Artiste/Groupe:

Rivers Of Nihil

CD:

Where Owls Know My Name

Date de sortie:

Mars 2018

Label:

Season of Mist

Style:

Technical Death

Chroniqueur:

JimBou

Note:

18/20

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Where Owls Know My Name, ou l'envol des cinq sages....

De tout temps et de toute croyance commune, le hibou a été associé à la sagesse, synonyme de maturité, mais aussi à la nuit et à la mort. Cet adage pourrait paraître inapproprié en ces lieux où il sera question d'un album de Technical Death, mais il n'en est rien. En effet, avec son troisième album intitulé Where Owls Know My Name, traduit littéralement par "Là où les hiboux connaissent mon nom", Rivers Of Nihil semble s'être fait un clin d'œil à lui même.

Après les bombes qu'étaient The Conscious Seed of Light (2013) et Monarchy (2015), ce troisième opus pourrait allègrement prétendre au titre d'album de la maturité, tant l'évolution prête à l'admiration. Si les deux premiers albums livraient un Technical Death plutôt brutal, planant et concis, leur successeur direct ne reniera pas ses origines en y insérant une touche plus progressive et un brin de subtilité qui fera mouche à chaque fois.

Pour piqûre de rappel, le quintet originaire de Pennsylvanie avait débarqué en trombe dans la sphère du Technical Death lorsqu'un certain Erik Rutan (ex-Morbid Angel, producteur de Cannibal Corpse et Nile, entre autres) décida de les prendre sous son aile en leur offrant directement un ticket d'entré chez Metal Blade Records. Le pari fut gagnant car les Pennsylvaniens, que personne n'avait vu venir du haut de leur deux petits EP, avaient beaucoup d'autres idées à mettre sur la table. Cinq ans plus tard, alors que le groupe était déjà rentré dans la cour des grands, la date de sortie de leur troisième effort avait été cochée sur le calendrier d'une fan-base qu'ils n'avaient pas eu de mal à acquérir. Ainsi arriva Where Owls Know My Name, la nouvelle pépite de Rivers Of Nihil qui, sans prétention, aurait pu se contenter des louanges dont le groupe était coutumier. Et si on dit que la gourmandise est un vilain défaut, il faudra l'expliquer à ces Américains qui, comme souvent, prennent un malin plaisir à contredire nos chers proverbes.

Les premières secondes de Cancer/Moonspeak, qui introduisent l'album en douceur et nous plongent lentement dans d'irrésistibles ténèbres, sonnent à présent comme une mise en abyme récurrente à travers chaque album. Et comme toujours, la deuxième piste nous rappelle que Rivers Of Nihil est aux commandes. Si The Silent Life semble se diriger vers les grandes lignes du précédent album qu'est Monarchy, quelques nouveaux détails viennent toutefois immédiatement susciter notre intérêt. A commencer par le saxophone, joué par un certain Zach Strouse si à l'aise, qu'on le croirait partie intégrante du line-up des débuts. Le bonhomme, vieille connaissance des maîtres fondateurs et particulièrement d'Adam Biggs (le bassiste du groupe), mettra tout de même son talent à contribution sur quatre pistes. Cette prise de risque, si on peut l'appeler ainsi, n'est en réalité qu'un détail parmi tant d'autres, car l'album du Hibou se veut plus accessible et plus fringant que ses prédécesseurs. Afin d'y parvenir, Jake Dieffebach, le vocaliste en chef, s'est adonné pour la première fois aux plaisirs du chant clair : une simple idée qui pourrait donner la chair de poule aux initiés de la première heure. Et pourtant le résultat est décapant, comme en témoigne A Home où chant clair et growl se mêlent parfaitement. Cette piste où le Death est plus rutilant que jamais, et qui s'impose comme une incontournable de l'album, offre à elle-seule la preuve que Rivers Of Nihil n'a pas renié ses origines en livrant peut-être pour la première fois, un titre phare qui donnera une vraie postérité au groupe. Il n'en faut pas plus pour comprendre qu'une étape à été franchie, à l'image de Jared Klein, batteur fraîchement débarqué quelques temps avant l'enregistrement et qui livre une prestation XXL de long en large, comme le prouvent notamment A Home et surtout Old Nothing, où la violence inégalée des premières secondes nous cloue littéralement au sol. Brody Uttley, le guitariste en chef et maître à penser des grandes lignes musicales, est tout simplement dans la forme de sa vie. Comme si la composition et le rôle de soliste ne lui suffisaient pas, il est également à la baguette sur les arrangements acoustiques, les synthétiseurs ainsi que la programmation. Son second à la guitare, Jon Topore, se contente quant à lui des parties les plus rythmiques et agressives, pour une répartition des tâches au poil. Les musiques s'enchaînent et se déchaînent de manière déconcertante, dans un exercice de style où chacune d'entre elles se démarque à sa façon, en apportant son propre brin d'air frais. Tantôt death, prog, atmosphériques ou jazzy, les influences ne manquent pas, et ce n'est pas l'épique et incontournable Subtle Change qui nous dira le contraire, du haut de ses huit minutes et de sa palette complète d'ambiances, de riffs et de solos. Cette dernière, judicieusement placée au milieu de l'album, laissera place à Terrestria, troisième du nom, dont l'idée nous rappelle de loin un certain Soulfly, qui a réalisé autant d'albums que de pistes éponymes. Ce passage de témoin en tout cas, marquera au sein de l'album, la transition d'un passage plus death et brutal vers un passage plus atmosphérique, inspiré d'un Fallujah en grande forme, avec Death Is Real et Hollow en tête de gondole.

Vous l'aurez compris, Where Owls Know My Name a tout pour plaire. Si les inconditionnels de la première heure y trouveront tous les ingrédients chers à leur cœur, l'ambition gargantuesque du groupe n'aura aucun mal à rameuter de nouveaux adeptes. Le hibou peut à présent regarder l'horizon sereinement. Plus sereinement en tout cas, car son œuvre qui nous parle sans cesse de désespoir, de déchéance et de vide à travers ses textes, est réellement poignante. Il laissera une trace et nous rappellera que c'est un comble, pour un album, de parler autant du vide quand il est si bien rempli.

Tracklist de Where Owls Know My Name : 

01. Cancer / Moonspeak
02. The Silent Life
03. A Home
04. Old Nothing
05. Subtle Change (including the Forest of Transition and Dissatisfaction Dance)
06. Terrestira III : Wither
07. Hollow
08. Death Is Real
09. Where Owls Know My Name
10. Capricorn / Agoratopia

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