Groupe:

Mass Hysteria

Date:

17 Octobre 2018

Interviewer:

auriano

Interview Jamie Ryan (face à face)

Un condensé de Mass, des clins d’œil aux fans sur un son hystérique. Avec Maniac, sorti le 26 octobre, Mass Hysteria signe son neuvième album studio. Dans la lignée de Failles (2009) et L’Armée Des Ombres (2011), il confirme le virage pris par le groupe vers une musique plus agressive, qui tranche avec ses débuts. Il est aussi bourré de références aux précédents albums, dans ses textes et avec ses sons électros. Nous avons rencontré le petit nouveau du groupe, le bassiste Jamie Ryan (ex Guérilla Poubelle). Il nous raconte son arrivée dans le groupe et la composition éclair de Maniac. Depuis la sortie de Matière Noire en 2015, Mass Hysteria a enchaîné les concerts, reçu un disque d’or pour Contraddiction (1999), une vidéo d’or pour Live à l’Olympia (2013)… Comment avez-vous vécu cette période ?

Cette période était folle, on ne s’en remet pas encore ! Personne dans le groupe ne s’attendait à ce que Matière Noire et sa tournée soient aussi bien reçus. Les fans étaient plus que présents. Et l’album d’or, vingt ans plus tard, c’est fou ! Qu’ils aient un DVD d’or, je trouve ça génial. J’y étais pas pour tout ça bien sûr : Contraddiction est sorti en 1999, j’avais 11 ans… Un peu dur d’être bassiste à cette époque-là ! (rires) C’est impressionnant toutes les bonnes choses qui arrivent à ce groupe en ce moment. Je ne sais pas à qui on a fait du bien, mais apparemment il nous le rend mille fois !

Comme tu l’as dit, tu viens de rejoindre le groupe, fin 2016. Comment est-ce arrivé ?

Je connaissais Yann (Heurtaux, guitariste) depuis plusieurs années, il venait aux concerts d’un de mes anciens groupes et on a un pote en commun. Un jour, ce pote ,Thierry, m’appelle et me dit « Je veux 10% »… Je me dis qu’il déconne, et après il me dit « Appelle Yann ». Alors j’appelle Yann, qui me sort « Il nous faut un bassiste, tu veux le faire ? » Qui refuserait une invitation d’un groupe avec une renommée comme ça ? C’est comme si un mec lambda aux Etats-Unis, un Slipknot l’appelait pour lui dire « tu veux faire de la guitare ? » Qui dirait non à ce genre d’offre ? Yann m’a appelé un mercredi, le vendredi je lui ai envoyé un message en disant « C’est bon, je connais les trente morceaux qu’il faut connaître ». J’ai passé des journées à faire huit heures de basse par jour, à perfectionner les morceaux, j’ai tout mis en œuvre pour que ce soit moi. A la première répétition qu’on a faite ensemble, c’était bon ! C’était un des meilleurs moments de ma vie, se retrouver dans un groupe comme celui-là, qui permet d’en vivre, c’est génial, j’en demande pas plus.

Et depuis, comment ça se passe ?

C’est génial, il y a une bonne entente, j’ai un centre d’intérêt commun avec tout le monde. Avec Yann, on aime les groupes underground comme Converge, Nails. Raphaël (Mercier, batteur), c’est une encyclopédie du metal et du hardrock donc on peut parler pendant des heures. Avec Fred (Frédéric Duquesne, guitariste), on est des geeks du son et du matos guitare. Et avec Mouss (Mouss Kelai, chanteur), on peut parler politique et de la merde dans le monde, et réaliser qu’on déteste les mêmes personnes haut placées dans le gouvernement (rires…) C’est un peu mes oncles du metal, tu sais, les tontons cool un peu plus jeunes que ton père.

Pour en venir à Maniac, quand avez-vous commencé à travailler dessus ?

Quand on a arrêté la tournée de Matière Noire, en septembre 2017, ça faisait deux ans qu’il était sorti. Il fallait pas attendre pour sortir un nouvel album, pour ne pas perdre cet élan. On s’est donné un mois de répit, et on s’est retrouvé fin octobre avec Yann et Fred, entre gratteux. Je suis arrivé le deuxième jour en disant : « Vous avez fait quoi hier ? » Ils m’ont dit : « Assois-toi ». Et là… C’était rapide, c’était direct dans la gueule et c’était Reprendre Mes Esprits. Ç'a été le morceau témoin auquel on a tout comparé. Pendant deux semaines, on se retrouvait tous les trois comme si on allait au boulot, du lundi au vendredi. Yann est le compositeur du groupe depuis des années, il sait ce qu’il veut entendre. Il arrivait le matin avec un riff, on partait de ce riff-là et on voyait où ça nous menait. A chaque fois, la progression du morceau s’est faite naturellement, avec ce qui rendait bien à ce moment-là et qui nous entraînait. Je pense que ça se ressent. En dix jours, l’ossature de l’album était faite. Matière Noire avait eu une période de composition plus longue.

Et après ça, comment ça s’est passé ?

On n’y a plus touché. En janvier, Raphaël, qui vit à Marseille, est arrivé et on a commencé à les répéter, pour qu’il puisse trouver ses roulements et qu’on voit ce que ça donne réellement joué. Ça a pris direct, il y a eu une énergie cool. Mouss a écrit ses voix. Après le Download, on est passé à l’enregistrement.

Comme Matière Noire a bien marché, est-ce que vous aviez plus la pression vis-à-vis de vos fans ?

On n’y échappe pas. Mais on a essayé de ne pas trop y penser, parce qu’on ne voulait pas faire un Matière Noire bis. On s’est dit : ça a bien marché, il y a quelque chose qui plaît, alors partons de là. Matière Noire, à sa sortie, tout le monde disait que c’était le groupe à son plus énervé, à son plus rentre-dedans. Alors on a décidé d’enfoncer le clou, d’aller droit au but, dans le lard, et toutes les expressions qui veulent dire y aller très fort... (rires) C’est une reprise de dynamique et d’énergie, les fans nous en ont donné énormément pendant la tournée, on veut le rendre et dix fois plus.

Tu dis que ce n’est pas un Matière Noire bis, en quoi est-il différent ?

Hum… On a modernisé le son, par exemple dans Arômes Complexes il y a un côté trap, ce hip hop hyper rythmé qui marche bien. On a cherché à faire plus énervé musicalement, ce sont nos influences. Matière Noire était plus énervé que l’Armée Des Ombres, qui était plus énervé que Failles, qui était plus énervé qu’Une somme De Détails… et ça a marché. J’ai déjà entendu Yann dire que Maniac était une revanche sur la période qui a suivi Contraddiction, où les labels avaient essayé de calmer le jeu pour élargir le public, mais ça n’avait pas marché. Après Matière Noire, on aurait pu faire un truc plus calme ; on a fait l’inverse total, on a énervé la bête.

Dans ses textes, Mousse parle beaucoup de lui. On y retrouve aussi des références aux albums précédents, par exemple « A bloc ! positif par passion »…

Mouss voulait arrêter la politisation. Matière Noire était politique, mais ça le désolait de voir que malgré ça, la France a quand même voté pour une certaine personne, que le résultat est toujours le même... Il a décidé très tôt qu’il voulait des textes moins politisés. Et donc il y a cette chanson qui parle de la fraternité dans le public metal, il y a une chanson d’amour. Reprendre Mes Esprits est une introspection totale sur le début de la composition où il était à sec. Ce passage où il essaie de se convaincre que « ça va aller », c’est quelque chose que tout le monde s’est dit à un moment ou à un autre dans sa vie, qui nous affecte. Cet album, c’est une grosse introspection pour lui. Il voulait revenir à comment il écrivait plus jeune, sans politiser la chose, avec sa maturité. Bon, il était obligé de mettre deux ou trois punchlines politiques, comme « à chaque Président élu, c'est le même bordel, en plus d’être cocus, on paie la chambre d’hôtel », c’est dans son for intérieur et on n’échappe pas à soi-même.

Que représente le visuel sur la pochette ?

C’est une femme bouche cousue, il y a une part de revendication de la condition de la femme aujourd’hui. Parce qu’une femme ne gagne toujours pas autant qu’un homme et que pour certains c’est encore « sois belle et tais-toi ». Ses yeux blancs, ses traits asiatiques rappellent l’enfant sur la pochette de Contradiction. Les fans l’ont vu. C’est parti d’une idée de Yann. Il avait vu un dessin du tatoueur Navette et il s’était dit qu’en visuel c’était fort et qu’il voulait en faire un album.

Quel accueil attendez-vous ?

Un accueil chaleureux ! Il y a tout ce qui fait Mass Hysteria, fois dix. Il y en a pour les fans de toutes les époques. Le dernier morceau plaira aux premiers fans avec son côté beaucoup plus électro, qui rappelle Donnez-Vous La Peine. Peut-être que ces fans-là vont retrouver quelque chose dans ce morceau parce que ça leur rappellera 1997, quand c’est sorti et que c’était nouveau. On veut que les fans ressentent l’énergie qu’on a mise dans Maniac. On a beaucoup pensé au live en composant, on veut que ça envoie et que les gens aient envie de bouger. On est parti pour deux ans de tournée. Une première partie est annoncée, d’autres dates vont arriver, les festivals. Et il y aura le Zénith fin 2019.

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