groupe, a la voix très similaire à celle de Mike Jagger. Il a d'ailleurs un groupe de reprises parallèle à notre projet, "Satisfaction", je lui fais sa pub, et il ne fait que du Stones, il chante comme Mike Jagger et joue de la guitare comme Keith Richards, c'est les Rolling Stones à lui tout seul !

Y'a aussi des morceaux typés blues notamment l'excellent Borderline, un des meilleurs de l'album, avec cette guimbarde et cet harmonica énorme ? C'est une grosse influence pour toi, le blues ?

J'adore le blues, c'est ma base et c'est la base de la musique moderne. Je parlais du rock et de la musique électrique qui débarque dans les années soixante mais le blues en est la racine. J'ai grandi avec ça et j'adore le blues effectivement.

On parlait à l'instant de blues, et cette année commence mal, nous venons de perdre Gary Moore, le connaissais tu et qu'est ce que tu peux en dire ?

Ouais, une grande perte. Je eu la chance de le voir très souvent en live mais aussi de le rencontrer plusieurs fois. D'ailleurs j'ai dédicacé l'album à Gary Moore. La première fois que je l'ai rencontré, il est venu nous voir Trust au Marquee à Londres ou on jouait un soir dans les années quatre-vingt. Je l'ai recroisé quelques fois et dernièrement à l'Olympia. C'est un guitariste que j'admirais et que j'admirerais toujours, ça m'a fait énormément de peine et c'est une très grande perte. Comme Phil Lynnot d'ailleurs. C'est des gens qui apportaient quelque chose d'authentique, propre à eux même. Gary Moore, tu le reconnaissais en une seconde, sur une note ! C'était Gary Moore, à la voix comme à la guitare.

Tu as pas mal bossé avec notre Johnny national, et d'autres artistes de variété française comme Florent Pagny, c'était par goût ou par
nécessité ?

Comme je l'expliquais au début de l'interview, j'aime les expériences de collaboration. Je suis un travailleur acharné. La  musique est ma passion, et j'aime surtout travailler et apprendre. Comme je l'ai dis plus haut, l'apprentissage de la musique est sans fin. A travers ces expériences j'ai beaucoup appris. Alors effectivement de travailler avec Florent Pagny ou Patrick Fiori ou d'autres, ça a beau être de la variété, mais en tant que guitariste cela m'a fait avancer. Même si musicalement la variété ce n'est pas ma tasse de thé, ce sont de bonnes expériences. Pour résumé ça, pour moi la meilleure école que j'ai connu, c'était bien avant Trust, bien sûr, c'est lorsque j'ai commencé ma carrière de guitariste, je suis parti au Club Méditerranée au Maroc, dans les années soixante-dix pour jouer dans un groupe de bal et donc de reprises, un groupe de balloches quoi. J'ai énormément appris, parce que tu joues tous les soirs tout type de musique, de la variété, de la bossa nova, du mambo, du musette, du jazz, du blues, du rock, etc... Excellente école, la meilleure à mon sens.

Avec Johnny tu as joué d'énormes concert, au Parc des Princes par exemple, ça doit être géant ça non ?

Oui, au Parc des Princes pour ses cinquante ans. Ce fut une grande expérience. Je suis resté avec Johnny presque huit ans alors que j'avais signé un contrat d'un an et demi... Avec lui, c'était le confort total et c'était tapis rouge pour moi ! C'est un vrai rocker, il adore le rock, le hard, et ça se voit, il est tatoué de partout, on sait de qui on parle. D'autre part, il adore la guitare, et donc il m'a mis en valeur tous les soirs sur scène. J'ai beaucoup appris pendant ces huit ans avec Johnny. La différence qu'il y a entre jouer avec Johnny et par exemple, jouer avec Trust ou faire un groupe, c'est que dans un groupe, on choisit avec qui on le fait, souvent avec des copains, alors qu'avec Johnny, il y a un mec qui fait une sorte de casting, et on met ensemble quinze musiciens qui n'ont pas choisi de jouer ensemble et qui viennent d'univers différents, il y en avait qui venait du jazz, d'autres de la variété, du classique, et il faut que ça sonne et que ça sonne cohérent, c'est une expérience totalement différente et donc on apprend beaucoup.

On t'as vu avec les frères Bouchard de Blue Oyster Cult l'été dernier à Peymeinade, avec quels autres musiciens célèbres as tu eu la chance
de jouer ?

Ouais, j'ai croisé le fer avec Steve Vaï, t'en parlais tout à l'heure, j'ai joué à Cannes avec lui il y a quelques années, j'ai joué avec des tas de gens, Iron Maiden, Lemmy de Motörhead, Joan Jett, Angus Young, Rudolph Schenker, Blue Oyster Cult, Alice Cooper, Ross the Boss, Samson, je ne sais plus trop, mais pas mal de gens. Ca fait partie des plaisirs et des bonheurs de ce métier. On a eu la chance avec Trust de jouer partout en Europe et donc de rencontrer beaucoup de groupes, de faire beaucoup de premières parties par là même de sympathiser avec plein de groupes.

Avec lesquels aimerais tu encore jouer ?

Ben en fait, à la minute où je te parle, je vais sortir mon disque; donc j'ai envie de jouer avec mon groupe, de tourner avec mon groupe, de faire un maximum de concerts, de prendre du plaisir sur scène et de partager ce plaisir avec les gens, donc pour l'instant, j'ai pas d'autres envies.

Justement cet été j'ai vu que tu venais à Nice le 20 Juillet. Tu joue le même soir que Bertignac: Trust finit par rencontrer Téléphone !  Vous vous connaissiez déjà à la grande époque ? Vous vous appréciez ? Et aujourd'hui ?

Trust rencontre Téléphone à travers leurs guitaristes, oui [rires]. On se connaissait bien sûr. Il faut savoir que Téléphone a démarré un peu avant nous, un ou deux ans d'écart. On s'est croisé un paquet de fois, avec Bernie on est allé les voir à Paris en concert. A chaque fois qu'on se croise, on a plaisir à ce voir. On est pas vraiment amis parce qu'on ne sort pas ensemble, mais on s'estime beaucoup et il y a un grand respect mutuel. Ca me fait un grand plaisir de partager la scène avec Bertignac, ça va être la première fois, en plus, il a aussi un nouvel album, et en plus c'est au Théâtre de verdure à Nice, c'est un super endroit, et comme on partage l'affiche, je vais lui dire que si il veut faire un bœuf à la fin, moi je suis partant ! Je jouerai avec mon groupe, et je défendrai mon album. Je précise aussi quelques autres dates. J'ouvre le 21 juin à Marcq-en-Baroul, pour Pretty Things et 10cc. Le 23 Juillet j'ouvre pour Iggy Pop & The Stooges en Corse à Patrimonio, et je fais la première partie de Foreigner et Journey à Paris le 7 juillet, voilà.

Parlons un peu de trucs un peu moins drôles. Que c'est t-il passé pour Trust au Hellfest ?

Ca, on m'a déjà posé la question, mais bon écoute. J'ai vu dernièrement que le festival a communiqué sur les groupes qui avaient annulé et ils ont émis des raisons. Bon, je trouve ça pas très délicat de leur part, les annulations les promoteurs le savent, ça peut arriver.  Pour en revenir à Trust, c'est simple, c'est qu'ils nous ont contactés au mois de janvier pour un concert au mois de juin, donc presque six moi à l'avance. Sur le principe, moi j'étais partant, j'ai vu Bernie, il était partant, on était chauds pour le faire, j'ai donc donné mon accord de principe au Hellfest. Eux étaient un peu dans l'urgence pour annoncer ça, car ils voulaient communiquer le plus tôt possible. Je comprends qu'ils veuillent le faire mais à mon sens, ils ont voulu communiquer un peu vite, je ne leur jette pas la pierre, mais je pense que la responsabilité incombe au Hellfest comme à Trust. Il se trouve que deux ou trois semaines après qu'on ait donné notre accord, Bernie, tout le monde le sait, a une carrière parallèle dans le cinéma et prépare un nouveau film, et justement il a eu un planning qui s'est booké pour son prochain film, et que pour lui, c'est important aussi, et que d'un seul coup, on a dû annuler. Voilà, y'a pas de quoi faire un pâté. La seule chose où je suis désolé, c'est pour les quelques personnes, qui avaient déjà acheté leurs billets pour voir Trust. Je suis vraiment désolé pour eux, et je m'excuse auprès d'eux, maintenant bon c'est un gros festival, le festival n'est pas en péril, il y a plus d'une centaine de groupes, des têtes d'affiche énormes, que Trust n'y soit pas, c'est pas grave, Il y a des tas de groupes supers qui vont passer.

Tu ne râles pas trop de ne pas participer à une telle fête ?

Si, moi ça m'énerve, enfin ça me déçoit plutôt, car j'aurais vraiment voulu jouer au Hellfest, c'est un super festival, réalisé dans de très bonnes conditions. En plus, je vais le dire, on avait un très gros cachet. C'est pour répondre aux médisants qui disent que Trust s'est reformé uniquement pour le pognon. Il y avait donc un gros cachet et on aurait pu très bien, Bernie et moi comme le reste du groupe, venir en fin d'après midi, jouer une heure et demie, prendre le gros chèque et repartir. On ne le fait pas. On n'est pas là juste pour le pognon, on est là, parce qu'on a envie de faire Trust comme on l'entend et pour le plaisir.

Quand on entend la qualité et la finesse de tes compos dans NoNo, par rapport au dernier Trust, que sur le site et ailleurs on a pas beaucoup apprécié, franchement on se dit que y'a quelque chose qui cloche dans Trust, non ? C'est quoi le problème ?

Tout à fait. Le problème, je vais te dire, c'est moi le problème. J'assume la responsabilité de 13 à Table, et je l'assume. Pourquoi ?  Parce que je n'aurais pas dû laisser sortir cet album dans cet état. Dans Trust, je ne suis pas seul à décider... il y a plusieurs personnes, un producteur qui investit de l'argent sur le groupe, Bernie évidemment qui est le premier concerné avec moi, il y a le groupe surtout Vivi, et il faut essayer de s'entendre. Quand on a décidé de faire cet album, je voulais faire un album basique, rock, du Trust comme les premiers albums, c'était mon envie. Bernie n'avait pas la même envie et je me dois dois de respecter ces envies et ces visions du groupe. Là je suis franc et cash. Il n'avait pas envie de refaire ce qu'on a déjà fait il y a 30 ans, dans Trust on aime bien explorer différents univers, d'ailleurs aucun de nos albums ne se ressemble, donc j'ai dis ok pour faire explorer d'autres horizons et aller dans le sens de Bernie. Il a voulu prendre un DJ, mettre des séquences, j'ai dis ok aussi, pas de problème, tout dépend de comment c'est fait et réalisé. Cela aurait pu être super bien, moi ce que je reproche à cet album, c'est que je trouve qu'il est mal réalisé, et qu'il est très mal mixé. Il n'a pas un bon son, ça ne pête pas. Par contre, j'ai quand même écrit les trois quarts des chansons, sur cet album, et les chansons je les ai chez moi en maquette, chez moi il n'y a pas de DJ, il n'y a pas de samples, il n'y a que basse, batterie, guitare et voix, et les chansons sont super rock, elles pêtent grave, et elles auraient pu sonner bien plus hard sur l'album si elles avaient été mixées autrement. Je n'en veux pas au mec qui a mixé, car en plus il se trouve que pour des raisons indépendantes de ma volonté je n'ai pas pu assister au mixage, et ça m'a mis les boules ! Je peux le dire aujourd'hui, moi aussi cet album me déçoit, il y a de très bonnes chansons, mais comme c'est mal réalisé et mal mixé, c'est pas bon. On entend trop les séquences, les guitares ont un tout petit son, c'est nul ! Les solos sont au fond de la cour là bas... Bref... C'est comme ça, j'assume, j'aurais dû dire non, mais j'ai laissé sortir l'album tel qu'il était, alors que j'avais le pouvoir de dire non. Je me suis dit, il est fait, on verra bien... On ne m'y reprendra plus !

Alors Trust c'est fini ?

Trust existe toujours. Bernie a sorti un album solo il y a quelques mois, il va faire un nouveau film, moi le mien sort le 6 juin, donc là pour cette année 2011, on se consacre chacun à nos projets parallèles. On doit se retrouver en fin d'année pour discuter d'un nouvel album de Trust, et on s'est mis au point avec Bernie, on a envie de faire un album basique et Rock. On a pas envie de passer six mois en studio, le prochain album de Trust, on va bosser avec le groupe dans un studio de répète, et on va l'enregistrer en une semaine dans un studio, voilà. Je le dis, c'est dans notre intention de rentrer en studio pour un album puissant, simple, basique et Rock. Ce que j'ai dit à tout le monde et à Bernie, c'est qu'étant donné qu'on a des carrières parallèles, on peut faire ce qu'on veut et se faire plaisir sur ces propres projets. Mais dans Trust, contrairement à ce que j'ai dit pour mon album que j'ai fait pour moi, en ne pensant qu'à moi, j'estime que pour Trust on doit quelque chose au public qui est fidèle au groupe, et on doit lui donner ce qu'il attend du groupe ! C'est grâce à eux que Trust existe, c'est grâce au public qui nous suit depuis trente ans, et je pense que Trust doit aller dans le sens du public qui le suit depuis tant d'années. Donc quand on va rentrer en studio, on doit penser à notre public, on doit faire ce que les gens attendent de Trust. Et ça veut pas dire baisser son froc, ça veut simplement dire Trust a été ce que ça a été, les gens nous suivent depuis trente ans, on a cette chance. Je tiens à dire que même si 13 à Table a pas super cartonné, il y a quand même bien vendu, on a quand même fait DVD d'or du concert de l'Olympia, on a rempli tous les Zénith de France pendant la tournée. C'est vrai qu'en live, c'est différent, et c'était un Trust plus puissant que sur l'album. Il faut donner donc au public ce qu'il attend légitimement. Voilà, c'est tout. That's all !

Merci à toi pour cette longue interview et bon concert ce soir

Ce soir c'est simplement pour la fête de Music 3000, on va faire des reprises juste pour s'amuser avec des super musiciens locaux, mais je ne joue pas de morceaux de mon album. Merci à toi.

[Hors micro il ajoutera qu'il nous remercie de notre travail, qu'il espère que son album plaira, ne sera pas trop piraté, et qu'il a déjà deux dates à Londres et deux à New York dans sa tournée, et quand je lui parle de la photo sur le CD quelque peu de mauvais gout, il se marre et dit que c'est pour rappeler qu'il fait tout ça pour se marrer, et ne se prend pas au sérieux]

 

 


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